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Une nouvelle souche de champignon menace le blé en Afrique du Sud

Wheat David Gough/IRIN
Alors que le marché mondial des céréales de base est de plus en plus tendu, les scientifiques viennent d’apprendre la découverte en Afrique du Sud d’une nouvelle souche de rouille des tiges Ug99, une maladie fongique virulente pouvant dévaster des champs de blé entiers en quelques semaines.

D’éminents scientifiques internationaux spécialisés dans le blé se sont rassemblés à Pékin, en Chine, pour un colloque mondial sur cette maladie en rapide mutation, organisé par la Borlaug Global Rust Initiative (BGRI). La découverte de cette nouvelle variante porte le nombre total de nouvelles souches d’Ug99 présentes en Afrique du Sud à quatre, ont dit à IRIN des scientifiques participant au colloque.

« [L’apparition] des variantes d’Ug99 en Afrique du Sud peut s’expliquer de deux façons », a dit Zacharias Pretorius, professeur en pathologie végétale à l’université de l’État libre, en Afrique du Sud. « Premièrement, les spores fongiques ont pu être transportées par le vent depuis des pays au nord du nôtre, où nous avons détecté des [mutations] similaires. Deuxièmement, je crois qu’au moins une de ces quatre variantes s’est développée localement par mutation. »

Heureusement, a dit M. Pretorius, l’espèce de blé qui semble la plus vulnérable à la nouvelle variante d’Ug99 n’est pas très populaire parmi les consommateurs. L’apparition de cette nouvelle souche de rouille indique cependant à quel point ce champignon est virulent.

Le champignon menace également les champs de blé d’Australie, l’un des plus grands producteurs du monde. Dave Hodson, un scientifique de l’International Maize and Wheat Improvement Centre (CIMMYT), basé au Mexique, a signalé que des spores de rouilles avaient déjà migré d’Afrique du Sud en Australie à trois reprises, la dernière fois en 1973.

Lorsqu’en 1969, des spores du champignon avaient migré de l’Afrique du Sud vers l’Australie, cela avait causé des épidémies qui avaient détruit des centaines de milliers de dollars de blé.

La polio de l’agriculture

La rouille des tiges du blé, également appelée rouille noire du blé, est une maladie transmise par le vent qui peut détruire des champs entiers. L’agent pathogène s’introduit dans la tige de la plante et détruit son tissu vasculaire. Le blé peut être affecté par trois types de rouille, mais selon la BGRI, la rouille des tiges est la plus redoutée.

Plusieurs épidémies se sont déclenchées en Afrique de l’Est, notamment au Kenya, qui a été le premier pays attaqué par la souche originale de l’Ug99 après la découverte de la maladie en Ouganda en 1999. Selon le CIMMYT, peu de fermiers savent reconnaître les premiers symptômes de rouille et savent qu’il faut détruire les plantes infectées pour éliminer les spores. En 2007, des épidémies ont causé la perte de 15 à 30 pour cent de la production de blé au Kenya.

Le champignon a commencé à muter rapidement au cours des dernières années. C’est pourquoi il a été surnommé la « polio de l’agriculture ». Les nouvelles mutations, ou « races », de la rouille des tiges ont acquis la capacité de vaincre deux des principaux gènes de résistance à cette maladie, qui sont largement utilisés dans les programmes de sélection du blé partout dans le monde.

La présence de la nouvelle souche a également été signalée au Zimbabwe.

« La bonne quantité d’humidité et une température adéquate dans les zones de production de blé en Afrique du Sud et au Zimbabwe tout au long de l’année ont permis à cette souche virulente de bien se développer », a dit Cobus le Roux, directeur général de la division de la production agricole du Conseil pour la recherche agricole en Afrique du Sud.

Selon Ronnie Coffman, vice-président de la BGRI et chercheur principal et directeur du projet pour un blé durablement résistant à la rouille de l’université Cornell, des chercheurs ont également commencé à réexaminer le rôle de l’épine-vinette, une plante ligneuse souvent présente dans les zones de production de blé.

