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L’abus d’opium nuit à la santé des femmes et des enfants

Sadaf a commencé à consommer de l’opium il y a sept ans parce qu’elle n’avait pas pu trouver de médicaments pour soulager un mal de tête qui la faisait souffrir depuis plusieurs semaines.

« Lorsque j’ai fumé de l’opium pour la première fois, j’ai eu des vertiges pendant un moment, mais je n’avais plus de migraine – alors, j’ai continué », a confié à IRIN cette jeune femme, qui élève ses quatre enfants dans le district de Yamgan de la province du Badakhshan, dans le nord-est de l’Afghanistan.

Sadaf fume de l’opium produit dans la région. Elle en consomme trois fois par jour à l’aide d’un petit narguilé, ses enfants blottis autour d’elle. Dans l’atmosphère enivrante de la hutte de terre envahie par la fumée d’opium, pas un mot ne sort de la bouche des enfants, au contraire, ils ont l’air hébétés et silencieux.

Sadaf saisit la tête de son fils de quatre ans, qui souffre d’une pneumonie, et lui souffle un filet de fumée dans la bouche, puis une seconde bouffée sur le visage. « Je fais ça pour le calmer et faire en sorte qu’il dorme paisiblement », explique Sadaf, pour justifier son geste.

Selon Fanila Zaki, une professionnelle de la santé du Badakhshan, de nombreux enfants souffrent de graves maladies respiratoires, provoquées par une exposition fréquente à la fumée d’opium.

« Certaines mères pensent que lorsque leurs enfants ne pleurent pas et qu’ils dorment, cela signifie qu’ils vont bien », a expliqué Mme Zaki, « mais c’est tout simplement faux et trompeur ».

Taux élevé de mortalité maternelle

En Afghanistan, quelque 1 600 mères meurent en couches sur 100 000 naissances, l’un des taux de mortalité maternelle les plus élevés au monde, selon plusieurs représentants du Fonds des Nations unies pour la population (UNFPA) à Kaboul.

Au Badakhshan, 6 500 mères sur 100 000 meurent en couches – le taux de mortalité maternelle le plus élevé au monde, toujours d’après l’agence.

La consommation excessive d’opium ne fait qu’aggraver la situation, estiment les spécialistes. Les femmes qui consomment de l’opium pendant la grossesse perdent beaucoup d’énergie et deviennent vulnérables à diverses maladies, selon le service provincial de la santé.

« La plupart des mères dépendantes souffrent d’asthme, de toux et de problèmes pulmonaires, qui les affaiblissent énormément de sorte qu’elles sont moins en mesure d’assumer le fardeau de la grossesse », a révélé un professionnel de la santé de la région.

Selon plusieurs professionnels de la santé, certaines mères dépendantes se privent également de la chance de retomber enceintes parce que la dépendance à l’opium endommage leur utérus.

Poids financier

Pour de nombreux foyers défavorisés, la dépendance à l’opium a également de lourdes conséquences financières puisqu’elle les plonge encore davantage dans la pauvreté et l’insécurité sociale.

« Ces sept dernières années, j’ai dépensé chaque jour 200 afghanis [quatre dollars] pour m’acheter de l’opium. J’ai vendu mes terres pour financer ma dépendance », a déclaré Bibi Mullah, une autre femme dépendante.

Au Badakhshan, l’une des provinces afghanes les plus isolées, les moins développées et les plus touchées par la pauvreté, le terrain est accidenté, ce qui empêche les déplacements dans ces districts peu peuplés.

Il n’existe pas de données officielles sur le nombre de toxicomanes que compte le Badakhshan. Néanmoins, selon l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), un million de personnes souffrent de problèmes de dépendance à la drogue en Afghanistan, dont 45 000 sont des femmes.

Des services de santé insuffisants

D’après Mohammad Alim Yaqoobi, directeur des bureaux de l’ONUDC au Badakhshan, une majorité de la population du Badakhshan n’a pas accès à des services de santé et n’est pas consciente des dangers de la dépendance à l’opium.

« Les gens ont tendance à consommer l’opium comme analgésique. Ils mettent du temps à se rendre compte que l’opium lui-même est en fait une maladie et qu’ils en sont dépendants », a poursuivi M. Yaqoobi.

A en croire certains habitants du district, si des services de santé étaient disponibles, ils ne consommeraient pas d’opium pour remplacer les médicaments.

A Yamgan comme dans beaucoup d’autres districts du Badakhshan, les ânes sont le seul moyen de transport des populations locales. Il faut deux jours aux habitants du village de Jokhan, dans le district de Yamgan, pour parvenir au centre médical le plus proche, à pied ou à dos d’âne. L’opium est donc considéré comme une option facilement disponible.

L’ONUDC s’efforce de sensibiliser les populations du Badakhshan aux risques liés à la dépendance à l’opium.

Néanmoins, étant donné le taux d’analphabétisme élevé constaté chez les quelque 900 000 habitants du Badakhshan, il est très difficile d’entretenir une campagne d’information publique efficace. Et quelque 3 730 fumeurs d’opium traités au Badakhshan ont recommencé à consommer peu après leur cure de désintoxication, selon l’ONUDC.

mp/ad/at/ar/cb/nh/ads/ail

[Cet article est également disponible en dari et en pashto sous forme d’histoire radiophonique sur la Page Radio d’IRIN, rubrique Afghanistan.]


This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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