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Dossier d'IRIN sur les départs et les arrivées des réfugiés

[Cet article ne reflète pas nécessairement le point de vue des Nations Unies]

Conakry, 17 mai (IRIN) - Le groupe de réfugiés écoutaient attentivement un responsable de l'ONU en visite qui saluait leur résistance. Ils ont acquiesé de la tête lorsque Kinsgley Amaning, le Coordinateur humanitaire de l'ONU en Guinée, les a invités à réfléchir sur leurs expériences afin d'aider à orienter leur pays dans la bonne direction après leur retour chez eux.

Son message 'dites non à la violence' a semblé faire vibrer une corde chez plus de 200 réfugiés sierra léonais présents à la réunion dans le camp de Telikoro, à Albadaria, dans le sud de la Guinée.

C'est alors qu'un réfugié, d'âge moyen et portant des lunettes noires s'est mis debout. Un travailleur humanitaire a indiqué plus tard qu'il était aveugle. « Vous avez parlé au nom des Sierra Léonais. Nous sommes encore en guerre. Quel est notre destin ? a demandé l'homme, que quelqu'un a identifié comme Pa Camara. « Certains parmi nous ont peur », a-t-il poursuivi. « Nous ne retournerons pas. En 1997, quand il y avait les élections au Liberia, beaucoup de personnes sont parties. Vous avez vu ce qui s'est passé. Donc, au moment ou nous faisons nos adieux à nos frères Sierra Léonais, il faut réfléchir à ce qu'on peut faire pour les Libériens ».

M. Amaning a assuré les réfugiés inquiets que les Nations Unies n'avaient pas oublié les Libériens. « Je sais que si nous ne résolvons pas le problème au Liberia, nous risquons de ne pas avoir la paix pendant longtemps dans la région », a-t-il souligné.

Au moment même où il parlait, chaque fois plus de Libériens continuaient à fuir leur pays, pour s'ajouter aux 6 000 personnes qui ont déjà trouvé refuge en Guinée entre janvier et avril. La frontière entre la Guinée et le Liberia est officiellement fermée, mais les autorités guinéennes autorisent actuellement les réfugiés à entrer à certains endroits. Les officiels du HCR dans le sud de la Guinée ont indiqué qu'entre 300 et 500 Libériens arrivent chaque semaine dans des camps de la région de Nzérékore, à la frontière avec le Liberia.

Le gros des Libériens hébergés dans des camps, soit plus de 26 000, se trouve dans deux camps à Nzérékore. Des milliers d'autres Libériens seraient entrain de vivre dans des villages de la région.

Les combats autour de la localité libérienne de Gbarnga, à 224 km au nord de la capitale, Monrovia, au cours de la deuxième semaine de mai, ont accéléré l'exode. Des sources humanitaires ont affirmé que quelque 4 300 Libériens sont entrés en Guinée en 72 heures cette semaine. Ceux-ci incluent près de 3 500 qui, selon le HCR, ont franchi la frontière dans la seule journée du 13 mai.

Les nouveaux arrivants à Macenta, près de la frontière avec le Liberia, ont expliqué qu'ils ont voyagé pendant des semaines depuis Lofa, au nord du Liberia. Une femme a affirmé que les rebelles ont battu son mari jusqu'à ce qu'il perde la raison, après qu'il ait refusé de se joindre à eux. D'autres femmes ont déclaré que leurs maris ont été enlevés par des hommes armés, mais qu'elles ne savaient pas bien à quel côté ils appartiennent. Le groupe des nouveaux arrivants inclus un certain nombre de femmes enceintes et des enfants en bas âge. Beaucoup paraissaient fatigués et épuisés, et plusieurs ont des maladies de la peau.

Les guerres rebelles qui ont éclaté au Liberia, à la fin de 1989, et en Sierra Leone, en 1991, ont obligé des centaines de milliers de ressortissants à fuir en Guinée. La fin de la guerre en Sierra Leone a officiellement été déclarée en janvier 2001, ce qui a permis au HCR d'organiser des convois pour rapatrier les réfugiés qui souhaitent retourner dans leur pays.

Environ 13 000 Sierra Léonais sont retournés chez eux entre octobre 2001 et mai 2002. Les rapatriements ont été interrompus le 4 mai, à l'occasion des élections pésidentielles et parlementaires du 14 mai. Le représentant du HCR en Guinée, David Kapya, a indiqué que s'il n'y a pas de troubles après les élections, les rapatriements volontaires pourraient reprendre le 21 mai.