L’épine-vinette avait été éradiquée en Europe et en Amérique du Nord, car elle hébergeait la rouille des tiges et lui permettait de survivre et de se propager entre les saisons de croissance du blé. « Des chercheurs ont trouvé des épines-vinettes dans des zones [d’Afrique de l’Est] touchées par les nouvelles souches de rouille des tiges et de rouille jaune et étudient la possibilité d’un lien entre la plante et la virulence accrue de nouvelles [variantes] de rouille », a dit M. Coffman.

Un combat de longue haleine

Selon M. Pretorius, si les fongicides restent une manière efficace de lutter contre la rouille des tiges, ils doivent être appliqués au moment opportun et bien couvrir les cultures, notamment sur la partie inférieure des tiges de blé.
Des scientifiques ont développé des variétés de blé résistantes à la maladie afin de préserver la production alimentaire. Ravi Singh, scientifique au CIMMYT, a participé à la mise au point de plusieurs gènes mineurs de résistance à la rouille, qui sont associés pour combattre l’infection, ce qui leur donne un avantage sur les gènes utilisés individuellement.

La meilleure façon de vaincre la maladie est de remplacer les variétés de blé vulnérables par quelques-unes des 20 nouvelles variétés résistantes à la rouille des tiges disponibles. Des difficultés ont cependant été rencontrées pour faire parvenir les nouvelles semences aux agriculteurs.

« Nous avons couvert 10 à 15 pour cent des cultures de blé cette année, mais l’accès à tous les agriculteurs est problématique », a dit Bedada Girma, responsable du groupe de travail sur la rouille des tiges de l’Institut de recherche agronomique éthiopien.

En 2010, les cultures de blé d’Éthiopie ont été touchées par la rouille jaune, une autre infection fongique. Or, en Éthiopie, les zones rurales ne disposent pas de magasins de fournitures agricoles permettant de distribuer de nouvelles semences. Dans de nombreux pays d’Afrique, la plupart des agriculteurs achètent leurs semences à d’autres agriculteurs.

« Nous devons investir dans l’amélioration de nos infrastructures et mettre en place des centres de distribution dans les villages », a dit M. Bedada.

L’augmentation des prix ajoute à l’urgence

L’augmentation des prix des céréales de base a donné une impulsion aux efforts de lutte contre de telles épidémies.
Le prix du blé n’a pas baissé depuis la flambée des prix des denrées alimentaires de 2007-2008, a ajouté M. Bedada.

Pourtant, la BGRI reste optimiste. « Même si [les semences résistantes] ne sont semées que sur cinq pour cent de la superficie totale de blé, le blé résistant récolté pourrait être utilisé comme semence, ce qui pourrait permettre de remplacer complètement les variétés vulnérables en un an, au cas où l’Ug99 apparaîtrait. La plupart des pays devraient passer la barre des cinq pour cent lors de la saison de croissance de 2012-2013 » est-il estimé dans un rapport publié par l’initiative.

Selon le CIMMYT, les scientifiques ne cherchent pas à remplacer toutes les cultures par une ou deux variétés résistantes. Ils prévoient en effet de continuer à créer de nouvelles variétés encore plus productives pour un meilleur rendement et une plus grande diversité génétique.

En attendant, la « vaste région de production de blé qui s’étend de l’Afrique du Nord jusqu’aux portes de la Chine — le plus grand pays producteur de blé au monde — en passant par l’Asie Centrale est toujours vulnérable au champignon », a dit M. Coffman.

Afin de parer à d’éventuelles épidémies, les scientifiques ont annoncé le lancement d’un système mondial de détection de la rouille pouvant surveiller 42 millions d’hectares de blé dans 27 pays en développement.

M. Hodson et ses collègues du CIMMYT à Pékin sont en train de mettre au point une « carte des risques » pour aider les chercheurs des pays susceptibles d’être touchés par des souches virulentes de rouille des tiges et de rouille jaune. Ces cartes permettront d’évaluer la gravité de la menace et de préparer des mesures pour y faire face. Les concepteurs de cette carte espèrent ajouter plus tard des données concernant la vitesse et la direction du vent pour faire de ce programme un outil d’alerte précoce pour les champignons, a dit M. Hodson à IRIN.

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This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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