Bien qu’elles aient été conçues pour accueillir 80 000 personnes, les 422 prisons du pays abritent à ce jour plus de 140 000 détenus, selon le ministère de la Justice.
En 2004, le gouvernement a lancé un programme visant à contrôler la propagation de la tuberculose dans les établissements carcéraux en adoptant le Traitement sous surveillance directe, également connu sous le nom de Traitement de brève durée ou DOTS, une stratégie de traitement recommandée par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et visant à détecter et à guérir la maladie.
Mais à ce jour, seules 122 prisons dans 17 des 33 provinces du pays bénéficient du programme DOTS, soutenu par le Fonds mondial, a déclaré Daniel Rasjid, responsable de la stratégie de contrôle de la tuberculose et directeur général du système carcéral indonésien.
« Le principal problème est le surpeuplement », a expliqué Daniel Rasjid à IRIN. « Le surpeuplement facilite la propagation des maladies et la tuberculose se propage bien plus facilement que le VIH car elle n’exige pas de contact physique ». L’action antidrogue a contribué à ce surpeuplement, en particulier dans les grandes villes, où la plupart des détenus ont été condamnés pour infraction à la loi sur les stupéfiants, a-t-il ajouté.
Si elle n’est pas soignée, chaque personne atteinte de tuberculose active peut infecter en moyenne 10 à 15 personnes par an.
Selon les statistiques du ministère de la Justice, 90 détenus sont morts de la tuberculose en 2009, dans l’ensemble du pays, contre 150 l’année précédente.
Quatrième pays le plus peuplé du monde, l’Indonésie compte 230 millions d’habitants et supporte la troisième charge de tuberculose la plus lourde du monde, selon l’OMS. D’après Stop TB Partnership Indonesia, quelque 140 000 Indonésiens succombent chaque année à la tuberculose ; il s’agit de la deuxième cause de décès après les maladies du cœur dans l’ensemble du pays et de la population, toutes tranches d’âge confondues, selon le ministère de la Santé.
Et si l’on n’en sait peu sur le taux de prévalence actuel de la tuberculose dans les prisons indonésiennes, une étude publiée par le ministère de la Santé en 2005 indiquait que 1,7 pour cent des détenus en étaient atteints, d’après Tjandra Yoga Aditama, directeur général du contrôle des maladies et de l’hygiène du milieu au ministère de la Santé.
Ce chiffre était 16 fois plus élevé que le taux de prévalence de la maladie au sein de la population dans son ensemble, a-t-il ajouté.
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Si elle n’est pas soignée, chaque personne atteinte de tuberculose active peut infecter en moyenne 10 à 15 personnes par an (photo d’archives) |
« Les mesures de contrôle et de prévention de la tuberculose ne peuvent être appliquées pleinement en raison de l’état déplorable des bâtiments et des infrastructures des prisons », selon M. Aditama.
« Mais des mesures sont prises pour [séparer] les détenus atteints de tuberculose des autres, particulièrement de ceux qui sont vulnérables, notamment des personnes atteintes de VIH/SIDA », a-t-il ajouté.
Un système de surveillance de la tuberculose en milieu carcéral est encore en cours d’élaboration ; il sera fondé sur les normes appliquées dans le cadre du programme national de contrôle de la tuberculose, a également rapporté M. Aditama.
Pénurie de médecins
Selon Daniel Rasjid, les établissements carcéraux de certaines provinces telles qu’Aceh ou Papua ne comptent pas de médecin permanent ; dans d’autres régions, telles que les provinces de Maluku, du Nusa Tenggara Oriental ou du Nusa Tenggara Occidental, un seul médecin est responsable de l’ensemble des prisons.
Les médecins qui exercent au ministère de la Santé local se rendent sporadiquement dans ces prisons, parfois une seule fois en deux semaines, a expliqué M. Rasjid.
« Les médecins et les infirmiers sont au premier rang de la lutte contre la tuberculose. Mais la plupart des plus de 300 médecins que nous avons exercent à Jakarta et dans d’autres prisons, sur l’île de Java », a-t-il ajouté.
Dans l’idéal, un grand établissement carcéral devrait compter au sein de son personnel deux médecins, un dentiste, deux infirmiers et un technicien de laboratoire, a-t-il expliqué.
En outre, les fonds alloués par le gouvernement ne suffisent pas à assurer que les détenus soient bien soignés et bien nourris, à en croire M. Rasjid. « Admettons qu’une prison ait une capacité d’accueil de 700 personnes. Même si elle abrite 2 500 détenus, son budget repas ne suffira que pour 700 personnes ».
Selon Muhammad Hatta, consultant pour le programme public de contrôle de la tuberculose, certains détenus souffrent de tuberculose multirésistante (MDR).
Environ deux pour cent des cas de tuberculose nouvellement diagnostiqués en Indonésie seraient des cas de MDR, selon l’OMS.
Selon M. Hatta, la lutte contre la tuberculose en Indonésie est « un échec » parce que le pays n’est pas en mesure d’assurer un approvisionnement continu en matériel médical, les fonds nécessaires étant en majeure partie versés par les bailleurs internationaux.
« Notre programme de lutte contre la tuberculose dépend en grande partie des fonds étrangers, notamment pour financer l’approvisionnement en médicaments », a expliqué M. Hatta. « Or, le soutien du gouvernement et des ONG [organisations non gouvernementales] aux programmes de lutte contre la tuberculose dans les prisons est insuffisant. Des centaines d’ONG opèrent dans le domaine du VIH/SIDA, mais très peu s’occupent de la tuberculose », a-t-il expliqué.
Selon lui, le problème du surpeuplement carcéral est si grave qu’il est arrivé à 50 personnes de se trouver entassées dans une cellule de 25 mètres carrés. « Les détenus étaient obligés de s’allonger chacun à leur tour parce qu’il n’y avait pas assez de place pour qu’ils puissent tous être allongés en même temps », a-t-il rapporté.
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