« Nous nous sommes réunis et avons décidé que vivre au jour le jour était déjà assez difficile sans porter en plus l’étiquette d’ancien détenu ; il fallait qu’on fasse quelque chose tout seuls, même si cela allait prendre des années avant de devenir rentable », a déclaré Peter Ngigi, président du groupe.
« C’est là qu’on a choisi l’élevage de porcs ; c’était facile de trouver de quoi les nourrir en allant fouiller les poubelles des hôtels. On a ensuite acheté deux vaches et quelques chèvres ».
Peter Ngigi, 21 ans, et ses amis, qui ont grandi dans les bidonvilles, ont eu plusieurs démêlés avec la justice pour avoir commis des délits mineurs. Certains d’entre eux ont purgé des peines d’emprisonnement. Leur quartier a été baptisé Kosovo en allusion à la guerre des gangs violente qui s’y est déroulée en 2002 ; à cette époque, le quartier était devenu une zone interdite pour les Mungiki, une milice quasi religieuse hors-la-loi qui contrôle d’autres bidonvilles de la capitale.
A Kosovo, comme dans la plupart des bidonvilles de la ville, les habitants vivent dans des conditions déplorables : construction sauvage, habitations encombrées, égouts à ciel ouvert, un petit nombre de toilettes pour plusieurs centaines de personnes et pas d’eau courante ; la zone est en outre traversée par les eaux polluées de la Nairobi.
Un nouveau départ
Deux ans après le lancement du projet, M. Ngigi et ses amis possèdent 22 cochons, trois chèvres et trois chevreaux, ainsi que deux vaches, qu’ils gardent dans un bâtiment semi-permanent, dont la construction n’a pas été achevée.
« La panique provoquée récemment par la grippe porcine a été notre plus grand revers [parce que] nous ne pouvons pas vendre les cochons », a indiqué M. Ngigi à IRIN, le 26 mai. « Nous espérons que la maladie ne se déclarera pas au Kenya ; on serait finis ».
Le projet du Kangaroo Youth Self-Help Group est néanmoins limité car la plupart de ses membres ont des connaissances réduites dans le domaine de l’élevage et de la commercialisation.
Photo: Julius Mwelu/IRIN |
Peter Ngigi, président du Kangaroo Youth Self-Help Group, s’occupe d’un porcelet à Kosovo, un quartier du bidonville de Mathare, à Nairobi |
Le groupe a été encouragé à se lancer dans l’élevage de porcs par un autre jeune homme, a-t-il expliqué, qui a réussi, depuis lors, à quitter le bidonville.
« Kariz [un surnom] a même réussi à s’acheter deux matatus [taxis] en élevant des cochons, ici, à Kosovo, qu’il vendait ensuite aux bouchers du coin et d’autres quartiers de la ville. Alors, on s’est dit pourquoi ne pas nous lancer dans un projet semblable ? On pourra peut-être, nous aussi, faire quelque chose de notre vie », a expliqué Hillary Wachira.
Le plus gros problème, selon M. Ngigi, a consisté à trouver de la place pour y loger les bestiaux. La chance a fini par leur sourire lorsqu’une habitante du bidonville, qui avait élevé des cochons dans le passé, leur a permis d’utiliser son bâtiment inachevé pour leur projet.
« La propriétaire du bâtiment nous aide ; nous lui payons environ 1 000 shillings par mois [13 dollars], une somme bien inférieure aux loyers pratiqués actuellement dans ce quartier », a expliqué M. Ngigi.
« Elle nous a également donné des conseils sur l’élevage des cochons ; le bon moment pour les vermifuger, la bonne quantité de nourriture à donner aux porcelets ; elle nous a même montré le magasin de produits agro-vétérinaires où nous achetons nos médicaments ».
Manque de formation
Les membres du groupe souhaitent être formés et aidés en matière de commercialisation.
Photo: Julius Mwelu/IRIN |
Hillary Wachira, membre du Kangaroo Youth Self-Help Group, dans la zone de Kosovo, à Mathare, s’occupe des vaches du groupe |
« Ce dont nous avons vraiment besoin, c’est qu’on nous apprenne à nous occuper de ces bêtes, pour éviter le plus possible d’en perdre inutilement ; souvent, on se repose uniquement sur les conseils des gens qui ont déjà gardé des cochons ».
Le groupe n’a pas non plus de marché pour ses produits.
« Nous sommes allés voir plusieurs bouchers pour leur dire qu’on pouvait leur vendre des bêtes régulièrement, mais aucun ne nous a répondu ; parfois, nous aimerions être aidés par le Fonds public d’aide aux jeunes entrepreneurs, mais nous ne savons pas comment nous y prendre ; par où commencer ? », a-t-il demandé.
Le groupe étant situé tout près des eaux polluées de la Nairobi, il souhaiterait également se lancer dans la préservation de l’environnement, a expliqué M. Ngigi.
« Nous voudrions planter des arbres sur les rives de la rivière, pour empêcher l’érosion du sol, qui grignote notre espace », a-t-il expliqué. « Nous allons persévérer dans cette voie, parce que nous espérons pouvoir un jour vivre de ce projet ; si seulement nous étions conseillés et formés ».
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