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La démolition de maisons de Bédouins fait des dizaines de sans-abri

Le 25 juin, les forces de sécurité israéliennes ont détruit au moins 20 maisons dans deux villages arabes bédouins, faisant plus de 150 sans-abri.

Quelque 1 500 policiers et membres des forces spéciales ont convergé vers les deux petits villages, qui comptent à eux deux environ 1 000 habitants, membres de la famille al-Qi'an, pour procéder aux démolitions.

« Les enfants étaient à l’école et les hommes au travail. Seules les femmes étaient restées à la maison », a raconté Azam al-Qi’an, 16 ans, dont la maison a été détruite.

« Les policiers sont venus en très grand nombre. Ils ont commencé à arriver vers huit heures du matin », a rapporté Zahara, son petit-fils de trois ans dans les bras.

A leur arrivée, les policiers « ont commencé à pousser les femmes [dehors] », a-t-elle poursuivi. « Ils ne nous ont pas laissé le temps de sortir nos affaires. Ils ont tout pris et ont tout confisqué. Et puis, les bulldozers ont commencé à détruire [les maisons]. Quand on a protesté, ils nous ont traitées de putes ».

Occupation « illégale » des terres

Selon l’Administration du territoire israélien (ATI), les villageois occupent ces terres « illégalement ». L’organisme a demandé aux tribunaux de délivrer des ordonnances de démolition en 2004.

Dans les documents remis à la cour par l’ATI pour faire expulser les villageois, l’organisme accusait les villageois « d’empiètement » sur « les terres de l’Etat ». Dès lors, selon l’ATI, les villageois devaient être expulsés.

Ortal Tzabar, le porte-parole de l’ATI, a expliqué à IRIN qu’au fil des années, l’ATI avait tenté de parvenir à des arrangements avec les villageois, pour compenser leur éviction, mais que les villageois avaient rejeté tout accord.

Les villageois ont, pour leur part, déclaré qu’ils ne voulaient pas être relogés dans des zones urbaines, les villes construites par l’Etat pour les Bédouins étant en fait des bidonvilles et des ghettos, présentant des taux élevés de criminalité et de chômage – des taux se situant parmi les plus élevés du pays dans ces deux domaines.

Selon les villageois, au cours des derniers jours, certains d’entre eux ont accepté de partir en échange d’une indemnisation, mais l’ATI a détruit leurs maisons avant qu’un accord puisse être finalisé.

Les villageois ont également expliqué que l’ATI n’avait pas vraiment l’intention de les indemniser. Selon certains, l’indemnisation proposée était trop faible, les terres valant bien davantage.

Les biens emportés

« A Om Heiran, presque toutes les maisons sont aujourd’hui menacées par des ordonnances de démolition et risquent d’être détruites », a expliqué Souhad Bishara, un avocat d’Adalah – une ONG qui défend les droits civils de la minorité arabe d’Israël – qui représente certains des villageois.

Mickey Rosenthal, un porte-parole de la police israélienne, a expliqué à IRIN le 26 juin que la police se refusait à tout commentaire, ayant seulement « assuré la sécurité », et que deux officiers de police avaient été légèrement blessés au cours des démolitions.

Ali, le mari de Zahara, a renoncé à ses biens. « Ils nous ont dit qu’ils nous les rendraient 30 minutes plus tard. Mais ça fait des heures ! Je n’espère plus les récupérer », a-t-il déploré.

« Ils ont pris de l’argent, des habits, notre or, et les berceaux des enfants. Maintenant, nous n’avons plus d’électricité – ils ont pris le générateur. Et le réfrigérateur. Comment allons-nous faire pour donner du lait à nos enfants ? », s’est interrogée Fayiqa, ses enfants accrochés à sa robe.

« Ils ont même pris la farine » a raconté Ali. « Il n’y a pas de pain, juste quelques denrées qui nous ont été données. Ils ont pris le lait, et même les manuels scolaires des enfants », a-t-il poursuivi tandis que sa fille, élève de sixième, hochait la tête, en énumérant les différents livres qui lui manquaient.

Fayiqa a raconté que « lorsque les enfants sont rentrés de l’école, ils se sont mis à pleurer pour leurs maisons ».

Un statut « non reconnu »

Les deux villages, Atir et Om Heiran, sont « non reconnus ». Ils n’ont aucun statut officiel, ne figurent pas sur les cartes gouvernementales et d’aménagement du territoire, et ont droit à peu de services. Il y a environ 45 villages de ce type dans le désert du Néguev, dans le sud de l’Israël.

Les villageois apportent leur eau dans des citernes, et, n’étant reliés à aucun réseau électrique national, utilisent des générateurs pour s’assurer un approvisionnement en électricité. Presque tous les résidents ont la nationalité israélienne.

Les al-Qi'ans ont été déplacés à la suite de la guerre israélo-arabe de 1948. Après avoir perdu leurs terres agricoles au cours des hostilités, ils ont erré jusqu’à ce que l’Etat les installe, en 1956, sur la terre qu’ils habitent aujourd’hui.

« Ils nous ont virés de chez nous une fois, en 1948, et nous ont relogés de force sur ces terres. A présent, ils veulent nous en déloger de force. Nous n’avons nulle part d’autre où aller », a expliqué le cheikh Ali Abu Qi'an.

L’Etat tente à l’heure actuelle de reloger plus de 1 000 membres de la tribu Al-Qi'an dans une ville, afin de construire un nouveau village juif à Atir et à Om Heiran, comme le montrent les documents d’aménagement du territoire obtenus par Adalah.

Les organisations caritatives islamiques des villages voisins ont rapidement donné de la nourriture et des matelas, et des tentes de fortune ont été montées.

« Ce soir, nous devrons dormir à même le sol. Il fera froid. Aujourd’hui, il faisait très chaud, et des vents forts ont déplacé les sables », a expliqué le cheikh Ali, assis sous un dais.

« Demain, ils disent qu’il fera encore plus chaud. Que ferons-nous ? », se sont interrogées plusieurs femmes, leurs plus jeunes enfants dans les bras, tandis qu’une autre bourrasque retourne les sables du désert.

shg/ar/cb/nh/ads/ail


This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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