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La saison des inondations débute, mais pas là où elle devrait

Alors que les pluies saisonnières commencent à tomber aux quatre coins du Sahel, la région s’engage dans un cycle de pluies fortes et imprévisibles qui pourraient détruire les cultures et faire des milliers de sans-abri, préviennent les climatologues.

« Il pleut plus maintenant au Sahel qu’au cours des 30 dernières années », a expliqué Sylwia Trzaska, climatologue de l’Institut international pour la recherche sur le climat et la société de l’université Columbia, à New York. « Entre le début des années 1970 et les années 1990, à l’époque où la région était très sèche, les populations ont commencé à s’installer dans des zones inondables jusque-là inhabitées. Aujourd’hui, ces zones recommencent à subir des inondations ».

Déjà en juin, un mois avant que les pluies commencent normalement à tomber dans la région, de fortes averses ont inondé les habitations de près de 6 000 personnes dans le nord du Burkina Faso. Selon la Croix-Rouge, la province du Kouritenga, située 100 kilomètres à l’est de Ouagadougou, la capitale, a été la plus touchée, puisqu’elle a reçu 155 millimètres de précipitations en 24 heures. Plus de 680 foyers ont été touchés.

L’année dernière, plus de 129 000 personnes ont été victimes des inondations au Niger, au Burkina Faso, au Sénégal, en Mauritanie et en Guinée, selon le Bureau des Nations Unies pour la coordination des affaires humanitaires (OCHA).

Une des inondations les plus dévastatrices a eu lieu au Niger, où 17 000 personnes ont dû abandonner leurs maisons noyées sous les eaux, à Bilma, une ville désertique et reculée du nord du pays, après que 63 millimètres de précipitations furent tombés en à peine quelques jours ; soit à peu près l’équivalent des précipitations totales enregistrées dans la ville au cours des 10 dernières années.

Et dans la vieille oasis de Gorom-Gorom, dans le nord du Burkina Faso, ce sont 6 000 personnes qui ont vu leurs habitations emportées par les inondations causées par les pluies diluviennes d’août 2006.

Se tenir prêt

Aucun pays de la région ne peut dire qu’il est à l’abri des inondations, selon Jerry Niati, responsable régional de la gestion des catastrophes à la Fédération internationale de la Croix-Rouge (FICR) à Dakar. Le rôle de M. Niati est d’apporter des conseils aux pays en matière de prévention et de mitigation des conséquences des catastrophes naturelles.

« Les régions qui, dans le passé, ne subissaient jamais d’inondations sont aujourd’hui prises au dépourvu », a-t-il dit.

Les experts en gestion des catastrophes comme M. Niati s’inquiètent surtout de constater que certains pays du Sahel n’ont pas de plan de contingence.

« Tandis que certains pays prennent des mesures de mitigation et sont bien préparés, d’autres, en revanche, ne le sont pas parce qu’ils ne s’attendent pas à subir des inondations », a dit M. Niati.

Selon lui, les équipes onusiennes locales et les organisations non-gouvernementales qui travaillent au Sahel doivent être prêtes à réagir rapidement lorsque les inondations auront lieu, et devraient se préparer dès maintenant.

« Elles devraient élaborer des plans de contingence et s’entraîner à réagir à des scénarios catastrophes », a-t-il recommandé.

Les organismes de préparation aux catastrophes doivent également mener des campagnes d’information au sujet des menaces d’inondations, de telle sorte que les communautés puissent être prêtes à réagir.

« Les pays devront compter sur les ressources locales qu’elles pourront réunir », a-t-il poursuivi.

Une grande variabilité naturelle

Selon plusieurs chercheurs, certaines zones de la région, normalement humides, pourraient en fait être en train de s’assécher.

Dans le bassin de la Volta, dans le centre du Ghana, où d’énormes barrages hydroélectriques génèrent une grande partie de l’électricité utilisée au Ghana, au Togo et au Bénin, les chercheurs ont enregistré des températures en hausse ainsi qu’une baisse des précipitations. Cette sécheresse croissante a déjà perturbé la production d’électricité dans l’ensemble de la région.

Mais ailleurs au Ghana, les fortes inondations qui ont eu lieu au début du mois de juin ont touché plus de 1 600 foyers, à Accra, la capitale, où 500 personnes se sont trouvées à la rue, selon OCHA.

« L’Afrique de l’Ouest est et a toujours été sujette à une grande variabilité naturelle », a expliqué Romain Guigma, coordinateur national pour la préparation et la réponse aux catastrophes à la Croix-Rouge burkinabè.

Malgré tout, les climatologues disent qu’ils ne disposent pas d’assez de données pour déterminer si l’évolution du schéma des précipitations est directement liée au réchauffement climatique ou bien si elle est la conséquence d’un schéma naturel d’emballement-effondrement se traduisant par une sécheresse suivie de fortes précipitations.

Pour Mme Trzaska de l’université de Columbia, les données recueillies au cours des 50 dernières années sur le climat au Sahel sont trop « inégales » pour le dire. Dave Rowell, du Bureau météorologique de Londres abonde dans ce sens, même si, selon lui, il était « aisément prévisible » qu’avec le changement climatique, en 20 ans, la région allait devenir plus sujette aux catastrophes.

Des populations vulnérables

En Afrique de l’Ouest, une majorité des populations dépendent encore de l’agriculture de subsistance et profitent de la saison des pluies pour faire pousser autant de fruits et légumes qu’elles le peuvent pour subvenir à leurs besoins tout le reste de l’année.

Lorsque des inondations détruisent les cultures et les habitations, et noient les bêtes d’élevage, ces populations en subissent les conséquences pendant toute l’année, et parfois au-delà.

Ainsi, de nombreuses victimes des inondations qui ont eu lieu l’année dernière dans le nord du Niger vivent encore dans des tentes et ont besoin de nourriture, de couverture et de moustiquaires.

Une mission d’évaluation, récemment menée par OCHA à Gorom-Gorom, au Burkina Faso, a révélé que les 6 000 habitants victimes des inondations dans cette commune nécessiteraient une aide humanitaire « au moins » jusqu’à la prochaine récolte, en septembre 2007.

Joseph Instiful, qui travaille lui aussi au Bureau météorologique de Londres, a expliqué que les responsables de la gestion des catastrophes devaient s’intéresser davantage aux inondations qu’à la sécheresse.

L’Organisation météorologique mondiale est en train d’établir une station de surveillance en Afrique de l’Ouest, l’infrastructure en matière de prévision des précipitations n’étant pas « bien développée » dans cette région, selon M. Instiful.

A l’heure actuelle, les signes de sécheresse imminente sont détectables bien à l’avance, ce qui n’est pas le cas des inondations à grande échelle, a ajouté M. Instiful.

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This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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