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La redevabilité en action

Woman holding a beneficiary card The Cash Learning Partnership
Une solution idéale – les transferts d’argent offrent une alternative et assurent la dignité

Depuis quelques années, le terme de « redevabilité » devient un mot à la mode dans le monde humanitaire, mais reste un luxe que bon nombre de professionnels humanitaires ne peuvent pas se permettre en raison des pressions et des contraintes qui pèsent sur ce secteur.

Pour Maria Kiani, conseillère en matière de qualité et de redevabilité pour le Partenariat international pour la redevabilité humanitaire (Humanitarian Accountability Partnership, HAP), « Il ne s’agit pas d’un débat principes vs pragmatisme. Il s’agit d’une approche qui concilie pragmatisme et principes… Il ne s’agit pas d’essayer de modifier le contexte, mais de la façon dont on travaille dans ce contexte ».

Voici quelques initiatives mises en œuvre pour faire de la redevabilité une réalité même dans les situations les plus difficiles :

SMS/projet pilote sur les médias sociaux, Somalie : Le Conseil danois pour les réfugiés (Danish Refugee Council, DRC) a mis en place un nouveau mécanisme de feedback dans la capitale somalienne de Mogadiscio : ce mécanisme permet de relever sur une carte disponible en ligne des plaintes ou d’autres retours d’information envoyés par SMS et filtrés par thème et par localisation. Les populations affectées, les partenaires, le gouvernement ou les observateurs extérieurs peuvent effectuer des recherches sur le site Internet et suivre la réponse apportée à chaque plainte, ou s’inscrire pour recevoir des courriels relatifs à des sujets spécifiques. Certaines des plaintes déposées sont ensuite partagées sur FacebookTwitter et un blog afin de permettre des discussions.

« C’est un peu risqué », indique Heather Amstutz, la directrice du DRC en Somalie, « mais cela nous a montré que c’était possible ».

Programme de communication humanitaire, Pakistan : Ce programme, mis en place afin de comprendre pourquoi les fournitures d’urgence distribuées aux populations déplacées dans le nord du Pakistan étaient vendues sur le marché, est devenu un centre d’appels humanitaire inter-agences animé par l’Organisation internationale pour les migrations (OIM). Il reçoit des retours d’information et des plaintes relatives aux opérations humanitaires mises en œuvre dans le pays par les Nations Unies, les organisations non gouvernementales (ONG) ou le gouvernement, et renvoie les plaintes à l’agence ou au groupe sectoriel concerné qui essaye ensuite de trouver une solution dans un délai déterminé.

Le programme a mis à disposition des personnes dans le besoin un annuaire « pages jaunes » basé sur l’outil 3W (Who is doing What, Where (qui fait quoi, où)) utilisé par les acteurs de l’aide humanitaire. Il permet notamment à ces personnes de s’adresser aux agences concernées.

Dans le cadre du programme, l’OIM a élaboré un document présentant des questions fréquemment posées par les bénéficiaires de l’aide, comme « Où puis-je trouver de la nourriture ? » ou « De quels documents ai-je besoin pour bénéficier de l’aide ? ». Ces questions ont été traduites et distribuées aux travailleurs présents sur le terrain pour qu’ils informent les communautés. 

HESPER Scale : Le « Humanitarian Emergency Settings Perceived Needs Scale » est un questionnaire gratuit et facile d’utilisation d’une durée de 15 à 30 minutes élaboré par le King’s College de Londres et l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Il associe des méthodologies d’enquête et des entretiens qualitatifs permettant d’évaluer les besoins perçus des communautés affectées par des catastrophes naturelles ou un conflit d’une manière représentative et scientifique. L’organisation World Vision a commencé à l’utiliser sur le terrain et envisage d’en faire une application pour iPhone.

