« Cela faisait 30 ans que nous étions mariés lorsque j’ai réalisé que l’on allait mourir sans avoir eu d’enfants », a dit à IRIN/PlusNews Mme Muli, aujourd’hui âgée de 60 ans, dans sa maison du district de Kitui. « J’ai amené Teresia pour qu’elle porte nos enfants et qu’un jour, elle reste dernière nous, quand nous serions tous partis ».
Les quatre enfants que Teresia Nthenya, âgée de 38 ans, a porté pour le couple sont considérés comme étant ceux de Mme Muli. « Elle est à moi, et le devoir de mon mari était uniquement de [concevoir] les enfants avec elle », a dit Mme Muli.
Bien que l’arrangement soit considéré comme une réussite, puisqu’il y a eu des enfants, il a eu des conséquences désastreuses : Mme Nthenya est séropositive, tandis que le mari de Mme Muli est mort il y a 18 mois d’une tuberculose, l’une des principales infections opportunistes liées au VIH/SIDA. Mme Muli elle-même tousse en permanence, mais attribue cela à un simple symptôme de son vieil âge.
« Je couchais avec lui et il couchait aussi avec sa vraie femme ; nous n’utilisions pas de préservatif », a dit Mme Nthenya. « J’ai le VIH, maintenant, et je sais que je l’ai attrapé ici, par cet homme ».
D’après le docteur John Lugedi, responsable médical du district de Kitui, la tradition des femmes de substitution est un facteur qui contribue de manière significative à la propagation du VIH dans cette zone.
« Les risque de ce genre de culture sont très élevés parce que les gens impliqués n’utilisent pas de préservatif », a-t-il dit. « Les hommes ne veulent pas croire que les problèmes [d’infertilité] puissent venir d’eux et ils continuent [à essayer d’avoir des enfants avec d’autres femmes], espérant avoir de la chance un jour. Le résultat est une chaîne de gens infectés dans le processus ».
Il a noté que les niveaux élevés de pauvreté à Kitui, où plus de 60 pour cent des populations vivent avec moins d’un dollar par jour, avaient permis à cette tradition de prospérer. Les femmes deviennent mères porteuses parce qu’elles savent que tant qu’elles porteront des enfants, leurs besoins essentiels seront couverts par les familles dans lesquelles elles vivent.
« Lorsqu’on laisse la pauvreté se mélanger avec des [pratiques] culturelles aussi risquées, le résultat peut être dévastateur dans la guerre contre le VIH/SIDA », a ajouté M. Lugedi.
« La plupart des veuves et des orphelins que nous soutenons dans le district sont [le résultat] de ce genre d’arrangements conjugaux », a dit Liz Mwendwa, coordinatrice d’une organisation non gouvernementale locale, Arms of Hope. « Il faut focaliser la sensibilisation sur l’éradication de cette pratique, ou chercher des moyens sûrs de la [maintenir], mais je pense qu’il serait vain de promouvoir l’utilisation du préservatif quand le but ultime est d’avoir des enfants ».
Bien que le taux de prévalence du VIH à Kitui, estimé à 3,9 pour cent, soit près de moitié inférieur au taux national de 7,4 pour cent, les facteurs de risque VIH sont élevés. La pauvreté et les pénuries alimentaires peuvent contraindre les femmes au travail du sexe, et le climat aride de la région oblige de nombreux hommes à passer de longues périodes de temps loin de chez eux, comme travailleurs migrants.
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