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COP21 : voir grand pour sauver les petites îles

Port Vila, Vanuatu, aftermath of cyclone Pam, 14 March 2015 Alice Clements/UNICEF
Les plages de carte postale, les eaux poissonneuses et … et la menace existentielle que représente un réchauffement climatique rapide. Les petits Etats insulaires partagent plusieurs points communs. Certains négatifs.

Les données ne laissent pas de place au doute. Le réchauffement climatique de la planète va s’accentuer au cours des prochaines décennies à cause des émissions de gaz à effet de serre passées et du manque d’action face au changement climatique. Reste à savoir si l’augmentation des températures sera inférieure à deux degrés – inconfortable mais supportable – ou si les Etats insulaires de faible altitude devront faire face au pire scénario, celui d’une hausse supérieure à 4 degrés, auquel cas les effets seraient graves, généralisés et irréversibles.

L’Alliance des petits Etats insulaires (Alliance of Small Island States, AOSIS) qui participe au sommet de Paris sur le climat réclame une réduction des émissions afin de limiter le réchauffement à 1,5 degré. Le péril auquel les 43 pays de l’AOSIS sont confrontés leur confère une autorité morale et un certain pourvoir d’influence dans les négociations. Aujourd’hui [1er décembre], le groupe partagera ses inquiétudes avec Barack Obama, le président des Etats-Unis, en personne.

L’augmentation du niveau de la mer, la multiplication des tempêtes tropicales et les sécheresses sont les menaces connues qui pèsent sur les Etats insulaires de faible altitude. Mais cela ne s’arrête pas là. « Le changement climatique déstabilise les écosystèmes essentiels dont dépendent les économies des PEID [petits Etats insulaires en développement] », note un rapport de l’Alliance pour le climat et le développement (Climate and Development Knowledge Network, CDKN) qui fournit des avis techniques aux décideurs.

On peut notamment évoquer l’impact sur le tourisme, la pêche, la disponibilité de l’eau douce, la production agricole, la viabilité des implantations et des infrastructures côtières – des routes et des lignes électriques aux écoles et aux hôpitaux.

Les coraux ont été les premiers touchés

En 1998, un dépérissement massif – ou « blanchissement » – des coraux de l’océan Indien occidental a été observé suite à une saison marquée par El Niño. Le réchauffement de la mer a provoqué un dépérissement des coraux qui s’est traduit par une migration des poissons. Ce phénomène est un exemple important de l’interdépendance et de la fragilité des écosystèmes, et il a donné naissance au mouvement environnemental.

Les récifs coralliens sont extrêmement vulnérables au stress thermique et à l’acidification des océans. Ils sont aussi essentiels pour « l’économie bleue » de l’océan Indien, qui repose sur la pêche et le tourisme. Elle fait vivre 30 millions d’habitants du littoral est-africain, des Comores, de Madagascar, de l’île Maurice et des Seychelles, d’après la Convention de Nairobi du Programme des Nations Unies pour l’environnement. Le tourisme à lui seul rapporte six milliards de dollars par an.

La majorité des petites îles présentent des handicaps similaires : elles sont isolées, elles sont incapables de générer des économies d’échelle et elles ont un « faible nombre de travailleurs qualifiés, une base infrastructurelle de faible envergure, des investissements technologiques limités et un secteur agricole en difficulté », d’après une étude de la Commission économique des Nations Unies pour l’Afrique. 

 Travailler ensemble

La coopération régionale est une étape importante pour surmonter ces obstacles. L’événement El Niño qui a affecté l’océan Indien en 1998 a été une sonnette d’alarme pour les îles et les pays du bassin occidental de l’Océan Indien. L’océan Indien fournit près d’un quart des prises mondiales de thon et les Seychelles – qui abritent les plus grandes conserveries de thon – sont montées en première ligne pour protéger la biodiversité de la région.

Les Seychelles ont lancé le défi côtier de l’océan Indien occidental (Western Indian Ocean Coastal Challenge, WIOCC) comme une « plateforme pour galvaniser l’engagement politique régional afin de combattre le changement climatique et promouvoir des moyens de subsistance durables », a expliqué Wills Agricole, secrétaire principal du ministère de l’Environnement et de l’Energie des Seychelles en charge du changement climatique et de l’énergie.

Le WIOCC représente aussi une étape supplémentaire : il crée une alliance avec les pays côtiers dans le but de développer les meilleures pratiques pour la conservation marine. « Notre approche est différente de celles des autres petits Etats insulaires car nous considérons toute entité qui a une frontière avec l’océan comme partie prenante dans les affaires de nos mers », a expliqué M. Agricole.

En début d’année, les Seychelles et le groupe environnemental étasunien ‘The Nature Conservancy’ ont signé un accord d’échange de dette sans précédent avec le Club de Paris, qui générera un investissement de 31 millions de dollars dans la conservation marine. Les Seychelles ont déjà créé des « zones de reconstitution » d’une superficie d’environ 200 000 kilomètres carrés dans leurs eaux territoriales pour favoriser le frai du thon.

Said Hassani, maître de conférences à l’université des Comores, pense que les voisins qui se partagent la mer devraient voir l’océan comme une ressource régionale et oublier leurs intérêts nationaux étriqués. « Nous sommes issus de cultures, de sensibilités politiques et de nationalités différentes, mais pour ce qui est de l’environnement, nous partageons le même océan », a-t-il dit à IRIN.

Que faire ?

Les îles peuvent s’adapter de multiples manières et renforcer leur résilience au changement climatique. Il y a des solutions techniques, comme les ouvrages de défense contre la mer et les systèmes de stockage de l’eau ; des approches législatives autour de la révision des codes de construction et du zonage des terres ; des solutions technologiques, comme l’utilisation de cultures plus résilientes, d’après un rapport commandé par la Convention-Cadre des Nations Unies sur le changement climatique.

Mais les petites îles n’ont pas toutes le même profil de risque climatique. Dans certains pays, les savoir traditionnels peuvent jouer un rôle dans la gestion des risques. Les approches communautaires ont des bénéfices reconnus ; en outre, il est possible de développer des régimes d’assurance novateurs. Et il existe une dernière solution : la migration.

D’un point de vue économique, l’adaptation a ses limites pour les îles vulnérables. « Les économies plus diversifiées apportent des réponses plus fortes au stress climatique, mais la majorité des petites îles, et plus particulièrement les îles en développement, ne réalisent pas d’économies d’échelle dans la production ; ainsi, elles se spécialisent dans des marchés de niche et développent des monocultures (par exemple, la banane ou le sucre) [qui sont sensibles au climat] », note l’Alliance pour le climat et le développement.

La Commission économique pour l’Afrique préconise la mise en œuvre d’un éventail d’interventions pour « débloquer le potentiel de développement des petits Etats insulaires en développement d’Afrique ». Elles incluent le renforcement de la sécurité alimentaire, le transfert des technologies, la mise en avant des énergies renouvelables et la mise en œuvre d’interventions ciblées en direction des communautés pauvres.

Le manque de financement constitue la principale contrainte à l’adaptation. Le rapport de l’Alliance pour le climat et le développement conclut : « Il apparait clairement que les PEID [petits Etats insulaires en développement] ont besoin de ressources pour développer des cadres viables pour l’adaptation, des capacités et des infrastructures essentielles pour le développement ».

Si la conférence de Paris sur le climat se solde par un accord sur ce point et un plan d’action crédible pour réduire les gaz à effet de serre, les petites îles seront les premiers participants à se réjouir.

wk/oa/ag-mg/amz 
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