Le nombre de viols « augmente de manière alarmante », a déclaré Loïs Bruthus, présidente de l’Association des femmes juristes du Liberia (AFELL). « Chaque jour, nous recevons jusqu’à six victimes de viol dans nos bureaux ».
Selon un rapport étude publié jeudi par International Crisis Group, une ONG spécialisée dans la prévention des conflits, les cas de viols seraient en constante augmentation dans les camps de déplacés au Libéria, en particulier les viols sur mineurs.
Mais la guerre ayant détruit les structures et les archives de l’Etat, les cas enregistrés se basent sur des faits rapportés.
Les viols et abus sexuels étaient une pratique courante pendant les années de guerre civile au Liberia, un conflit qui a pris fin en 2003 et au cours duquel beaucoup de jeunes filles et des femmes ont servi de cuisinières, de femmes de ménage et esclaves sexuels aux combattants. Avant la loi votée en décembre dernier, seul le viol en réunion était considéré comme un délit.
Mais aujourd’hui, force est de constater que malgré le vote de cette loi et la promesse de la présidente Ellen Johnson Sirleaf qui déclarait, «plus personne ne violera nos filles et femmes en pensant s’en tirer à bon compte », les poursuites judiciaires pour viol sont désespérément lentes, affirme l’ONG.
Une campagne d’information et de sensibilisation accompagnée de jingles radio et de mélodies faciles à mémoriser a été lancée pour promouvoir la nouvelle loi sur le viol. Mais pour Chi Mgbako, analyste au sein de Crisis Group, la loi devrait être mieux appliquée.
« Cette nouvelle loi a suscité beaucoup d’intérêt, et si elle n’est pas plus largement diffusée dans le pays, les hommes et les femmes ne connaîtront pas les nouveaux droits des femmes. Nous ne devons pas nous contenter de saluer l’adoption de la loi sur le viol, nous devons également la mettre en application » a expliqué Mg.
Selon Mme Bruthus de l’AFELL, les tribunaux libériens mettent du temps à instruire les affaires de viol. Sur 110 affaires de viols qui ont fait l’objet d’une instruction judiciaire, seules cinq vont passer en jugement, et, selon AFELL, la procédure est si lente qu’elle perd toute valeur aux yeux des victimes.
Pour l’ONG Crisis Group, beaucoup de victimes de viol n’ont pas accès à la justice. Les chefs traditionnels sont souvent le seul recours pour les femmes, mais beaucoup d’entre eux hésitent à s’impliquer dans ce genre d’affaires.
« Les membres des communautés considèrent souvent que le viol et les autres formes de violences sexuelles sont des affaires qui doivent être traitées en privé, en dehors du système judiciaire », a indiqué le rapport de Crisis Group, Liberia : Resurrecting the Justice System – Restaurer le système judiciaire.
Afin d’accélérer les procédures judiciaires, Mme Bruthus recommande la mise en place d’une Cour spéciale qui ne jugerait que des affaires de viol.
« Nous avons demandé au parlement de créer une Cour chargée des affaires de viol étant donné que les autres tribunaux mettent trop de temps à les juger », a déclaré Mme Bruthus.
Les parlementaires libériens ont promis à l’AFELL qu’ils examineront la possibilité de voter pour la création d’une telle Cour.
« L’AFELL a des préoccupations légitimes que nous, en tant que législateurs, devons prendre en compte », a déclaré Edwin Snowe, Président du parlement libérien.
Selon le rapport de Crisis Group international, la réforme du système judiciaire du pays, et notamment le procès et les poursuites contre les violeurs, doit être une priorité du nouveau gouvernement et des bailleurs de fonds s’ils veulent mettre un terme à la culture de l’impunité.
« Après 14 années de guerre civile, le système judiciaire est entièrement désorganisé. C'est la culture de l’impunité qui prévaut actuellement … ».
This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions