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Polémique autour du nombre de victimes de l'intervention de l'armée française

Vingt personnes parmi les manifestants pro-Gbagbo ont été tuées par l’armée française au cours des derniers événements survenus à Abidjan le mois dernier, selon un premier bilan des autorités françaises.

Cette révélation faite mardi par le ministre français de la Défense a soulevé de vives inquiétudes sur un éventuel usage excessif de la force pour venir à bout des violentes manifestations anti-françaises qui ont secoué durant quatre jours la capitale économique.

C’est pour faire la lumière sur les conditions de l’intervention française que la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme (FIDH) a demandé au parlement français d’ouvrir immédiatement une commission d’enquête sur la répression des manifestations, demande appuyée par les partis socialiste et communiste français.

La FIDH a également demandé que soit conduite une autre enquête sur le prétendu rôle que les autorités ivoiriennes auraient pu jouer dans l’organisation de ces violentes émeutes. "La xénophobie manifestée par les jeunes patriotes (militants pro-Gbagbo) avec la complicité, voire à l’instigation, des autorités ivoiriennes, n’a pu qu’exacerber ces manifestations de haine," a déclaré la FIDH.

Corinne Dufka, spécialiste de la Côte d’Ivoire à l’ONG américaine Human Rights Watch, a confié à IRIN qu’elle était très préoccupée par l’usage excessif de la force dont aurait fait preuve l’armée française au cours de ces manifestations, mais qu’elle n’avait encore pu s’entretenir directement avec des témoins de ces événements.

Les affrontements ont eu lieu entre le 6 et 9 novembre près de l’aéroport d’Abidjan et de l’Hôtel Ivoire, un luxueux hôtel situé à 200 mètres de la résidence officielle du président Gbagbo.

L’hôtel avait été occupé par les troupes françaises pendant l’évacuation des quelque 9 000 étrangers – principalement des ressortissants français – qui ont décidé de quitter le pays après la reprise des combats dans le nord du pays occupé par les forces rebelles.

Mais pour de nombreux Ivoiriens, la manœuvre de l’armée française visait seulement à piéger et à isoler le président Gbagbo afin de faciliter un coup d’Etat militaire.

Défendant la décision de l’armée française d’ouvrir le feu sur la foule des manifestants, la ministre française de la Défense, Michèle Alliot-Marie, a déclaré à la presse mercredi que de nombreux militants pro-Gbagbo présents dans la foule étaient armés et ont tiré sur militaires français.

"Nous avons quand même un très grand nombre de blessés qui montre qu’ils (les militaires français) n’avaient pas en face d’eux des civils désarmés, mais qu’ils avaient soit des militaires ivoiriens, soit des populations de jeunes patriotes et autres qui étaient armés de kalachnikovs, de fusils à pompe et de pistolets," a t-elle dit à la presse

Selon le porte-parole du ministère de la Défense, les quelque 80 militaires français blessés au cours des affrontements ont été rapatriés en france.

Les émeutes ont éclaté à Abidjan après que les troupes françaises de maintien de la paix en Cote d’ivoire aient détruit au sol deux avions de combat et cinq hélicoptères d’attaque de l’armée ivoirienne, interrompant ainsi la campagne de bombardement sur les positions des forces rebelles dans le nord de la Cote d’Ivoire.

Cette intervention rapide des forces françaises fait suite à la mort de neuf militaires français lors du bombardement de Bouaké, le fief des forces rebelles.

Peu de temps avant que Canal Plus ne diffuse un documentaire sur les affrontements entre les manifestants ivoiriens et les forces françaises, la France a fait un premier bilan des victimes, côté ivoirien, des trois jours d’émeutes.

Les images diffusées montraient des hélicoptères français ouvrant le feu sur des manifestants anti-français pour tenter de les déloger des deux principaux ponts qui enjambent la lagune d’Abidjan.

"Tirer ainsi sur des populations civiles ne disposant pas d’armes à feu dépasse très largement les nécessités de maintien de l’ordre ainsi que le mandat confié aux forces armées françaises. On ne saurait passer sous silence ces faits et encore moins les minimiser," a fait savoir la FIDH.

Selon le gouvernement ivoirien, les forces françaises ont tué 57 personnes à Abidjan et en ont blessé plus de 2 200.

Le Comité international de la croix rouge (CICR) indique avoir soigné prés de 3 000 personnes dans la ville pendant les sept jours de troubles à Abidjan.

La polémique sur l’usage excessif de la force par la France dans son ancienne colonie intervient quelques jours avant le retour en Côte d’Ivoire du président sud-africain Thabo Mbeki.

Mandaté par l’Union Africaine (UA), Thabo Mbeki tentera de persuader le président Gbagbo et les forces rebelles de reprendre les pourparlers de paix sur la base des accords de paix de Linas Marcoussis signés en janvier 2003.

Mbeki est attendu aujourd’hui à Abidjan et doit rencontrer Gbagbo, le premier ministre Seydou Diarra et les responsables de l’opposition parlementaire, avant de s’envoler pour Bouaké pour s’entretenir avec le chef de la rébellion Guillaume Soro.

Le Conseil de sécurité des Nations Unies avait décrété un embargo sur les ventes d’armes à la Côte d’Ivoire après que Gbagbo ait rompu unilatéralement le cessez-le-feu en vigueur depuis 18 mois. D’autres sanctions pourraient suivre d’ici le 15 décembre, si les parties au conflit continuaient d’entraver le bon déroulement du processus de paix.

Le président Mbeki, un nouvel acteur de la mission internationale chargée de résoudre le conflit ivoirien, ne dispose donc pas de beaucoup de temps pour ramener les deux parties à la table des négociations.

Le 10 décembre, soit cinq jours avant l’expiration de l’ultimatum de l’ONU, le conseil de paix et de sécurité de l’UA se réunira à Addis-Abeba, en Ethiopie, pour débattre de l’évolution de la situation en Côte d’Ivoire.

Cette réunion sera présidée par le premier ministre éthiopien Meles Zenawi qui assume actuellement la présidence tournante du comité de 15 membres de l’UA.



This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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