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Alerte à la faim en Guinée-Bissau à la suite d’une baisse du prix de la noix de cajou

With cashew buyers not buying Guinea Bissau’s 2006 crop, tens of thousands of tons sit piled up in warehouses and much of the harvest is now rotting, Buba, capital of Quinara Region in southern Guinea Bissau, 26 Jan 2007 David Hecht/IRIN
With cashew buyers not buying Guinea Bissau’s 2006 crop, tens of thousands of tons sit piled up in warehouses and much of the harvest is now rotting, Buba, capital of Quinara Region in southern Guinea Bissau, 26 Jan 2007
Près de la moitié de la population de la Guinée-Bissau peine à se procurer suffisamment de nourriture pour survivre en raison de la chute du prix de la noix de cajou. Selon les organisations d’aide humanitaire, les familles sautent des repas ou vendent des têtes de bétail pour survivre jusqu’à la prochaine récolte, qui aura lieu en septembre.

Le prix actuel moyen d’un kilo de noix de cajou est de 112 francs CFA (0,02 dollar) – le plus faible enregistré jusqu’à présent –, contre 300 francs CFA en moyenne en 2012. Ce recul de 63 pour cent est dû à la baisse des prix internationaux, à la diminution de la demande du principal importateur de la noix de cajou de Guinée-Bissau (l’Inde), au coup d’État d’avril 2012, aux désaccords entre le gouvernement et les commerçants au sujet du prix étalon et à la décision des banques de réduire les prêts accordés aux commerçants.

« Il en résulte une baisse significative de la sécurité alimentaire qui oblige les habitants à recourir à des mécanismes d’adaptation, comme sauter des repas, réduire leur apport alimentaire, vendre leurs animaux et ainsi de suite », a dit à IRIN Ussama Osman, directeur pays du Programme alimentaire mondial (PAM) en Guinée-Bissau.

Le prix de la noix de cajou accuse une baisse pour la deuxième année consécutive. Entre janvier et juillet 2012, le pays a exporté 60 000 tonnes de noix de cajou, contre plus de 100 000 tonnes pendant la même période en 2011.

Quatre-vingts pour cent des 1,6 million d’habitants de la Guinée-Bissau sont impliqués dans la production de noix de cajou. Les agriculteurs vendent leur récolte pour acheter de la nourriture ou échangent les noix de cajou contre d’autres denrées alimentaires. Les termes de l’échange se sont également détériorés. Un kilo de riz « coûte » désormais 3 kilos de noix de cajou, alors que la valeur des deux produits était auparavant équivalente, a expliqué M. Osman.

« Le régime alimentaire des habitants est de plus en plus inadéquat. Ils s’en tiennent à l’aliment de base [le riz], mais les termes de l’échange affectent la qualité et la quantité de leur apport alimentaire », a-t-il dit. « Pendant cette période de soudure, 48 pour cent de la population est confrontée à un déficit alimentaire important qui exige une intervention d’urgence. »

D’après une évaluation rapide de la sécurité alimentaire réalisée en juin dans sept des neuf régions du pays par le PAM, l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), le ministère de l’Agriculture de la Guinée-Bissau, l’Agence nationale de la noix de cajou et l’Institut national de statistiques, 8 pour cent seulement des personnes interrogées avaient suffisamment de réserves de céréales pour se nourrir pendant un mois et demi.

Environ 38 pour cent de la récolte de cette année n’a pas été vendue en raison des faibles prix pratiqués sur les marchés. On s’attend par ailleurs à ce que les importations de riz diminuent, car elles dépendent des revenus de la noix de cajou. « Il y a donc un manque d’accès et de disponibilité de la principale source de nourriture en plein pendant la saison de soudure », a dit Patrick David, un analyste régional de la sécurité alimentaire de la FAO basé à Dakar.

Dépendance excessive à la noix de cajou

La noix de cajou représente 90 pour cent des exportations de la Guinée-Bissau et 45 pour cent de son PIB. Selon le Fonds monétaire international (FMI), le gouvernement risque d’avoir de la difficulté à verser les salaires des fonctionnaires après la fin de la saison de récolte, en septembre. Les principaux prêteurs ont en effet retiré leur soutien budgétaire à la suite du coup d’État d’avril 2012.

Au fil des ans, les agriculteurs ont rasé des pans de forêt pour y planter des arbres à cajou. Ils sont de plus en plus dépendants de cette culture intensive qui demande peu de travail, mais nécessite de vastes étendues de terres. La production céréalière s’en trouve considérablement réduite. Les revenus tirés de la culture de la noix de cajou permettent de financer, entre autres choses, les toitures de tôle des maisons, les mariages, les banquets, les funérailles et l’achat de bicyclettes ou de sacs de riz, a expliqué Marina Temudo, agronome auprès de l’Institut de recherche tropicale (IICT), basé au Portugal.

« Le pays a été transformé en une énorme plantation d’arbres à cajou. Les risques encourus sont à la fois économiques et environnementaux. Les agriculteurs sont désormais conscients des dangers économiques de la dépendance exclusive à une seule culture commerciale dont le marché est très instable, mais ils ignorent encore les risques de la monoculture en termes de maladies et d’animaux et d’insectes nuisibles », a dit Mme Temudo à IRIN.

« Le passage d’un approvisionnement alimentaire relativement large à une dépendance presque totale à une culture commerciale n’est pas sans inconvénient pour les agriculteurs. Les effets combinés de la réorientation des systèmes d’exploitation agricole vers la production de noix de cajou, de la dépendance envers les marchés pour l’approvisionnement alimentaire, des conséquences du changement climatique et de l’utilisation accrue du crédit pour faire face aux pénuries de nourriture qui sévissent avant la récolte entraînent un accroissement de l’insécurité alimentaire et de l’endettement. »

Les agriculteurs devraient diversifier leur production, estime Mme Temudo, ajoutant que certains d’entre eux ont commencé à se réorienter vers la production alimentaire. « Ce processus devrait être soutenu par des agents externes et des bailleurs de fonds par le biais de mesures incitatives destinées à encourager la production alimentaire et la mise en place d’installations de transformation », a-t-elle dit.

La crise actuelle force certains agriculteurs à vendre un produit qu’ils n’ont pas encore récolté à la moitié de son prix habituel pour acheter des denrées de base, a expliqué M. Osman, du PAM. Depuis le coup d’État, le financement des programmes de nutrition de base et de sécurité alimentaire de l’organisation a été gelé.

« Il faut un soutien financier immédiat de la part des bailleurs de fonds. Ceux-ci doivent par ailleurs prendre conscience que la pression politique, les sanctions et les boycotts punissent les plus vulnérables. Il faut un geste immédiat pour aider ces gens », a-t-il dit.

ob/cb-gd/ld


This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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