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Les casques bleus se retirent, mais « la paix semble bien fragile »

La plus importante opération de maintien de la paix menée à ce jour par les Nations unies est sur le point de s’achever et malgré le succès incontestable de cette mission, la Sierra Leone est encore au début d’un long processus de reconstruction.

« Si vous imaginez que les forces de la MINUSIL (Mission des Nations unies en Sierra Leone) étaient déployées sur toute l’étendue du territoire sierra léonais comme un magnifique tapis de protection et qu’il est temps à présent de le retirer, je ne vous garantis pas que ce vous trouverez en dessous sera particulièrement beau », a déclaré Daudi Ngelautwa Mwakawago, le chef de la MINUSIL.

Dans le village de Goderich, à la périphérie de Freetown, la capitale, les casques bleus plient bagages en prévision du départ de la MINUSIL, fin décembre, après qu’elle ait restauré la paix dans un pays ravagé par dix années de guerre civile.
« La paix a été rétablie », déclare le capitaine Parvez Chowdhury, du cinquième bataillon des 8000 casques bleus bengladeshis déployés en Sierra Leone.

« Nous craignions certains incidents, notamment des pillages, lorsque nous avons commencé à nous retirer, mais il ne s’est rien passé, même dans les coins les plus reculés », ajoute-t-il, tandis que ses hommes démontent les structures temporaires érigées cinq ans auparavant.

[Sierra Leone] Bangladeshi peacekeepers leave sierra leone as UNAMSIL closes down. [Date picture taken: 12/06/2005]
Départ des casques bleus bangladais

Pendant la guerre civile, de 1991 à 2002, des groupes de jeunes combattants drogués – dont beaucoup étaient encore des enfants à peine assez grands pour porter leurs fusils AK-47 - ont fait régner la terreur dans les villages en mutilant les villageois.

La guerre a fait 20 000 morts, des milliers de mutilés et déplacé près de la moitié des cinq millions d’habitants que compte le pays, selon le gouvernement.

Les atrocités de cette guerre ont choqué le monde entier, poussant les Nations unies à mettre sur pied une force de maintien de la paix composée de 17 500 hommes. Les premiers contingents de casques bleus ont foulé le sol sierra léonais en octobre 1999, dans le but de rétablir l’autorité de l’Etat et organiser le désarmement et la démobilisation des combattants.

Et ces opérations ne se sont pas faites sans difficultés. Au début de leur mission, les forces de l’ONU on été confrontées à de sérieuses difficultés pour récupérer les territoires sous contrôle des rebelles. Ainsi, pendant 10 jours, entre fin avril et début mai 2000, plus de 700 casques bleus furent enlevés par de jeunes rebelles membres du Front Révolutionnaire Uni (RUF).

Et en août 2000, des miliciens du West Side Boys ont pris en otage 11 soldats anglais, poussant la counauté internationale à organiser une opération de sauvetage et éliminer le groupe de combattants.

A Goderich, les villageois ont de la peine à voir partir les casques bleus bengladais qu’ils surnomment affectueusement «les Banglas».

« Je suis heureux qu’ils aient ramené la paix dans notre pays », déclare à IRIN Ibrahim Diallo, un jeune mécanicien au chômage. « Maintenant, on peut se promener partout. Pendant la guerre, on ne pouvait pas aller où on voulait ».

Au cours de ses cinq années de présence en Sierra Leone, la MINUSIL a désarmé et démobilisé plus de 72 000 combattants et collecté et détruit plus de 30 000 armes, explique M. Mwakawago, le chef de mission.

La MINUSIL a aussi formé une nouvelle force de police. 9 200 agents de police ont été entraînés, et d’ici février, les forces de l’ordre compteront 9 500 hommes, ce qui correspond à leurs effectifs d’avant-guerre.

