« Notre plus grand souci, ce sont les pauvres propriétaires de petits élevages de volailles », a confié à IRIN M. Christopher Delgado, expert de la Banque Mondiale (BM), lors de la conférence internationale sur la grippe aviaire qui s’est ouverte mercredi dernier à Bamako, capitale du Mali.
Plus de cent pays et organisations internationales étaient représentés à la conférence. Cette réunion de trois jours a permis aux experts d’échanger des informations sur la maladie, et aux délégations ministérielles de définir des stratégies communes en matière de financement des programmes de lutte contre la maladie. M. Delgado conduisait la commission inter-Agence dont le rapport sur la lutte contre la propagation de la grippe aviaire dans les pays en développement recommande notamment l’indemnisation des éleveurs de volailles.
Pour M. Delgado, l’idée de l’abattage en masse des têtes de volaille des petits éleveurs est « obscène ». La production avicole est devenue une importante source de protéines dans les pays en développement. Cette activité a connu une croissance annuelle de 5,9 pour cent, par rapport à la production céréalière qui n’a connu qu’une croissance de 0,4 pour cent, a commenté l’expert de la BM.
« En l’absence de programmes d’indemnisation bien élaborés, ce sont ces petits éleveurs qui risquent de disparaître », a-t-il déploré.
Et ces programmes doivent être mis en œuvre rapidement, a-t-il ajouté. L’expérience a montré qu’en cas d’épidémie de grippe aviaire, les bêtes doivent être abattues dans les 72 heures, sinon la lutte contre la propagation de la maladie devient plus difficile et onéreuse.
Les éleveurs doivent être indemnisés immédiatement pour éviter qu’ils ne s’opposent à la destruction de leur seul moyen de subsistance, a expliqué M. Delgado. Or, les gouvernements des pays pauvres ont généralement une marge financière quasi-nulle et les fonds d’aide d’urgence des fonds ne sont toujours immédiatement disponibles.
En outre, dans les pays en développement qui ont connu des épidémies de grippe aviaire, la création de commissions d’indemnisation des éleveurs a parfois posé quelques difficultés. Les fonds d’indemnisation ont été détournés, où les autorités ont hésité à débloquer rapidement ces fonds, craignant les demandes d’indemnisation frauduleuses.
Au Vietnam, par exemple, les autorités ont réussi à juguler les épidémies de grippe de aviaire de 2003 et 2004 en prenant des mesures très autoritaires. Elles ont fait abattre près de 17 pour cent de la population avicole du pays.
Le rapport salue les efforts du gouvernement vietnamien, mais recommande toutefois de n’abattre que dix pour cent de la population avicole, ou cinq pour cent uniquement, dans les pays pauvres ne disposant de sources d’alimentation très diversifiées. Le reste de la volaille infectée devra être vacciné.
Le rapport recommande également aux gouvernements d’indemniser non seulement les éleveurs, mais aussi les fournisseurs d’aliments de volaille, les ouvriers des fermes d’élevage et les transporteurs.
Et pour que le programme d’indemnisation soit efficace, les gouvernements devront d’abord déterminer la nature juridique du préjudice subi par les éleveurs, a fait remarquer M. Delgado.
« Après tous, il s’agit d’une destruction par l’Etat d’un bien privé pour cause d’utilité publique », a-t-il conclu.
This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions