La Compagnie ivoirienne d’électricité (CIE) et la Société de distribution d’eau en Côte d’Ivoire (SODECI) ont indiqué cette semaine qu’à partir du 1er mai les six millions d’Ivoiriens résidant au nord de la zone de confiance devront s’acquitter de leurs factures.
Depuis la tentative avortée de coup d’état qui a déclenché une guerre civile en septembre 2002, ce pays d’Afrique de l’ouest est coupé en deux, le nord tenu par les rebelles qui ont établi leurs quartiers généraux à Bouaké et le sud sous ferme contrôle du Président Laurent Gbagbo.
Maintenant que le processus de paix a été relancé, les fournisseurs de services désirent eux aussi renouer avec une activité normale.
«On ne peut plus continuer dans une situation où une partie de la Côte d’Ivoire paie l’eau, l’électricité et l’autre partie de les paie pas. Nous nous sommes essouflés», a déclaré mardi Vléï Gaston, directeur général adjoint de la CIE à l’issue d’une rencontre avec Gbagbo. «Nous reprenons nos activités en ce qui concerne la facturation et le recouvrement».
Depuis le début des hostilités, la CIE et de la SODECI, dont le siège est à Abidjan, la capitale économique, n’ont pas été en mesure de facturer leurs clients au Nord et ont dû se résoudre à les approvisionner gratuitement.
Jules Kouadio, le directeur des ventes de CIE, estime le préjudice financier subi par les deux fournisseurs d’électricité et d’eau à plus de 40 milliards de Francs CFA (78 millions US$).
Dans un premier temps, seuls les professionnels des hôtels, restaurants et sociétés des villes de Bouaké, Korhogo et Man, devront régler leur consommation depuis le 1er janvier 2005. Aucune date n’a encore été fixée pour la facturation des particuliers.
Les chefs rebelles des Forces nouvelles ont accepté la reprise de la facturation, a indiqué le chef du service technique de la SODECI Damas Coulibaly.
«Les négociations n’ont pas été faciles. Nous avons bataillé dur», a-t-il déclaré.
À Bouaké, la seconde ville du pays, la nouvelle a reçu un accueil mitigé.
«Je ne peux pas payer de facture», a dit Ali Dembélé, un commerçant dont les affaires marchent mal depuis trois ans, à l’instar de beaucoup d’entrepreneurs du Nord où l’économie demeure chancelante.
«Actuellement, c’est la survie qui me préoccupe. Je cherche à nourrir ma famille», a-t-il ajouté. «Le commerce que je fais ne bouge pas bien. Est-ce que c’est nous qui avons demandé la crise? Que l’État ivoirien paie à la CIE et SODECI ce qu’il leur faut pour maintenir leurs services dans cette partie du pays».
D’autres résidents considèrent en revanche que le règlement des factures d’eau et d’électricité permettra d’améliorer la qualité des services.
«Si cela doit nous permettre d’éviter les coupures intempestives d’électricité et d’eau, et par ricochet éviter les maladies liées à l’eau sale, alors cette reprise est la bienvenue», a estimé Marie Esther Kinaly.
En novembre dernier lorsque les forces gouvernementales de Gbagbo ont violé l’accord de cessez-le-feu, l’alimentation en eau et en électricité a été coupée dans le nord rebelle pendant près de deux semaines.
Il y a trois semaines, l’Onu a annoncé une grave pénurie d’eau dans la ville de Korhogo aux mains des rebelles et prévenu que 150 000 personnes pourraient se voir privées d’eau potable si rien n’était fait.
Selon le bureau des affaires humanitaires de l’Onu (OCHA), les infrastructures hydrauliques de Korhogo n’ont pas été adéquatement entretenues depuis que la Côte d’Ivoire a sombré dans la guerre civile. Suite aux faibles précipitations, le réservoir qui approvisionne la ville est quasiment vide.
L’agence a précisé que les coupures d’eau étaient fréquentes, et que certains quartiers de Korhogo pouvaient passer trois jours d’affilée sans eau. Et même lorsque l’eau coulait des robinets, elle était souillée et polluée.
«L’autre problème qui empire la situation est que les gens consomment plus qu’ils ne le feraient normalement puisqu’ils n’ont pas à défrayer les coûts», a déclaré à IRIN Ibrahim Barry, agent d’aide humanitaire pour OCHA en Côte d’Ivoire.
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