1. Accueil
  2. Global

Un guide humanitaire pour Copenhague

Floods cause many human casualties and extensive property losses Mohammad Reja/IRIN
A la Conférence des Nations Unies sur le changement climatique à Copenhague (COP15), la communauté humanitaire suivra de près non seulement les conversations sur « qui réduira de combien les émissions [de gaz à effet de serre] », mais aussi les discussions sur les questions qui affectent déjà les populations.

L’objectif de la rencontre, qui se déroulera sur deux semaines, du 7 décembre au 18 décembre 2009, est de parvenir à un accord sur la réduction des émissions nocives.

Des agences des Nations Unies, telles que le Bureau pour la coordination des affaires humanitaires (OCHA), ont dit que l’impact des événements liés au changement climatique se faisait déjà sentir, et que la communauté humanitaire devait se concentrer sur l’après Copenhague.

Les organisations humanitaires ne prennent pas part aux négociations, mais espèrent informer – et éventuellement influencer – le processus en mettant en avant, à travers des présentations proposées en marge de la conférence, ce que vivent déjà les communautés avec lesquelles elles travaillent. Elles espèrent aussi trouver des réponses à des questions délicates, qui leur permettraient d’aider les communautés défavorisées à affronter le changement climatique.

Voici un tour d’horizon des questions auxquelles la communauté humanitaire sera attentive à Copenhague :

Le financement de l’adaptation

* Quels seront les fonds disponibles pour aider les communautés à s’adapter à un climat de plus en plus instable ?

La question qui figure en première position sur toutes les listes concerne le financement de l’adaptation, qui contribuera à rendre les communautés plus résilientes ; et différentes estimations du coût de l’adaptation au changement climatique ont été proposées au cours de ces dernières années. La Banque mondiale, dont l’autorité est reconnue en la matière, a récemment annoncé que ce coût serait compris entre 75 millions et 100 millions de dollars par an entre 2010 et 2050, et on s’attend à ce que ces statistiques fassent l’objet de discussions à Copenhague.

Ilana Solomon, conseillère pour les politiques à l’agence humanitaire ActionAid USA, a dit qu’elle pensait que les prévisions de la Banque mondiale étaient une « sous-estimation », car elles ne prenaient pas en compte les stratégies d’adaptation mises en place au niveau communautaire. 

« Les organisations humanitaires ne sont pas parties aux négociations, mais espèrent informer – et éventuellement influencer – le processus »
Diarmid Campbell-Lendrum, scientifique à l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a rappelé qu’il ne fallait pas oublier le financement des services tels que l’agriculture, l’approvisionnement en eau, les installations sanitaires et les systèmes d’alerte précoce en cas de maladie, qui permettent non seulement de protéger et de sauver des vies, mais aussi de réduire la vulnérabilité future au changement climatique.

Les agences humanitaires espèrent qu’une approche multi-sectorielle sera adoptée ; le texte sur l’adaptation proposé à ce jour est large, appelant à réduire autant que possible ce qui menace « la vie, la santé humaine, les moyens de subsistance, la sécurité alimentaire, les biens, les infrastructures, les écosystèmes et le développement durable ».

Le Fonds pour l'environnement mondial (FEM) – le mécanisme financier de la Convention cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) – gère deux fonds spéciaux : le Fonds pour les pays les moins avancés, et le Fonds spécial pour les changements climatiques, qui accordent tous deux des financements à des projets d’adaptation.

Le FEM sera également chargé de la gestion du nouveau Fonds pour l'adaptation, qui recevra l’argent collecté grâce à une taxe d’environ deux pour cent sur les crédits générés par le mécanisme de développement propre (MDP), élaboré dans le cadre du Protocole de Kyoto.

Ce mécanisme permet aux pays industrialisés de gagner et d’échanger des crédits d’émissions en mettant en place des projets dans les pays développés ou en voie de développement, puis d’utiliser ces crédits pour atteindre leurs objectifs d’émissions de gaz à effet de serre.

Mais les sommes qui devrait être collectées grâce à ce mécanisme ne seront pas suffisantes, et c’est pourquoi les pays examinent d’autres solutions possibles. « Il existe diverses propositions concernant la façon dont les fonds pourraient être levés, mais peu de promesses de financement ont été faites à ce jour », a dit Mike Shanahan, de l’Institut international de l’environnement et du développement (IIED), basé au Royaume-Uni.

Il a cité la proposition du Mexique, qui suggère de créer un Fonds vert, auquel tous les pays, excepté les pays les moins avancés (PMA), contribueraient en fonction de leur produit intérieur brut (PIB), de leurs émissions et de leur population. Les PMA ont proposé une taxe internationale de l’adaptation prélevée sur les billets d’avion, qui permettrait de collecter 10 à 15 millions de dollars par an pour l’adaptation.

Mécanismes financiers

Le changement climatique – Questions/Réponses

 

Les conséquences du changement climatique

 

Le changement climatique – Comment ça marche ?

 

Ce qui est fait dans la lutte contre les changements climatiques

* Comment les fonds seront-ils transmis aux communautés ou pays affectés ?

