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Trouver la sécurité en ville

An aerial view shows the Nairobi city center in Kenya. The United Nations has recently said that climate change bringing floods and drought, growing biofuel demand and national policies to protect domestic markets could drive up global food prices and thr Siegfried Modola/IRIN
An aerial view of Nairobi city center
Chaque année, des centaines de milliers de personnes sont obligées de quitter leur lieu de résidence en raison de la violence ou de catastrophes naturelles. Mais l’image du déplacement se transforme : en général, elle est associée à des camps tentaculaires établis en zone rurale, mais aujourd’hui, les déplacés sont tout aussi susceptibles de vivre en zone urbaine, souvent dans l’anonymat.

Le Groupe de travail sur les politiques humanitaires (Humanitarian Policy Group, HPG) de l’Institut de développement d’outre-mer (Overseas Development Institute, ODI) a étudié ce phénomène dans une série d’études intitulées « Sanctuary in the City? », qui examine les conditions et les politiques de déplacement dans huit centres urbains à travers le monde.

Simone Haysom du HPG a dit à IRIN, « Le déplacement urbain est le futur du déplacement. Bon nombre de déplacés sont originaires des centres urbains et ne supporteront pas les conditions de vie dans les camps. Plus de la moitié des camps sont situés en zone urbaine et ce pourcentage va augmenter, sauf dans les pays où les autorités gouvernementales appliquent des politiques strictes en matière de placement des déplacés dans les camps. Et les humanitaires ne disposent pas des outils et des ressources nécessaires pour faire face à la question du déplacement urbain ».

Camps versus villes

Maintenir les populations déplacées dans les camps de réfugiés ou dans les camps pour les personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays (PDIP) facilite la gestion des camps par les agences de secours d’urgence. « Les opérations humanitaires sont parfois plus coûteuses et longues à exécuter dans les zones urbaines », selon le rapport du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) sur les Réfugiés dans le monde en 2012.

« Contrairement aux acteurs humanitaires des camps de réfugiés, ceux travaillant dans les villes ont souvent peu d’informations sur la sécurité alimentaire et l’état nutritionnel des réfugiés urbains et des déplacés internes », indique le rapport.

Alors que le monde s’urbanise, les déplacés sont de plus en plus nombreux à s’orienter vers les villes. « Contrairement à un camp fermé, les villes permettent à l'évidence de conserver l'anonymat, de gagner de l'argent et de se construire un avenir meilleur », peut-on lire sur le site Internet du HCR.

Cependant, les politiques de placement dans les camps sont intéressantes pour les gouvernements qui ont des difficultés à répondre aux demandes de services dans les zones urbaines, où la présence de populations déplacées pourrait induire des contraintes sur les ressources et attiser le ressentiment de la population locale.

Katy Long de la London School of Economics (école d’économie de Londres, LES) examine les problèmes posés par les déplacements de longue durée, a dit « Quatre-vingt pour cent des populations déplacées sont accueillies dans des pays en développement et elles sont en concurrence pour les ressources disponibles. Les politiques de nationalisme jouent aussi un rôle, et le processus de placement dans les camps ainsi que l’aide qui l’accompagne offrent la possibilité d’en répercuter les coûts sur [les agences d’aide humanitaire]. Les camps n’apportent peut-être pas de réponse aux problèmes fondamentaux et peuvent même contribuer à placer les réfugiés et les PDIP dans une vulnérabilité extrême, mais ils sont pertinents en termes d’économie politique ».

Dans le déni

L’étude du HPG a montré que les responsables gouvernementaux déclarent souvent, contre toute évidence, que le déplacement n’est qu’un problème temporaire.

Cela était le cas en Syrie, dont le gouvernement semblait occulter le fait que les agriculteurs et les éleveurs avaient été obligés de s’installer à Damas en raison de la sécheresse et des pertes en terre. L’étude du HPG (réalisée en 2011, alors que le conflit épargnait encore la capitale) a conclu que le gouvernement n’a cessé d’insister sur la nature temporaire de ces déplacements et a essayé de limiter la distribution de l’aide dans les camps sordides destinés aux déplacés, installés aux abords de Damas « pour éviter de créer une culture de la dépendance ».