Liste de médias humanitaires : Les agences d’aide humanitaire ont parfois du mal à trouver des spécialistes de « l’information humanitaire » en cas de situation d’urgence. En janvier, Internews a élaboré une liste de médias humanitaires afin d’essayer de combler ce manque. Dans le cadre de son Agenda transformatif, le Bureau des Nations Unies pour la coordination des affaires humanitaires (OCHA) a également mis en place une équipe de leaders humanitaires expérimentés qui peuvent être déployés sur le terrain dans les 72 heures suivant le début d’une situation d’urgence. L’Assessment Capacities Project (ACAPS) dispose également d’une liste d’experts dans le domaine de l’évaluation des besoins et de la préparation afin de favoriser un déploiement rapide.

Groupe de travail « redevabilité », Dadaab : Lorsqu’une multitude d’acteurs demandent aux mêmes communautés des retours d’informations lors d’une situation d’urgence, les populations affectées peuvent ressentir une « lassitude à l’égard de la redevabilité ». Afin de répondre à ce problème et à d’autres défis, HAP a participé à la création du groupe de travail « redevabilité et qualité » de Dadaab (Dadaab Accountability and Quality Working Group) au sein duquel les agences qui interviennent sur le terrain peuvent aborder les questions relatives à la redevabilité et proposer des interventions conjointes.

Ligne téléphonique anti-fraude, Pakistan: L’Agence américaine pour le développement international (USAID) a mis en place une ligne téléphonique qui permet à la population de dénoncer des faits de corruption commis dans le cadre de projets financés par l’USAID au Pakistan à Transparency International Pakistan et de suivre le traitement des plaintes. 

Dans l’œil des autres : Suite aux meurtres de membres du personnel de Médecins Sans Frontières (MSF) en Afghanistan et à la confusion qui régnait entre MSF et la force de maintien de la paix des Nations Unies en République démocratique du Congo (RDC), l’association a tenté de comprendre comment elle était perçue par les populations auxquelles elle vient en aide. Ses recherches ont abouti à la publication du livre « Dans l’œil des autres » en avril. MSF indique qu’elle a tiré de nombreux enseignements de cette étude et qu’elle a modifié son mode d’intervention. Des patients ont, par exemple, reproché à MSF de se concentrer sur les maladies négligées, alors que le paludisme est la maladie qui fait le plus de victimes ; d’autres ont indiqué que MSF devrait donner la priorité aux maladies chroniques telles que le diabète plutôt qu’à la vaccination et aux épidémies dans des régions comme le Moyen-Orient.
 

« Cette recherche a soulevé diverses questions relatives à des domaines variés, des RH à la gestion médicale en passant par la gestion de la sécurité et les questions d’identité – la redéfinition des principes d’indépendance, de neutralité, d’impartialité », dit Caroline Abu-Sada, coordinatrice de l’Unité de recherche de MSF Suisse à Genève et auteur du livre. 

Service d’information humanitaire de Dadaab : Le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) et d’autres partenaires de la communauté humanitaire soutiennent la création d’une station de radio communautaire basée dans le camp de réfugiés de Dadaab et dirigée par Star FM. Internews identifiera les réfugiés et les membres des communautés hôtes et les formera au métier de journaliste. Dans le cadre de l’effort visant à combler le manque d’informations entre les travailleurs humanitaires et les populations affectées, d’autres médias ont vu le jour à Dadaab, y compris la lettre d’information « The Refugee ».

Projet de communication, sud-est du Kenya : Vision Mondiale (World Vision) et infoasaid utilisent les SMS et une émission de radio mensuelle de 45 minutes pour diffuser des informations relatives aux prix du bétail, au contenu des paquets d’aide alimentaire et aux dates de distribution de l’aide. Le personnel de World Vision répond également aux questions posées durant l’émission.

« Elle a beaucoup de succès car […] elle a créé un espace où les communautés et les membres du personnel peuvent dialoguer », dit Madara Hettiarachchi, directrice adjointe chargée de la redevabilité humanitaire pour World Vision International. « La communauté en a besoin ».

Chargeurs solaires, centre du Kenya : ActionAid et infoasaid ont distribué 250 téléphones portables et chargeurs solaires aux communautés touchées par la sécheresse à Isiolo, dans le centre du Kenya. En utilisant des technologies comme FrontlineSMS et Freedom Fone, les organisations peuvent leur transmettre des informations sur les prix du bétail et les distributions de produits alimentaires. Grâce à ces équipements, les travailleurs humanitaires n’ont pas besoin de se déplacer sur le terrain en 4x4 et les populations peuvent entrer en contact avec des centres d’aide 24 heures sur 24.