Balgis Elasha, un des auteurs d’un rapport sur l’adaptation publié par la Commission intergouvernementale sur le changement climatique (CICC), un organisme scientifique international, a dit qu’elle espérait que des engagements seraient pris concernant l’augmentation des fonds disponibles pour l’adaptation, mais qu’elle souhaitait également voir mis en place un mécanisme de financement qui permette aux pays affectés d’accéder plus facilement aux financements.

Si un mécanisme financier est approuvé, quel qu’il soit, les pays pauvres veulent qu’il soit contrôlé par la CCNUCC ; ils ont affirmé que, jusqu’à présent, le déblocage des fonds était lent et le processus de validation très complexe. D’après Mme Solomon, d’ActionAid, les pays vulnérables ont « perdu leur foi » dans la capacité du FEM à gérer la finance du changement climatique, et le débat sur le montant des financements « est directement lié à la discussion » sur « la définition de la vulnérabilité ».

Définir la vulnérabilité

* Comment définir qui sont les plus vulnérables au changement climatique ?

Trouver une échelle permettant de déterminer le degré de vulnérabilité des pays en développement face au changement climatique – ce qui pourra être utilisé pour décider comment allouer de façon équitable les fonds d’adaptation – est un objectif qui fait l’objet d’un débat animé. D’après Mme Solomon, la « rareté des ressources » disponibles pour l’adaptation a rendu urgent le besoin de définir qui était le plus vulnérable.

En réalité, un représentant du FEM avait soulevé cette question pour la première fois au cours d’une autre série de discussions sur le changement climatique qui s’était déroulée en juin 2009 à Bonn, en Allemagne, en disant que le fonds examinait la possibilité d’élaborer un indice de vulnérabilité afin de répartir les ressources équitablement.

Des experts ont dit à IRIN qu’établir un degré de vulnérabilité serait très compliqué, car plusieurs indicateurs pourraient être utilisés. Dans son Quatrième rapport d’évaluation, la CICC a dit que la vulnérabilité d’une société au changement climatique était influencée par son parcours de développement, son exposition physique, la répartition de ses ressources, les contraintes préexistantes, et ses institutions sociales et gouvernementales.

« Toutes les sociétés ont des aptitudes inhérentes à surmonter certaines variations du climat, mais les capacités d’adaptation sont inégalement réparties, à la fois entre les pays et au sein même des sociétés », a souligné le rapport de la CICC, selon lequel, fondamentalement, il faudra trouver une formule qui permette de déterminer la capacité d’un pays à s’adapter au changement climatique.

Mme Solomon, d’ActionAid, a dit que si les discussions sur la vulnérabilité se limitaient aux pays, les groupes vulnérables tels que les femmes, qui devraient constituer une cible spécifique des ressources de l’adaptation, risquaient d’être négligés.

Stephanie Long, des Amis de la Terre (AT) International, une ONG (organisation non gouvernementale) environnementale, a dit que son organisation veillerait à ce que les mécanismes de financement du climat incluent des dispositifs de défense des droits civils et d’indemnisation des communautés, qui pourront être utilisés si des projets proposés ou mis en place pour lever des fonds avaient des « impacts négatifs au plan social, environnemental ou local ».

Forêts et habitants des forêts

* Les communautés vivant dans des forêts bénéficieront-elles du REDD ?

La stratégie du REDD – Réduction des émissions causées par le déboisement et la dégradation [des forêts] – dans les pays en développement, devrait être intégrée à l’accord final.

« Dans le cadre du REDD, les pays qui réduisent la déforestation pourraient gagner des crédits de réduction d’émissions », a dit M. Shanahan, de l’IIED. « Ces crédits pourraient être vendus sur les marchés internationaux du carbone ou compensés grâce à un fonds alimenté par les pays développés, ou encore, et c’est ce qui semble le plus probable, échangés via un système combinant ces deux approches. »

La déforestation, un facteur majeur du changement climatique, est responsable de 17,4 pour cent du total mondial des émissions de gaz à effet de serre – elle a donc un impact bien plus important que celui du secteur des transports, qui génère un peu plus de 13 pour cent des émissions – d’après la CICC.

Eliminer cette source d’émissions pourrait contribuer à limiter le changement climatique, et « également présenter d’énormes avantages pour les communautés et la biodiversité, mais seulement si [les mesures sont] bien conçues », a observé M. Shanahan.

Le défi consisterait à s’assurer que l’argent serve réellement à protéger les forêts, « avec tous leurs processus écologiques naturels dont dépend l’humanité, plutôt que d’encourager l’exploitation forestière et le remplacement des forêts par des plantations, qui ne profiteront qu’aux entreprises, et qui conduiraient à des pertes massives de diversité biologique », a-t-il dit.

« Il est également essentiel de veiller à ce que cet argent profite aux communautés dépendantes des forêts, qui sont les sages gardiens de la forêt depuis des générations. Si ce n’est pas le cas, les fonds pourraient simplement remplir les poches des élites puissantes, y compris des entreprises étrangères. »

Les questions portant sur les modes de tenure des forêts pourraient constituer un sujet de première importance, ainsi que les moyens permettant de garantir que les communautés dépendant de la forêt puissent juridiquement prétendre à des avantages. Mme Long, des AT, a dit que son organisation suivait de près cette question.

