« La crise pastorale est sur le point de prendre fin... et le prix des animaux repart à la hausse, mais les communautés non pastorales qui dépendent d’une bonne récolte ne voient pas encore le bout du tunnel. Nous sommes toujours au pic de la crise, et les activités d’urgence doivent être maintenues », a dit Philippe Conraud, coordonnateur de l’aide humanitaire pour Oxfam en Afrique de l’Ouest.
Selon Action contre la Faim (ACF) les précipitations étaient faibles en juin, mais elles se sont intensifiées à la mi-juillet et au mois d’août dans une grande partie du nord du pays, et se sont poursuivies au mois de septembre.
La pratique des mouvements saisonniers du bétail a également repris dans la majeure partie du nord du pays. Selon le dernier rapport FEWS NET de l’Agence américaine pour le développement international, les 258 000 personnes en situation d’insécurité alimentaire vont pouvoir satisfaire la plupart de leurs besoins alimentaires au cours des prochains mois, mais pourraient connaitre une insécurité alimentaire modérée jusqu’à la fin de l’année.
Le cours des céréales a atteint la moyenne de cinq ans, et le prix des chèvres et des moutons augmente et s’établit au niveau des prix d’avant la crise – jusqu’à 50 dollars au lieu de 10 dollars par tête au plus fort de la crise pastorale, selon les estimations de Marc Chapon, coordonnateur national des projets de l’organisation non gouvernementale (ONG) Agronomes et Vétérinaires sans Frontières (AVSF).
Cependant, les communautés agricoles sédentaires de la région de Gao connaissent toujours une situation d’extrême tension tandis que la période de soudure avant les prochaines récoltes perdure. Ils n’ont pas la possibilité de partir pour des zones plus fertiles, et doivent attendre les récoltes afin de rembourser leurs dettes. Les difficultés successives, notamment la crise des prix alimentaires de 2008 et les sécheresses répétées, ont conduit à un fort endettement des ménages, ont dit David Kerespars, chef de mission d’ACF au Mali, et M. Conraud d’Oxfam.
ACF estime que 40 pour cent des ménages d’Ansongo, une ville située sur les berges du fleuve Niger, dans la région de Gao, sont endettés et n’ont pas les moyens de rembourser leurs créanciers. Sans aide, prédit M. Conraud, « la situation pourrait encore empirer à moyen et à long terme ».
À Ansongo, le taux de malnutrition aigüe globale chez les enfants de moins de cinq ans atteint 18,5 pour cent, selon la dernière estimation de l’ACF réalisée en juin, contre 15,9 pour cent à la même époque en 2009.
Avec le soutien de la Grande-Bretagne, ACF gère des centres d’alimentation thérapeutique au sein de 17 centres sanitaires régionaux, et mène des opérations de sécurité alimentaire plus importantes pour tous les enfants de moins de cinq ans afin qu’ils ne souffrent pas de malnutrition. Les cas de malnutrition aigüe accompagnés de complications sont soignés dans les centres sanitaires régionaux.
Photo: ReliefWeb |
Carte du Mali |
Vulnérabilité différente
Selon les organisations humanitaires, la vulnérabilité des différents groupes de subsistance du nord du pays varie fortement.
Les études menées dans des zones des régions de Kidal et de Tombouctou montrent que la malnutrition aigüe globale ne dépasse pas les 10 pour cent, a estimé Katrien Ghoos, responsable de la nutrition auprès de l’UNICEF, bien que les résultats de la récente évaluation de la malnutrition par l’UNICEF doivent encore être vérifiés ou publiés.
Alors que les éleveurs sont également très vulnérables en situation de crise, car « ils n’ont rien d’autre que du lait et des animaux », et que la malnutrition aigüe dont ils souffrent tend à s’aggraver en période de crise, leurs perspectives peuvent varier de manière significative lorsque les pâturages s’améliorent, car les animaux se remettent rapidement à produire du lait.
Les populations agro-pastorales semi-sédentaires qui s’installent pour plusieurs mois sur les berges du fleuve Niger sont un peu moins touchées par les crises, a indiqué M. Kerespars, d’ACF. « Elles sont plus à même de faire face aux crises, comme les sécheresses, parce qu’elles peuvent se déplacer, trouver de petits emplois, travailler dans l’artisanat ou emprunter de l’argent », a-t-il dit.
Mais dans la région de Gao, les plus pauvres de ces communautés ont épuisé leurs stratégies d’adaptation et ont de la difficulté à se tourner vers la construction à court terme ou le travail dans les champs, qui peut augmenter leurs revenus de plus de 50 pour cent, étant donné qu’un tiers de ces emplois a disparu cette année, selon FEWS NET.
Relèvement rapide
Les efforts de relèvement rapide doivent être entrepris aussi vite que possible afin d’aider les populations à retrouver les moyens de subsistance qui étaient les leurs avant la crise, dit M. Conraud.
Oxfam espère pouvoir mettre en œuvre un service de transfert d’argent afin d’aider les ménages à rembourser leurs dettes et ainsi leur éviter de vendre leurs céréales à des prix défiant toute concurrence. L’ONG et les autres organisations humanitaires rencontrent des donateurs afin de les encourager à soutenir ces efforts de relèvement à moyen terme.
Selon les représentants des organisations humanitaires, le rétablissement des communautés du nord est primordial, car elles risquent d’être confrontées à davantage de problèmes à l’avenir. Les problèmes qui touchent le nord du Mali – notamment la sécheresse, les tensions persistantes concernant les routes pastorales, la croissance continuelle de la population et l’insécurité actuelle – ne risquent pas de disparaître, a mis en garde Alice Martin-Dahirou, la représentante du PAM au Mali.
aj/cb/gd/ail
This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions