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Des rapports confidentiels font état de fraudes massives pendant les élections du 24 avril

Dans des rapports confidentiels dont les contenus ont été rendus publics vendredi dernier, des diplomates occidentaux en poste à Lomé ont fait état de fraudes massives pendant les élections contestées du 24 avril et ont révélé que près d’un million d’électeurs présumés fictifs ont été inscrits sur les listes électorales, augmentant ainsi d’un tiers la population en âge de voter.

Ces accusations figurent dans quatre rapports rédigés pour le compte de la Commission européenne à Bruxelles dans la semaine qui a suivi l’élection du 24 avril. Leur contenu a été publié sur le site Internet de l’opposition togolaise, http://www.diastode.org, et amplement exposé sur Radio France Internationale.

Le jour de la parution de ces rapports, le Commissaire européen Louis Michel a indiqué dans une déclaration que la Commission européenne a enregistré les résultats de l’élection présidentielle au Togo.

«Je prends note de l’annonce des résultats officiels de l’élection présidentielle faite par la Cour constitutionnelle du Togo et de l’investiture de M. Faure Gnassingbe comme nouveau président du Togo», a déclaré M. Louis Michel.

Certaines sources diplomatiques européennes ont confirmé à IRIN l’authenticité des rapports. Ceux-ci évoquent, entre autres, les émeutes qui ont éclaté dans la capitale Lomé et en province après l’annonce par la Commission électorale nationale indépendante (CENI) des résultats partiels donnant Faure Gnassingbe vainqueur des élections et nouveau président du Togo après le décès de son père qui a dirigé ce petit pays d’Afrique de l’ouest pendant près de 40 ans.

Le rapport daté du 27 avril et rédigé à Lomé indique que la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’ouest a dépêché 150 observateurs pour la supervision du scrutin présidentiel. Toutefois, il note que ces observateurs “n’ont été déployés qu’au dernier moment, le samedi 23 avril, et n’ont eu pour mission que d’observer le scrutin proprement dit sans inclure les opérations de dépouillement”.

“L’observation de la CEDEAO n’a pas porté sur deux étapes principales qui sont la révision des listes électorales et les opérations de dépouillement, au cours desquelles de nombreuses irrégularités ont été constatées”, indique le rapport.

“Les observations faites par le personnel des missions diplomatiques le jour du scrutin ont conduit à confirmer l’absence de fiabilité des listes électorales, à mettre à jour un système, semble-t-il, généralisé de faux bulletins pré-imprimés en faveur du candidat Faure Gnassingbe et à confirmer de nombreux cas d’enlèvement d’urnes par les militaires au moment du dépouillement”, révèle le rapport.

Il note par ailleurs que 900 000 noms d’électeurs présumés fictifs ont été ajoutés aux listes électorales nationales, ce qui a accru de 34 pour cent la population en âge de voter. Toutefois, près de la moitié de ces électeurs fictifs se trouvaient dans les régions du Togo réputées favorables au parti au pouvoir, le Rassemblement du peuple togolais (RPT) de Gnassingbe.

D’après le rapport, le taux de distribution des cartes d’électeurs dans les fiefs du RPT était exceptionnellement élevé et s’établissait entre 80 et 95 pour cent. A contrario, dans la capitale Lomé, fief de la coalition des six partis qui soutiennent la candidature de Emmanuel Bob-Akitani, le taux de distribution des cartes d’électeurs n’était que de 41 pour cent. En conséquence, le taux de participation dans les bastions du RPT était deux fois supérieurs à celui de Lomé.

Selon le rapport du 28 avril, les autorités togolaises envisageaient de s’introduire par force dans l’ambassade d’Allemagne où s’était réfugié l’ancien ministre de l’intérieur François Akila Boko.

Les rapports ont également fait état de nombreux cas d’intimidation et de répressions par les forces de sécurité et certains membres du RPT.

Sur le plan diplomatique, ces rapports indiquent que Bruxelles et les Etats-Unis, contrairement à la France, estiment que le processus électoral s’est déroulé dans des conditions très peu transparentes.

“Les Etats-Unis comme la Commission européenne, contrairement à la France, estiment que les élections du 24 avril et la victoire de Faure Gnassingbe se sont tenues dans des conditions contestables fort éloignées du chemin de la réconciliation qu’à ce stade de la situation au Togo est loin d’être stabilisée”, indique le rapport du 28 avril

Contacté par IRIN, un porte-parole de la Commission européenne à Bruxelles n’a fait aucun commentaire sur l’origine des fuites. Mais dans un communiqué de presse publié le vendredi dernier, Louis Michel, le Commissaire européen en charge du Développement et de l’Aide humanitaire, a exhorté le nouveau président élu à prendre des mesures qui aillent dans le sens de l’“ouverture et du dialogue.”

“Il est essentiel que le Togo entre maintenant dans la voie de la réconciliation nationale, seule à même de ramener le calme et la sérénité dans ce pays”, a-t-il indiqué.

De sources diplomatiques, les affrontements qui ont eu lieu entre les militants de l’opposition et les forces de sécurité après l’annonce des résultats provisoires ont fait plus de 100 victimes.

Selon l’opposition -- qui espérait un changement de régime après les 38 années de pouvoir de Gnassingbe Eyadema, le père de Gnassingbe – le scrutin a été entaché de nombreuses irrégularités et la communauté internationale n’a été en mesure de garantir des élections justes et libres.

Tout en reconnaissant que quelques irrégularités ont été commises, la France et la CEDEAO ont indiqué que le scrutin a globalement été satisfaisant.

Cette appréciation contraste avec le ton ferme adopté par le Département américain qui considère que “la légitimité des élections présidentielles du Togo n’a pas répondu aux aspirations du peuple togolais et aux attentes des partenaires du Togo au sein de la communauté internationale”.

Dans sa déclaration de vendredi dernier, Michel a également indiqué que la Communauté européenne sera très vigilante en qui concerne les engagements pris en 2004 par le Togo en matière de respect des droits de l’homme et des libertés publiques.

La Commission européenne qui avait établi 22 engagements pour promouvoir la démocratie et les droits civils en avril 2004, peut faire jouer le levier financier pour exercer une pression sur les autorités togolaises. L’Union européenne avait suspendu son aide financière au Togo en 1993 en raison du "déficit démocratique" constaté dans cette ancienne colonie française.

This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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