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Le gouvernement exhorte la Banque mondiale à revoir la suspension de ses prêts

Le Tchad a exhorté la Banque mondiale à reconsidérer sa décision de suspendre les décaissements en sa faveur, après la modification d'une loi inédite sur la gestion des revenus pétroliers, stipulant qu’une partie des pétrodollars doit être mise de coté pour les générations futures.

La Banque mondiale a annoncé vendredi qu’elle suspendait tous nouveaux décaissements relatifs aux projets en cours d’exécution dans plusieurs secteurs, ainsi que le versement de 124 millions de dollars américains déjà affectés au pays.

Le gouvernement tchadien s’est déclaré choqué par la décision de l’institution internationale, qui affecte un nombre important de projets de développement.

« Le gouvernement souhaite que la Banque reconsidère sa position et revienne sur cette décision qui est de nature à décrédibiliser son action au Tchad et nuire ainsi à sa réputation », a déclaré dans un communiqué Mahamat Ali Hassan, le ministre de l’Economie.

« La décision de la Banque, que les concertations en cours ne laissait nullement présager, survient dans un contexte particulier et difficile pour le Tchad et nous surprend par sa brutalité », a-t-il ajouté.

La décision de la Banque mondiale survient une semaine après que les parlementaires tchadiens aient approuvé, jeudi, la modification de la loi portant gestion des revenus pétroliers par 119 voix contre 13 et une abstention.

Mais l’organisme financier international avait prévenu qu’il considérait ce remaniement comme une « rupture matérielle » de l’accord sur la gestion de la manne pétrolière conclu en 1999, et qu’une telle décision pourrait entraîner une suspension des décaissements.

Lorsque l’exploitation du pétrole tchadien a officiellement démarré en 2003, l’accord conclu en 1999 concernant de répartition des revenus pétroliers était considéré comme un modèle de gestion par rapport aux piètres performances des autres pays africains producteurs de pétrole, où la manne des pétrodollars a surtout servi à enrichir les élites plutôt qu’à bénéficier aux populations.

Ainsi, 80 pour cent des revenus devaient être consacrés à l’éducation, la santé, les infrastructures et le développement rural, et 10 autres pour cent réservés au fonds pour les générations futures. Mais le 29 décembre, le parlement tchadien a approuvé un projet de loi permettant au gouvernement d’avoir accès à une plus grande partie des revenus.

Idriss Deby, le Président tchadien doit encore ratifier la loi, qui supprimerait le fonds pour les générations futures et permettrait au gouvernement de rediriger une partie de la somme destiné à la « réduction de la pauvreté » vers la sécurité de l’Etat, désormais promue au rang de secteur prioritaire.

Des temps difficiles pour Idriss Deby

Cette querelle surgit alors que M. Deby doit faire face à un mouvement rebelle qui prend de l’ampleur à l’est du pays, ainsi qu’à des tensions croissantes avec le Soudan voisin, accusé d’armer et de financer les soldats tchadiens dissidents.

Comptant parmi les pays les plus pauvres au monde, le Tchad a régulièrement des difficultés à payer ses fonctionnaires ; les régions de l’est et du sud du pays ont dû accueillir au moins 240 000 réfugiés du Soudan et de la République centrafricaine, deux pays voisins.

M. Hassan, le ministre de l’Economie, a déclaré que le Tchad avait « amplement expliqué » les raisons le poussant à modifier la loi concernant la gestion des revenus pétroliers.

En annonçant la suspension des décaissements, la Banque mondiale a affirmé qu’elle avait essayé de dialoguer avec le gouvernement pour tenter de trouver des solutions à ses problèmes fiscaux, sans modifier le cadre de l’accord censé aider à la réduction de la pauvreté.

« Malheureusement, au lieu d’engager le dialogue, ils ont entrepris d’altérer fondamentalement la loi qui constituait la base de notre accord originel », a déclaré Paul Wolfowitz, le directeur de la Banque mondiale, dans un communiqué.

La suspension des décaissements est l’une des actions les plus sévères que la Banque mondiale puisse prendre, mais M. Wolfowitz a souligné que les bailleurs ne claquaient pas la porte.

« Nous n’avons pas abandonné le dialogue, et nous espérons en fait pouvoir trouver un terrain d’entente qui répondra à l’inquiétude légitime du gouvernement tchadien et à notre objectif [qui est] de s’assurer que les revenus du pétrole tchadien bénéficie aux pauvres du pays ».

Le projet de développement pétrolier de 3,7 milliards américains est dirigé par le consortium Exxon-Mobil. L’oléoduc long de 1 000 kilomètres, inauguré en 2003, part des champs pétrolifères de Doba, au sud du Tchad, pour aboutir au terminal pétrolier off-shore de Kibri au Cameroun, dans l’océan Atlantique.

Des groupes de défense des droits de l’homme et de la société civile ont déclaré « jour de deuil national » le jour où le pétrole a officiellement commencé à couler, prédisant qu’une corruption massive s’ensuivrait.

En fin de semaine dans les rues de la capitale N’Djamena, les réactions concernant les derniers développements de cette histoires étaient partagées.

« C’est malheureusement une décision qui nous fera payer, nous les pauvres, l’inconséquence d’un gouvernement qui ne se souci pas de l’avenir de sa population», a déclaré Mme Nepitimbaye.

Cependant, Mahamat Nour Goudar n’est pas d’accord. « C’est [l’action de la Banque Mondiale] quand même une atteinte à la souveraineté de notre Etat ».


This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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