« Migrants climatiques »

* Qu’en est-il des droits des personnes déplacées par des catastrophes naturelles de plus en plus fréquentes et de plus en plus intenses ?

Distribution of mosquito nets, blankets and water purification tablets to flood victims in Cotonou, Benin
Photo: Sammy Cecchin/ECHO
Les travailleurs humanitaires sont déjà confrontés à des événements climatiques plus intenses et plus fréquents
Alina Narusova, spécialiste des politiques migratoires à l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), a observé que bien que le texte de négociation fasse référence aux migrations et aux déplacements, « cela dépend de si [le sujet] est encore présent au moment où COP15 [la conférence de Copenhague] commencera. » Des organisations comme la sienne organisent des événements en marge de la rencontre, afin de veiller à ce que cette question reste une priorité.

Mme Long a dit que les AT souhaitaient que les droits des populations obligées de migrer à cause du changement climatique soit reconnus et protégés, ajoutant qu’un mécanisme de réponse au déplacement d’un grand nombre de « réfugiés [climatiques] [devait] être intégré au financement de l’adaptation ».

En 2008, les catastrophes naturelles liées au climat, telles que les sécheresses, les ouragans et les inondations, ont forcé 20 millions de personnes à quitter leurs foyers – bien plus que les 4,6 millions de personnes déplacées par les conflits – d’après une récente étude commune menée par OCHA et le Centre de suivi des déplacements internes, basé à Genève.

Agriculture

* La sécurité alimentaire et l’agriculture seront-elles prises en considération ?

L’agriculture représente la principale source de nourriture et de revenus de la moitié de la population mondiale ; il s’agit de l’activité la plus vulnérable à l’impact du changement climatique, mais aussi d’une source majeure de dangereuses émissions de gaz à effet de serre.

Environ 14 pour cent des émissions annuelles de gaz à effet de serre, principalement de dioxyde de carbone, proviennent de l’agriculture ; et environ 74 pour cent du total des émissions agricoles sont générées dans les pays en développement.

« La question est de savoir dans quelle mesure la sécurité alimentaire, l’agriculture et la lutte contre la pauvreté seront mentionnées [dans le texte final] », a dit Gerald Nelson, chercheur à l’Institut international de recherche sur les politiques alimentaires (IFPRI), un groupe de réflexion américain qui tente de défendre la cause de l’agriculture.

Le texte de négociation comporte une partie sur l’agriculture, qui appelle à développer des systèmes agricoles efficaces et productifs qui permettent non seulement de réduire les émissions, mais aussi d’adapter l’activité au changement climatique ; le texte appelle aussi l’Organe subsidiaire de conseil scientifique et technologique (SBSTA) de la CCNUCC à préparer un programme de travail pour favoriser la réalisation de ces objectifs.

M. Nelson, de l’IFPRI, a dit qu’il serait attentif à la question de savoir « si le SBSTA allait élaborer un programme de travail sur l’agriculture, et si tel était le cas, qu’est-ce ce programme comprendrait ». Il était également curieux de savoir si des récompenses financières pourraient être accordées aux agriculteurs des pays en développement pratiquant la séquestration du dioxyde de carbone dans le sol, et quels mécanismes étaient envisagés.

Santé

* Est-ce que quelqu’un se soucie de protéger la santé des populations ?

« La santé a été citée parmi les priorités » dans le texte de négociation original, « mais [c’est un sujet qui est] parfois oublié », a dit M. Campbell-Lendrum, de l’OMS.

Les pays – principalement dans le monde en développement – pourraient dépenser entre six et 18 milliards de dollars par an d’ici 2030 pour faire face aux coûts supplémentaires liés auxquels les services de santé sont confrontés du fait du changement climatique, a-t-il observé.

Ce chiffre était fondé sur une évaluation de l’OMS, qui a observé des études portant sur l’impact des maladies sensibles au climat telles que les maladies diarrhéiques – le deuxième facteur infectieux de mortalité infantile –, qui tuent environ 1,8 million de personnes chaque année.

jk/he/il/ail

This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

Partager cet article

Get the day’s top headlines in your inbox every morning

Starting at just $5 a month, you can become a member of The New Humanitarian and receive our premium newsletter, DAWNS Digest.

DAWNS Digest has been the trusted essential morning read for global aid and foreign policy professionals for more than 10 years.

Government, media, global governance organisations, NGOs, academics, and more subscribe to DAWNS to receive the day’s top global headlines of news and analysis in their inboxes every weekday morning.

It’s the perfect way to start your day.

Become a member of The New Humanitarian today and you’ll automatically be subscribed to DAWNS Digest – free of charge.

Become a member of The New Humanitarian

Support our journalism and become more involved in our community. Help us deliver informative, accessible, independent journalism that you can trust and provides accountability to the millions of people affected by crises worldwide.

Join