« Les déplacements sont toujours nécessaires, mais la communication est plus flexible », dit Robert Powell d’Infoasaid, qui permet aux agences humanitaires et aux bénéficiaires de l’aide de communiquer.

Carte de crises humanitaires, RCA : En République centrafricaine, Internews et l’Association des journalistes pour les droits de l’homme (Association of Journalists for Human Rights) ont élaboré une carte de crises humanitaires qui permet aux journalistes locaux de vérifier les informations fournies par la population, de les reporter sur une carte et de les partager en temps réel avec les acteurs humanitaires qui présentent ensuite des informations relatives à leur réponse sur la carte. 

Outil d’évaluation des comités de camps : Les agences d’aide humanitaire désignent souvent les représentants des camps comme interlocuteurs pour le feedback et les plaintes – mais ces interlocuteurs ne sont pas toujours représentatifs, ils peuvent manquer d’expérience ou ne pas avoir un comportement éthique. HAP a élaboré des lignes directrices – y compris des questionnaires et des guides de discussion – permettant aux agences d’aide humanitaire d’évaluer la qualité et la représentativité de leurs comités de camp.

L’initiative « Global Pulse » des Nations Unies : Initiée par le Secrétaire général des Nations Unies Ban Ki-moon, cette initiative vise à détecter et collecter des données numériques afin d’améliorer la compréhension de la vie des communautés qui vivent dans des régions inaccessibles aux travailleurs humanitaires, mais qui fournissent des informations lorsqu’elles utilisent des téléphones portables ou accèdent à des services numériques. La recharge du crédit d’un téléphone portable pourrait être le signe d’une conjoncture économique favorable. La vente de bétail pourrait laisser entrevoir une crise alimentaire. « Les véritables effets d’une crise mondiale n’apparaissent que des années plus tard […] lorsque le mal est déjà fait », indique le site Internet de Global Pulse. « La plupart des données utilisées pour suivre le progrès vers la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD), par exemple, remontent à 2008 ou plus tôt – avant l’apparition de la crise économique actuelle ». Donner aux travailleurs humanitaires un accès plus rapide aux informations en temps réel sur la vie des populations sur place pourrait permettre une prise de décision et une réponse plus rapides.

Le « Listening Project » (Projet d’écoute) : Mis en œuvre par l’agence de conseil « Collaborative for Development Action », le Projet d’écoute s’est rendu dans 20 pays en l’espace de quatre ans pour rencontrer les communautés locales, les responsables gouvernementaux, les chefs religieux et traditionnels, les enseignants, les travailleurs de la santé, les entrepreneurs, le personnel des organisations locales, les jeunes et les enfants, les femmes et les hommes et les interroger sur leurs expériences en tant que bénéficiaires de l’aide. Certaines des informations obtenues sont disponibles ici

ACAPS : L’Assessment Capacities Project, une initiative mise en œuvre par un consortium d’organisations non gouvernementales, a élaboré un certain nombre d’outils pour permettre aux acteurs humanitaires de réaliser de meilleures évaluations en temps de crise, y compris des fiches d’appui décrivant les étapes à suivre dans différentes situations de catastrophes. Par exemple, de quelle information technique a-t-on besoin après un tremblement de terre ? Quel est l’impact probable d’une inondation ? 

Projet « Ground Truth » : Dirigé par Nick van Praag de l’organisation caritative Keystone Accountability, qui a pour objectif d’améliorer l’efficacité des organisations caritatives, le projet Ground Truth vise à combler les lacunes entre l’écoute des communautés affectées et les interventions. Il introduit une nouvelle méthodologie pour poser « les bonnes questions » et organiser le retour d’informations d’une manière concrète. Il travaille également à l’élaboration d’un indice qui permettrait d’évaluer les performances des agences d’aide humanitaire en se basant sur la perception des populations affectées.

Pour d’autres articles sur la redevabilité humanitaire, consultez notre dossier

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This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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