« Nous avions pour mission d’aider le gouvernement à rétablir son autorité sur l’ensemble du pays », explique M. Mwakawago. « Nous avons atteint cet objectif. Il n’existe plus de zone de non droit et le gouvernement exerce un contrôle total sur son territoire ».

[Sierra Leone] SRSG Daudi Ngelautwa Mwakawango hands over barracks to Sierra Leone Deputy Defence minister Joe Blell. [Date picture taken: 12/06/2005]
Chef de la MINUSIL, Daudi Ngelautwa Mwakawago, signant un document marquant la remise officielle d'un pont au vice ministre sierra léonais de la Défense, Joe Blell

Les villageois de Goderich ont organisé une cérémonie d'adieu pour remercier leurs amis bangladais. Abdoulaye Mohamed Bah, l’imam du village voisin de Toke, s’est également déplacé.

« Ils ont construit quatre salles de classe, fourni des livres à la mosquée, des soins gratuits et de la nourriture pour les enfants », déclare-t-il à IRIN.

La force internationale laisse derrière elle des écoles, des hôpitaux, des cliniques, des laboratoires et des ponts récemment construits qui ont été remis au gouvernement à l’occasion de petites cérémonies protocolaires.

La MINUSIL a également permis au gouvernement de reprendre le contrôle des mines de diamant du pays, qui ont été l'un des enjeux de la guerre civile.

Grâce à l’action de la MINUSIL, les revenus que le gouvernement tire de la vente officielle des diamants sont passés de 10 millions de dollars américains en 2000 à 130 millions en 2004, et ils pourraient atteindre les 200 millions en 2005, selon M. Mwakawago.

Ces résultats ont été obtenus grâce à la formation, l’embauche de gardiens de mines, au renforcement des forces de police et des patrouilles. Mais seuls 50 pour cent des exploitations de diamant sont sous contrôle gouvernemental, précise Mwakawago.

« Si le gouvernement continue à appliquer ces mesures, en les renforçant ici et là, d’ici deux ou trois ans il devrait gagner bien plus que ce qu’il perçoit aujourd’hui », ajoute-t-il.

La MINUSIL part, mais l'ONU continue d'apporter son soutien à la Sierra Leone

La MINUSIL sera remplacée par le Bureau intégré des Nations unies en Sierra Leone (UNIOSIL) fort de 300 hommes, conformément à une résolution du Conseil de sécurité votée cette année.

L’UNIOSIL aura beaucoup à faire pour promouvoir la culture de la sécurité et de la paix. Il devra notamment mener la Sierra Leone vers des élections libres et justes en 2007 et apporter une assistance technique à l'un des pays les plus pauvres de la planète, selon les Nations unies.

« La paix a été rétablie, mais elle semble bien fragile. Aujourd’hui, les gens peuvent dormir et se réveiller tranquillement, mais le problème est qu’ils ne savent pas quand et comment ils pourront s’offrir un repas », a déclaré Mwakawago.

Près de 75 pour cent des Sierra léonais vivent avec moins de deux dollars par jours, et un quart de la population n’a pas les moyens de se nourrir correctement, selon la Banque mondiale.

[Sierra Leone] Teens in a poor suburbs of Freetown, Nov 2004.
Il y a un très fort taux de chômage chez les jeunes

Les deux tiers de la population sont analphabètes et le taux de chômage est d’environ 70 pour cent, avec deux millions de jeunes sans emploi, dont un grand nombre d’ex-combattants qui pourraient reprendre les armes si leur situation ne s'aéliore pas.

Le fort taux de chômage et le peu d'espoir en un avenir meilleur sont quelques-unes des principales causes d’instabilité en Afrique de l’Ouest, selon un rapport du Bureau des Nations unies pour l’Afrique de l’ouest (UNOWA) publié en décembre.

« La paix que nous avons contribué à restaurer doit être mise à profit pour créer des emplois, assurer des revenus, promouvoir l’éducation et les soins de santé pour tous », martèle M. Mwakawago.


This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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