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L'aide humanitaire à la poursuite des éleveurs

Dead cow in Diffa region, Niger, July 2010 Catherine-Lune Grayson/IRIN
L’est du Niger, peu peuplé et aride, est jonché par endroits de carcasses putrides de vaches : les éleveurs ont fait de grandes distances pour trouver la nourriture et l’eau dont avaient besoin leurs animaux, mais ils ont dû finalement se résoudre à regarder mourir leurs biens les plus précieux.

Deux années de pluies très irrégulières ont provoqué de sévères pénuries de fourrage, de céréales et d’eau. En 2009, seulement un tiers de la quantité de foin nécessaire a pu être produite, ce qui veut dire qu’il n’y avait pas assez de fourrage, selon une enquête nationale sur la sécurité alimentaire des ménages menée par le Système d’alerte précoce du Niger.

Dans la région de Diffa, plus d’un tiers du bétail pourrait à ce jour avoir péri, a dit le directeur du développement pastoral du ministère de l’Élevage et des Industries animales, Haido Abdul Malik. Cette réalité est particulièrement tragique dans une région où, selon les autorités, 90 pour cent de la population dépendent de l’élevage pour leur survie.

Les éleveurs qui ont déjà été confrontés à des sécheresses récurrentes disent qu’ils n’ont jamais rien vu d’aussi terrible, pas même lors de la sécheresse prolongée de 1968-1974 qui tua un tiers de tout le cheptel.

« Ceci est bien pire que tout ce que nous avons connu. C’est tout le Niger qui a faim », a dit l’éleveur Amadou Aouta. Selon les Nations Unies, la moitié de la population du pays est affectée par l’insécurité alimentaire.

« J’avais assez de vaches, de chèvres et de moutons pour subvenir aux besoins de ma famille. Maintenant, je n’ai plus rien et je vais devoir compter sur mes deux enfants », a dit un homme de 70 ans qui a perdu tout son bétail. Il espère que ses enfants pourront trouver du travail non qualifié.

Pour la première fois depuis le début de la crise, M. Aouta et 63 autres familles nomades de Yoberou reçoivent de l’aide alimentaire. Un groupe de femmes qui attendent leur ration de 100 kg de céréales fournies par l’ONG CARE, a dit que le plus dur était maintenant la faim. « Il ne nous reste plus rien pour acheter des céréales », a dit l’une d’elles. 

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Quelque 60 tonnes de nourriture vont être distribuées aux éleveurs nomades qui n’ont quasiment reçu aucun soutien jusqu’à présent.

Une opération inhabituelle

L’opération est inhabituelle : les autorités, CARE et l’Association pour la redynamisation de l’élevage au Niger (AREN) se sont rendues dans les coins les plus reculés avec des camions de nourriture, à la recherche de familles vulnérables. « Nous cherchons à atteindre des endroits où il n’y a pas de villages. Nous ciblons principalement des gens qui se déplacent », a dit Amadou Adamou, le responsable de la caravane de CARE.

L’opération a été lancée, après la visite des organisations humanitaires et des autorités dans la région en juillet. A leur retour, celles-ci ont dit qu’il était probablement trop tard pour sauver le bétail, mais qu’il était encore temps de sauver les personnes.

Ils avaient espéré pouvoir amener du fourrage pour les animaux, une équipe médicale et de l’argent pour acheter le bétail affaibli à un prix supérieur au prix courant sur le marché, « mais tous nos partenaires n’étaient pas disposés à changer leurs méthodes rapidement », a dit le responsable du Bureau des Nations unies pour la Coordination des Affaires Humanitaires (OCHA) à Diffa, Sylvain Musafiri.

Porter secours à des communautés nomades est un véritable défi. « Elles sont éloignées des centres urbains ; cela coûte cher de faire parvenir l’aide humanitaire dans les régions isolées et il est difficile d’atteindre des gens qui se déplacent constamment », a dit le coordinateur régional de CARE, Ali Salé. « C’est une population qui n’est pas incluse dans les recensements locaux. Nous avons l’habitude d’organiser des distributions dans des villages, mais pas dans des camps provisoires ».

Le déplacement constant fait qu’il est difficile pour les enfants nomades souffrant de malnutrition de recevoir un traitement régulier sur plusieurs semaines. « Ils partent quand ils ont besoin de trouver des pâturages. Ils s’en vont généralement avant d’avoir terminé le traitement, une fois leur état de santé amélioré », a dit Abdulaziz Kimba Garba du centre médical de Bilabrim, près de la frontière du Tchad.

Selon une étude de Save the Children UK sur l’économie des ménages, les enfants d’éleveurs sont traditionnellement moins touchés par la malnutrition, car ils ont accès à du lait. Cela pourrait ne pas être le cas cette année. « Le bétail mourant ne peut pas produire de lait. Quand il n’y a pas de lait, les enfants nomades n’ont pas grand chose à manger », a dit le coordinateur régional de l’AREN, Hassan Ardo Ido. 

Nomadic women and their children at a settlement in the vicinity of Diffa, Niger. July 2010
Photo: Catherine-Lune Grayson/IRIN
Femmes nomades et leurs enfants dans un camp dans les environs de Diffa
Le petit centre médical de Bilibrim a reçu plusieurs enfants nomades malnutris depuis avril. Avec plus de 22 pour cent de ses enfants souffrant de malnutrition aiguë, Diffa a le taux de malnutrition le plus élevé du pays, selon une étude gouvernementale de juillet.

Une réponse tardive

Il aurait fallu faire davantage, et plus tôt, mais « les gens ne réagissent que quand ils commencent à voir des animaux morts », a dit M. Musafiri d’OCHA.

En avril, l’AREN avait suggéré que, pour limiter les pertes, du fourrage soit disposé le long des couloirs utilisés par les éleveurs, « mais on n’a pas fait grand chose », a dit M. Ardo Ido de l’AREN.

La crise avait été prévue dès la fin de 2009, mais il était difficile de demander de l’aide, en raison de la situation politique, a dit M. Abdul Malik, du ministère de l’Elevage. « Même après le coup d’Etat [de février 2010], les donateurs voulaient connaître les intentions des nouvelles autorités et les autorités ont dû demander de l’aide officiellement. Il nous a fallu attendre avril ou mai pour l’arrivée de l’aide. Il était déjà [trop] tard ».

« Cette année nous a montré que nous pouvions tout perdre », a dit le chef de Nguelbeyli (2 000 habitants), Lamido Moumouni Kabori.

Selon lui, les animaux affaiblis pourraient se remettre en un mois, mais les familles qui ont perdu la plus grande partie de leur bétail se trouvent très démunies, car une reproduction normale ne permettra pas de reconstituer les troupeaux. « Les gens se demandent ce que leur réserve l’avenir. Nous ne pouvons plus compter sur l’élevage du bétail ».

clg/cb/og/ail

This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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