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Habré reste au Sénégal et l’Union africaine décidera de son avenir judiciaire

[Chad] Former Chadian President Hissene Habre. Human Rights Watch
L'ex-président tchadien Hissène Habré
Recherché pour crimes contre l’humanité, l’ex-président tchadien Hissène Habré, sera autorisé à séjourner au Sénégal en attendant que l’Union africaine fixe son avenir judiciaire en début d’année, a déclaré dimanche dernier le ministre sénégalais des Affaires étrangères, Cheikh Tidiane Gadio.

Pour tenter de mettre un terme à deux semaines de controverses juridiques et de vifs débats nationaux autour du sort de M. Habré, le ministre a déclaré que le Sénégal était contre l’impunité mais jugeait qu’il était de la responsabilité du continent africain de prendre une décision collégiale sur l’éventualité d’une traduction de M. Habré devant une juridiction pour qu’il réponde des crimes qui lui sont reprochés.

« Il appartient aux leaders de l’Union africaine d’indiquer la juridiction compétente pour juger cette affaire », a affirmé Gadio à la presse. « Le président [Abdoulaye] Wade du Sénégal a fait comprendre que cette affaire était une affaire africaine ; elle n’était pas strictement Sénégalaise ».

Accusé d’être responsable de nombreux actes de torture et d’exécutions politiques commis sous son régime de 1980 à 1990, M. Habré, qui vit au Sénégal depuis 15 ans, a été incarcéré le 15 novembre, près de deux mois après qu’un tribunal belge ait délivré à son encontre un mandat d’arrêt international et une demande d’extradition.

Vendredi, après s’être déclaré incompétente pour statuer sur la demande d’extradition vers la Belgique de l’ancien chef d’Etat tchadien, la chambre d’accusation sénégalaise a ordonné sa remise en liberté.

Mais le lendemain, il est arrêté et incarcéré de nouveau. Dans une déclaration à la presse, ses avocats ont indiqué que le ministère sénégalais de l’Intérieur avait donné 48 heures à leur client pour quitter le territoire national et rejoindre le Nigeria, où il sera confié à la garde du chef d’Etat nigérian et président en exercice de l’Union africaine, Olusegun Obasanjo.

Au cours d'une conférence de presse qui s'est tenue dimanche à Dakar, M. Gadio a déclaré que l’arrêté avait été annulé et que M. Habré pourrait continuer à séjourner au Sénégal en attendant qu’une décision soit prise lors du prochain Sommet des chefs d’Etat de l’Union Africaine, prévu du 23 au 24 novembre à Khartoum, la capitale soudanaise.

Selon M. Gadio, c’est en prenant en considération les arguments de M. Habré et de ses avocats que le gouvernement a décidé de ne pas envoyer l’homme de 63 ans au Nigeria.

Les avocats de M. Habré avaient souligné que l’arrêté du ministère de l’Intérieur constituait une violation des droits de leur client et qu’ils feraient immédiatement appel pour annuler cette demande.

M. Gadio a souligné que le Sénégal s’opposait fermement à l’impunité.

« Le Sénégal a trouve que, globalement, dans le sens bien compris de la lutte contre l’impunité en Afrique, qu’il était important que … cette question soit inscrite a leur ordre du jour [du sommet de chefs d’Etat de l’Union Africaine ] », a-t-il déclaré. « Et qu’on leur demande quelle est la position que l’Afrique doit adopter, et quelle est la position que l’Afrique recommande au Sénégal sur cette affaire ».

En 1992, la Commission tchadienne vérité et réconciliation avait accusé l’ex-président Habré d’être responsable de l’assassinat politique d’au moins 40 000 personnes et d’actes de torture.

« Voila véritablement un dossier qui quelque part devient de plus en plus une injustice par rapport au Sénégal », a déclaré M. Gadio à la presse. « Les faits ne se sont pas déroulés au Sénégal. Le Sénégal n’était complice d’absolument rien ».

« Tout le reste de l’Afrique attend [maintenant] que le Sénégal … trouve les solutions à un problème que nous n’avons pas crée….Sauf que M. Hissène Habré, effectivement, a demandé l’hospitalité à l’époque et il a été admis au Sénégal ».

Alors que de plus en plus de personnes refusent que le gouvernement livre M. Habré à la justice d’un ancien pouvoir colonial, Gadio a nié les allégations selon lesquelles le Sénégal faisait peu cas des victimes présumées.

« Nous sommes contre l’impunité. Les cris de cœur, les plaintes et complaintes des personnes qui se disent être victimes de l’ère Hisène Habré – ces cris ont été entendus – non seulement par notre gouvernement mais par notre peuple tout entier ».

Des avocats d’organisations des droits de l’homme ont affirmé ce week-end qu’il était essentiel qu’Habré soit livré à la Cour belge en respectant le droit.

« L'important, c'est que Hissène Habré réponde des actes qui lui sont imputés dans le cadre d'un procès juste et équitable », a déclaré Reed Brody de Human Rights Watch, depuis Dakar, la capitale sénégalaise.

C’est la seconde fois qu’une cour sénégalaise se déclare incompétente pour juger les présumées atrocités commises sous le régime de M. Habré.

En 2000, une Cour sénégalaise l’avait accusé de torture et de crimes contre l’humanité, mais l’année suivante, la Cour Suprême du pays avait déclaré que l’ancien président ne pouvait être jugé au Sénégal pour des actions qui se seraient déroulées dans un autre pays.

Des tchadiens vivant en Belgique ont déposé plus tard une plainte contre M. Habré. Le 19 septembre dernier, un tribunal belge a émis un mandat d’arrêt international contre lui en vertu de la loi belge de « compétence universelle » qui permet aux juges de poursuivre les responsables des crimes contre l’humanité, quelque soit le lieu où ils ont été commis. Mais cette loi a été annulée plus tard, et l’affaire Habré fait partie de ces quelques dossiers déjà en cours d’instruction que la justice a permis de poursuivre.

Un procès de M. Habré serait une grande première dans l’histoire des procédures intentées pour déférer devant la justice d’anciens chefs.

This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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