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Le personnel local de l’ONU - Des cibles faciles en temps de crise

Francois, a driver with a UN agency in Côte d'Ivoire Anthony Morland/IRIN
Tandis que l’Opération des Nations Unies en Côte d’Ivoire (l’ONUCI) est confrontée à un climat d’hostilité systématique et croissante, les personnes employées localement par l’ONU, même travaillant pour des agences complètement indépendantes de l’ONUCI, vivent dans la peur.

Tout le personnel onusien local considéré comme non-essentiel a reçu l'instruction de rester à la maison jusqu’à nouvel ordre et de ne pas se présenter au travail ; quant aux employés du personnel international de l’ONUCI, beaucoup d’entre eux vivent aujourd’hui de façon permanente dans leur bureau, où ils dorment sur des lits de camp.

Pour François*, chauffeur pour une autre agence des Nations Unies, la crise actuelle est source d’un stress intense, en particulier parce que cela fait ressurgir les souvenirs traumatiques de son enlèvement par les forces rebelles il y a près de dix ans, un kidnapping qui avait bien failli lui coûter la vie.

« Cette crise a des effets graves sur le personnel local de l’ONU. Nous avons à faire face à toutes sortes de problèmes, surtout des problèmes liés à notre sécurité. Nous nous sentons ciblés par ceux qui soutiennent [Laurent] Gbagbo, » a dit François à IRIN. M. Gbagbo a refusé de quitter le pouvoir bien que la communauté internationale ait confirmé son rival politique Alassane Ouattara comme président élu, une décision qui a exaspéré ceux qui continuent à soutenir M.Gbagbo.

« Je vis dans un quartier dominé par les partisans de M. Gbagbo. C’est très difficile quand on est employé à l’ONU. Ce n’est pas que nous nous faisons attaquer, mais nous ressentons beaucoup de méfiance depuis l’élection.

On entend dire que si la situation dégénère, nous seront les premiers ciblés. Nous avons reçu des menaces indirectes. » Dans les quartiers d’Abidjan où M. Gbagbo jouit d’un soutien important, les Jeunes Patriotes sont souvent très présents ; il s’agit d’un mouvement de jeunesse très politisé, qui se fait beaucoup entendre, dont le leader, Charles Blé Goudé, a été l’un des critiques les plus virulents des Nations Unies. 

« Ici, il y a les Jeunes Patriotes qui me connaissent et qui savent que je travaille pour les Nations Unies, » a dit François à IRIN. « Quand les Nations Unies ont affiché leur soutien à M. Ouattara, j’ai décidé de ne plus sortir la nuit. Notre employeur nous a dit de ne plus venir au travail, de limiter nos sorties et d’éviter les discussions.

« On entend dire que, si la situation dégénère, nous serons les premiers ciblés. Nous avons reçu des menaces indirectes. »
Maintenant je ne dis plus aux gens que je travaille pour l’ONU. Et si je le dis, je fais bien attention de préciser que je ne travaille pas pour l’ONUCI. » François a dit que la situation l’avait obligé à dissimuler son identité professionnelle. « Quand on entend en public une telle hostilité envers les Nations Unies, cela fait peur. Nous ne savons pas ce qui se passera demain.

Je connais des collègues qui ont été attaqués verbalement et ont même reçu des menaces de mort. L’un d’entre eux, qui était en mission à Guiglo [dans la région du Moyen-Cavally, dans l’ouest de la Côte d’Ivoire] a été averti par une amie qu’il devait partir, parce qu’elle avait entendu des rumeurs que le personnel de l’ONU allait être attaqué. »
 
Pour François, le climat politique délétère et la montée de la propagande représentent un stress de plus en plus pénible pour lui et sa famille. « A la télévision, on n’entend pas parler de paix. Il est juste question d’attaques imminentes et de “nous nous défendrons”. Cela me fait tellement peur. Je n’arrive plus à dormir correctement. Mais je suis obligé de cacher ma peur devant mes sept enfants [âgés de 3 à 22 ans].

Je trouve ça difficile de ne pas pouvoir travailler. Cela m’a rendu littéralement malade. J’ai l’habitude de travailler et rester assis à ne rien faire pendant deux mois est très difficile pour moi.

J’ai vécu la guerre. J’ai même été pris comme otage par les rebelles pendant deux mois en 2002 dans l’ouest du pays, où j’étais tombé dans une embuscade. Nous étions 23. Seuls sept d’entre nous en sont sortis vivants. Des gens ont été tués sous nos yeux.

Avec tout ce que j’ai vu dans le passé, je ne veux pas revivre ça. Mais c’est ce qui se passe à nouveau.

Ce n’est pas que nous trouvons tous les jours des cadavres dans la rue, mais on n’a pas le sentiment d’être en sécurité.

Je n’ai pas grand espoir de voir la paix s’installer. On n’entend parler que de guerre. Avant les élections, nous avions de l’espoir, mais depuis, et avec l’échec des efforts de médiation, je suis pessimiste pour l’avenir.

Le personnel local n’est pas très bien traité ici. Depuis le début de la crise, si un membre du personnel local a des ennuis, il n’y a personne pour lui venir en aide… Je n’ai pas connaissance de l’existence d’un service d’aide psychologique pour le personnel local dans l’agence pour laquelle je travaille. »

*Il s’agit d’un nom d’emprunt

am/cs/cb – og/amz

This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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