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Les paysans africains pourraient gagner de l’argent « vert »

Peter Kagbo, project coordinator of a rural development association at the village of Masongbo near Makeni, in a rice field that is part of the cooperative he runs. David Hecht/IRIN
Harvesting rice in the village of Masongbo near Makeni, Sierra Leon

Le manque d’information est le principal obstacle aux programmes qui prévoient de rémunérer les paysans africains pour les inciter à protéger l’environnement, selon un responsable de l’Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture.

Le paiement des services environnementaux (PSE) est une pratique observée dans plusieurs régions du monde depuis les années 1980, et qui pourrait permettre de faire face aux préoccupations croissantes que suscitent le changement climatique, la perte de biodiversité et les ressources en eau, selon La Situation mondiale de l’alimentation et de l’agriculture, le rapport annuel de l’Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), publié le 15 novembre.

Instaurer le PSE en Afrique pourrait s’avérer essentiel pour atténuer certains des effets du réchauffement climatique, selon Keith Wiebe, directeur du Service du développement agricole comparatif de la FAO, qui a largement contribué à la rédaction du rapport.

Des centaines de programmes de paiement des services environnementaux ont été établis de par le monde, essentiellement dans le cadre d’initiatives de conservation des forêts. Toutefois, « le nombre des programmes de PSE destinés aux exploitants et aux terres agricoles dans les pays en développement est […] assez limité », indique le rapport.

Le paiement peut s’effectuer sous forme de transaction volontaire faisant intervenir les agriculteurs, les communautés, les contribuables, les consommateurs, les corporations ou les gouvernements ; il peut également s’effectuer par versement direct des gouvernements aux producteurs ou par transfert indirect, par le biais de surtaxes versées par les consommateurs qui le souhaitent.

« Le secteur agricole emploie plus d’individus, occupe plus d’espace et absorbe plus d’eau que toute autre activité humaine », a révélé Jacques Diouf, directeur général de la FAO, dans l’avant-propos du rapport.

Le potentiel de l’agriculture

L’agriculture « peut altérer la terre, l’eau, l’atmosphère et les ressources biologiques de la planète – ou les renforcer – selon les décisions prises par les plus de deux milliards de personnes dont les moyens de subsistance dépendent directement des cultures, du bétail, de la pêche ou des forêts. Il est essentiel de veiller à ce que ces populations soient suffisamment motivées [à protéger l’environnement] ».

Globalement, l’avenir ne semble pas prometteur. Selon les estimations du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), la production alimentaire aura diminué de moitié d’ici à l’an 2020. Près de 200 millions de personnes – environ 25 pour cent de la population africaine – n’ont pas facilement accès à l’eau ; d’après les prévisions, elles seront 50 millions de plus d’ici à l’an 2020 et auront plus que doublé d’ici 2050.

Le Programme nord-américain de mise en réserve de terres fragiles à des fins de conservation (CRP), créé en 1985, est le plus grand programme de PSE du monde ; il verse une rente annuelle aux agriculteurs et couvre une partie des coûts occasionnés par les pratiques de conservation des terres agricoles.

« [L’agriculture] peut altérer la terre, l’eau, l’atmosphère et les ressources biologiques de la planète – ou les renforcer – selon les décisions prises par les plus de deux milliards de personnes dont les moyens de subsistance dépendent directement des cultures, du bétail, de la pêche ou des forêts. Il est essentiel de veiller à ce que ces populations soient suffisamment motivées [à protéger l’environnement] ».
« Créé initialement pour résoudre les problèmes de l’érosion des sols et soutenir les revenus des agriculteurs concernés par la baisse des prix agricoles, ce programme a évolué au fil des ans et finance désormais les changements d’utilisation des terres qui améliorent la qualité de l’eau et l’habitat sauvage », peut-on lire dans le rapport de la FAO.

Toutefois, la plupart des pays d’Afrique « n’ont pas accès aux informations scientifiques, telles que l’analyse des sols, pour pouvoir concevoir des programmes », selon M. Wiebe. « Il est également nécessaire de disposer d’institutions adaptées pour mettre en relation les exploitants prestataires de services environnementaux et les personnes qui bénéficient de ces services ». La question de la propriété foncière, et les négociations avec un certain nombre de petits exploitants font également partie des difficultés à résoudre avant de pouvoir instaurer le PSE en Afrique.

Il existe malgré tout quelques programmes africains de PSE, tels que l’Initiative pour le vin et la biodiversité (BWI) en Afrique du Sud, qui aide les viticulteurs à adopter des pratiques permettant de limiter les conséquences néfastes de leur activité sur la biodiversité. « En échange, ils reçoivent de l’aide en matière de gestion agricole, ainsi que des abattements de taxe foncière. A la mi-2007, le BWI couvrait environ la moitié de l’ensemble des vignobles des Winelands du Cap – soit plus de 50 000 hectares », a-t-il indiqué.

L’agriculture contribue notablement à l’émission des trois principaux gaz à effet de serre : le dioxyde de carbone, le méthane et l’oxyde nitreux. « Le dioxyde de carbone est le plus important pour le réchauffement planétaire, bien que le méthane et l’oxyde nitreux y contribuent aussi largement », selon le rapport de la FAO. « Les activités agricoles et la réaffectation des terres comptent pour environ un tiers des émissions totales de dioxyde de carbone, et elles sont les plus importantes sources de méthane (produit par l’élevage et les rizières inondées) et d’oxyde nitreux (provenant principalement des applications d’engrais azoté minéral) ».

Le rôle de l’Afrique

Les exploitants d’Afrique, pour la plupart petits paysans ou agriculteurs de subsistance, ne sont pas responsables des « émissions de carbone à l’échelle » de leurs homologues des pays développés ou d’Asie, « mais en plantant des arbres ou en ayant recours à de meilleures pratiques agricoles – telles que l’agriculture de conservation – ils peuvent compenser le carbone émis ailleurs dans le monde et être indemnisés par le biais du paiement des services environnementaux », a expliqué M. Wiebe.

Réduire la déforestation, planter plus d’arbres, limiter le labour, augmenter le couvert végétal et améliorer la gestion des pâturages pourraient notamment aboutir au stockage de plus de deux milliards de tonnes de carbone dans une cinquantaine de pays entre 2003 et 2012, selon la FAO.

Les forêts, de même que les sols, les océans et l’atmosphère stockent le carbone, qui se transfère des uns aux autres au fil du temps. Dès lors, les forêts peuvent en être la source ou le récipient selon les périodes. Les sources libèrent plus de carbone qu’elles n’en absorbent, tandis que les récipients absorbent plus de carbone qu’ils n’en émettent. Où qu’elle soit pratiquée, l’agriculture, qui permet d’absorber, de stocker et de transformer les gaz à effet de serre, pourrait jouer un rôle majeur de « récipient » de carbone.

Plan Vivo, un projet de BioClimate Research & Development (BR&D), une organisation à but non-lucratif, donne aux populations des pays développés l’occasion de financer divers programmes de gestion durable des forêts et de l’utilisation des sols, qui permettront de réduire les émissions de carbone, et sont dirigés par les agriculteurs et les communautés des pays en voie de développement.

Plan Vivo a lancé deux programmes en Afrique – en Ouganda et au Mozambique – mais, selon M. Wiebe, il est « très difficile » d’assurer le suivi des initiatives gérées par des entités privées.

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This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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