Les auteurs de l’étude ont écrit, « Même si le gouvernement et la communauté internationale qualifient les déplacements … de temporaires … l’ampleur des pertes dans le nord-est de la Syrie est considérable, et les retours semblent impossible sans … une stratégie à long terme pour restaurer la viabilité des modes de subsistance ruraux dans ces zones ».

De même ; les autorités afghanes se refusent à accepter que les nouveaux arrivants qui affluent vers la capitale, Kaboul, souhaitent s’y installer. L’étude réalisée à Kaboul par le HPG a indiqué que, « La politique mise en œuvre par le gouvernement à tous les niveaux s’appuie sur l’idée que le déplacement n’est qu’un phénomène temporaire et que les populations finiront par repartir dans les zones rurales dont elles sont originaires ».

Ces hypothèses peuvent entraîner une limitation de l’aide. D’après l’étude, « Un haut responsable … a expliqué pourquoi il avait refusé qu’une agence internationale … installe des toilettes et des puits temporaires dans un camp, parce que ‘les PDIP sont ici pour une courte durée et ils n’ont pas besoin de toilettes et d’un puits dans cette situation... Si nous leurs offrons ces services, ils ne repartiront jamais chez eux’ ».

Mme Long a dit à IRIN que, en réalité, plus de deux tiers des PDIP dans le monde sont déplacées depuis plus de cinq ans et que les autorités refusent parfois de faire face à cette réalité, notamment parce que cela donne une mauvaise image d’elles.

« En Afghanistan, par exemple, reconnaître que les déplacements sont encore un problème, c’est reconnaître que la paix est encore fragile et imparfaite. Mais plutôt que de ne chercher que des solutions permanentes, nous devons apprendre à vivre avec les personnes déplacées aujourd’hui et nous devons nous efforcer d’améliorer leurs conditions de déplacement, car elles sont bien pires qu’elles ne devraient l’être à cause des politiques mises en œuvre », a dit Mme Long.

Des possibilités d’installation

Selon l’étude réalisée par les chercheurs du HPG à Kaboul, une grande majorité des déplacés ont indiqué qu’ils avaient l’intention de s’installer dans la ville de manière permanente. D’autres éléments suggèrent que, s’ils sont autorisés à le faire, ils pourraient s’intégrer à la population et commencer une nouvelle vie.

Soixante ans après leur arrivée, les Palestiniens de Damas sont toujours officiellement considérés comme des réfugiés, mais bon nombre d’entre eux ont quitté les camps destinés aux réfugiés et trouvé un meilleur logement. Les « camps » accueillent aujourd’hui une population mixte, notamment des travailleurs migrants, des PDIP et des Syriens pauvres.

L’intégration est peut-être plus facile aujourd’hui, car nombre de conurbations des pays en développement sont des villes de nouveaux arrivants. Une étude du HPG a montré que la quasi-totalité des habitants de Yei, une ville du Soudan du Sud, n’étaient pas originaires de la ville. Les nouveaux arrivants sont aussi nombreux dans les zones urbaines plus établies, comme Nairobi au Kenya ; une étude estime que seulement 20 pour cent des habitants de moins de 35 ans sont nés dans cette ville.

À Yei, Nairobi et Kaboul, le HPG a conclu que les déplacés vivaient dans des conditions similaires à celles des autres nouveaux arrivants : ils étaient relégués dans des campements de fortune avec peu ou pas d’équipements, avaient des difficultés à trouver un logement décent et à gagner leur vie. Mme Long de la LSE indique que les spécialistes se demandent désormais si ces situations devraient être traitées comme un problème plus général de développement ou s’il faut faire la distinction entre les PDIP et les autres pauvres des zones urbaines.

« Il y a quelques points sur lesquels nous devons nous concentrer », a-t-elle dit à IRIN, « comme le statut légal des réfugiés, qui bien souvent n’ont pas les bons documents pour vivre en ville. Il ne faut pas isoler le déplacement et en faire une question à part, beaucoup de solutions fonctionnent mieux lorsqu’elles sont communautaires, notamment parce que dans ce cas-là nous ne privilégions pas un groupe par rapport à un autre et que nous ne créons pas du ressentiment contre les déplacés ».

eb/rz-mg/amz


This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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