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Fièvre dengue : le Cambodge se tient prêt

Le Cambodge pourrait se trouver confronté à une nouvelle épidémie de fièvre dengue grave, selon les travailleurs de la santé.

« Si ce n’est pas cette année, ce sera l’année prochaine ; mais, cela viendra certainement », a averti Chang Moh Seng, éminent spécialiste de la fièvre dengue aux bureaux cambodgiens de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). « Ce n’est qu’une question de temps ».

L’année dernière, 407 personnes sont mortes de la fièvre dengue, causée par un virus transmis à l’homme par le moustique, et près de 40 000 cas ont été signalés en 2007.

« Il s’agissait de l’épidémie de dengue la plus grave que j’aie connue en près de 30 années passées à travailler dans la région », a déclaré M. Seng à IRIN. « Et le taux de mortalité observé parmi les cas déclarés au cours de l’épidémie au Cambodge était exceptionnellement élevé », a-t-il ajouté.

« L’éducation sanitaire en matière de prévention, de diagnostic et de traitement de la fièvre dengue est insuffisante, sous-financée et irrégulière », selon une étude intitulée Community and School-Based Health Education for Dengue Control in Rural Cambodia: A Process Evaluation [L’éducation sanitaire dans les communautés et en milieu scolaire pour le contrôle de la dengue dans les régions rurales du Cambodge : Evaluation des processus], parue dans le journal PLoS Neglected Tropical Disease (publié par la Public Library of Science), et réalisée en 2007 par Sokrin Khun du ministère cambodgien de la Santé et le professeur Lenore Manderson de l’université Monash, en Australie.

Selon les spécialistes de l’OMS, il est temps de se préparer à une nouvelle épidémie. D’après M. Seng, les autorités et les organisations humanitaires internationales devront être extrêmement vigilantes au cours des prochains mois de la saison sèche. « Nous devons minimiser [l’ampleur de] l’épidémie. [Car] il est difficile de diagnostiquer, de traiter et de contrôler cette maladie », a expliqué M. Seng.

Il est d’autant plus difficile de diagnostiquer la dengue que ses symptômes varient énormément : éruptions cutanées, maux de tête violents, nausées, douleurs atroces aux articulations… . La dengue, dans sa forme la plus grave, peut également causer des hémorragies internes, une hypertrophie du foie et une défaillance circulatoire.


Photo: WHO
L'Aedes aegypti, le moustique qui transmet le virus de la dengue
Quatre souches

Il existe quatre souches de fièvre dengue différentes : D1, D2, D3 et D4. Lorsqu’une nouvelle souche apparaît, il est quasi certain qu’une épidémie grave de fièvre dengue s’ensuivra. Mais à en croire les spécialistes de la santé, il est impossible de savoir à l’avance quand ni pourquoi une nouvelle souche apparaîtra.

« Aujourd’hui, nous sommes inquiets à l’idée que la prochaine épidémie puisse être de souche D1 ou D4, les deux souches du virus qui ne sont pas apparues récemment au Cambodge », a déclaré M. Seng. C’est pourquoi le suivi des nouveaux cas est essentiel. « Le virus doit faire l’objet d’une surveillance accrue », a-t-il poursuivi.

« Mais cela [la surveillance et le diagnostic] exige de gros moyens techniques et des analyses biologiques très coûteuses », a tempéré M. Seng. « Les hôpitaux des provinces n’ont tout simplement pas l’infrastructure nécessaire pour mener ce type de recherches ».

Pour les responsables cambodgiens de la santé cambodgiens, il est essentiel d’améliorer le processus de diagnostic pour que les patients soient orientés plus tôt vers les hôpitaux, ce qui permettrait de réduire le taux de mortalité. Dans cette optique, le ministère cambodgien de la Santé, avec l’aide médicale et experte des responsables thaïlandais de la santé thaïlandais et de l’OMS, forme les médecins des régions rurales à reconnaître les symptômes de la fièvre dengue.

Le tourisme et les migrations, facteurs de propagation

Pour M. Seng, l’épidémie massive de fièvre dengue de 2007 s’explique en grande partie par le fait que la souche D3 est apparue dans la région de Battanbang (nord-ouest), où se situe la ville de Siam Reap, elle-même proche du site historique d’Angkor Wat : la croissance du tourisme et l’augmentation du nombre des travailleurs migrants ont contribué à la propagation de la maladie dans l’ensemble du pays, selon l’OMS-Cambodge.

« Il n’existe pas [encore] de vaccin pour prévenir la fièvre dengue ; le meilleur moyen de lutter contre ce virus est donc de contrôler les zones de reproduction des moustiques », a souligné M. Seng.

Mais au Cambodge, ce n’est rien de moins qu’une tâche herculéenne. « Le Cambodge est le pays où les moustiques se reproduisent le plus au monde ; c’est bien pire qu’au Laos ou au Vietnam », selon M. Seng.


Photo: WHO
Un enfant souffrant de la fiève dengue dans un hôpital de Phnom Penh
Les projets anti-moustiques manquent de moyens

Les jarres d’eau sont les sites de reproduction les plus courants chez les moustiques. On trouve, dans presque tous les foyers du Cambodge, de grands réservoirs et autres jarres d’eau découverts, utilisés pour stocker l’eau, ainsi que des récipients, des pneus ou des coques de noix de coco jetés où l’eau s’accumule, et qui constituent ainsi autant de sites de reproduction parfaits pour les moustiques.

Les autorités sanitaires du Cambodge et l’OMS ont essayé de nouvelles méthodes de prévention et remporté quelques succès. Ils ont notamment testé l’usage d’insecticides chimiques contre les moustiques et les larves, mais sans risque pour l’homme, l’utilisation de différents réservoirs d’eau à couvercles, et même l’élevage, à l’intérieur des réservoirs d’eau, de petits poissons qui se nourrissent de larves de moustiques.

À long terme, ces initiatives sont prometteuses, en particulier le projet piscicole, mais il faudra patienter plusieurs années avant que les mesures de prévention ne soient assez généralisées pour être efficaces, selon M. Seng.

Le gouvernement cambodgien s’intéresse à plusieurs de ces projets, mais manque de moyens financiers pour mettre en place un plan d’action rigoureux et coordonné. « La volonté politique est là, mais pas les ressources », a déclaré à IRIN un responsable de la santé publique, qui a souhaité conserver l’anonymat.

Degré de préparation clinique

L’OMS et le ministère cambodgien de la Santé se concentrent sur la préparation clinique au cas où une nouvelle épidémie grave de fièvre dengue se déclarerait en 2008.

À l’échelle des provinces, des équipes cliniques et sanitaires mobiles sont en cours de formation ; [l’OMS et le ministère] font leur possible, avec les ressources limitées dont ils disposent, pour constituer, dans plusieurs provinces et hôpitaux de district, les réserves médicales nécessaires pour lutter contre l’épidémie.

Quand bien même, les experts internationaux de la santé craignent que leurs efforts soient aussi insuffisants que tardifs.

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This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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