Près de 500 Sierra Léonais en route pour leur pays ont quitté le centre de transit de Mambiya, situé à 90 km environ de la capitale guinéenne, Conakry, dans le dernier convoi avant les élections. Un jeune s'est réjoui de partir chez lui dans le district minier de Kono, à l'est du pays, qu'il avait fui en 1998. A-t-il des craintes ? 'Non', a-t-il répondu sans hésitation. "Di war done finish" (la guerre est finie). Une jeune femme a expliqué qu'elle avait décidé de rentrer car elle a reçu un message de sa mère, retournée à Kono, qui lui demandait de revenir. Le message a été porté par un voyageur de Kono au camp de réfugiés où elle était hébergée près de Kountaya, à environ 690 km de Conakry. Elle aussi est impatiente de retourner, a-t-elle affirmé. « C'est chez moi ».

D’autres Sierra Léonais préfèrent néanmoins attendre et voir comment évolue la situation dans leur pays avant de décider quand ils retourneront chez eux. “ Je suis très impatient de retourner chez moi”, a confié à IRIN Bachir M. Boye, alors que le convoi s’apprêtait à quitter Mambiya. “ J’attends juste les élections”.

M. Boye avait travaillé comme technicien de l’assainissement et de l’eau pour le compte de plusieurs ONG en Guinée et, à l’ instar de nombreux réfugiés, il a étroitement suivi les événements dans son pays. “Je ne pense pas que les gens aient totalement désarmés”, a-t-il déclaré. “S’il n’y a pas de problème et que les élections se déroulent paisiblement, s’il n’y a pas de fraude, je pense qu’il y aura la paix et un désarmement total”. Dans ce cas, a-t-il ajouté, il retournera en Sierra Leone.

Sa prudence était partagée par des veilleurs de la Sierra Leone en Guinée. Tout dépendra, ont-ils observé, de la façon dont les élections vons se dérouler, de leurs résultats et des réactions aux résultats. Un autre facteur clé, ont-ils noté, est que de nombreux membres de l’ex-RUF qui auraient rejoint les foces luttant à la fois pour et contre le président Charles Taylor au Liberia, ainsi que les “Kamajors qui n’ont rien à manger et se sont joints au LURD”, comme l’a déclaré une source.

Les Kamajors sont une milice pro-gouvernementale en Sierra Leone. Les Libériens unis pour la réconciliation et la démocratie (LURD) est un groupe qui s’arroge la responsabilité de la guerre de rébellion contre M. Taylor.

D’autres membres de la communauté humanitaire sont préoccuppés pour l’avenir des rapatriés. Les deux mois de rations alimentaires que chaque rapatrié reçoit, ainsi que les produits non alimentaires, ne sont pas suffisants, a affirmé Ramine Rafirasme, chargé de l’information du public auprès du Programme alimentaire mondial (PAM). Ils ont besoin de soutien jusqu’à la prochaine saison agricole afin de devenir autosuffisants, a-t-il poursuivi. L’inquiétude du PAM, a-t-il indiqué, est que si on ne fournit pas assez de ressources pour nourrir les rapatriés, “tout sera perdu”.

A une étape ultérieure, le HCR projette de promouvoir et d’organiser davantage de rapatriements. Si tout évolue selon les prévisions, quelque 40 000 personnes seront retournées d’ici la fin de l’année, et il en restera environ 17 000, a annoncé M. Kapya à IRIN. Les rapatriements, a-t-il préconisé, continueront jusqu’au milieu de 2003.

Les Libériens risquent d’attendre plus longtemps car la guerre dans leur pays a connu une escalade.

La première guerre civile du Liberia a pris fin en 1997 à l'issue d'un accord de paix qui a préparé la voie pour les élections la même année. Nonobstant, la guerre a éclaté à nouveau dans le nord-ouest du pays entre les troupes gouvernementales et des opposants au président Charles Taylor.

Pendant longtemps, les hostilités étaient confinées au comté de Lofa, dans le nord-ouest du Liberia. Elles se sont ensuite étendues à Gbarpolu, un nouveau comté lové dans ce qui était le bas Lofa et, depuis la semaine dernière, au comté de Bong, à l'est de Lofa. Cette année, plus de 27 000 réfugiés libériens ont cherché refuge en Sierra Leone, en Guinée, au Ghana et en Côte d'Ivoire, d'après le HCR.

Comme la situation est toujours précaire au Liberia, le HCR n'envisage même pas de faciliter le retour des réfugiés libériens qui veulent retourner », a souligné M. Kapya. En fait, le HCR se prépare à une nouvelle affluence.

Les deux camps pour les réfugiés libériens à Kouankan et Kola, dans la région de Nzérékore, sont au maximum de leur capacité. Le HCR s'apprête à ouvrir à Laine, à environ 76 km de la frontière libérienne, un nouveau camp d'une capacité de 9 000 personnes environ.


This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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