Le rapport indique qu’indépendamment des facteurs liés au délabrement de l’administration congolaise, l’absence de pièces d’identité et le non enregistrement des enfants pygmées dans le registre d’état civil est l’expression de la négligence et du manque de considération manifeste des autorités congolaises à l’égard de cette minorité.
Bétail électoral
"Le gouvernement ne juge pas utile d’envisager des mesures pouvant faciliter l’obtention de pièces d’état civil à cette couche minoritaire et vulnérable de congolais ou à élaborer un programme de sensibilisation pour inciter les pygmées à se faire enregistrer ou se faire délivrer des cartes nationales d’identité," a commenté Roch Euloge Nzobo, responsable du département juridique à l’Ocdh. Les pièces d’état civil sont les principaux documents réunissant les éléments de la personnalité juridique, a expliqué le rapport. D'un point vue légal, ces milliers de pygmées ne sont donc pas reconnus par l’Etat congolais, a conclu le rapport.
"Curieusement, pendant les élections de l’année écoulée, la quasi-totalité des pygmées en âge de voter l’ont fait. Les agents recenseurs leur ont attribué des cartes d’électeur sans leur exiger une quelconque pièce d’identité. C’est donc pour les besoins de la cause que les pygmées ont pu obtenir des cartes d’électeurs. En outre, les bantous [l’ethnie majoritaire] qui se battaient pour un mandat électif n’ont pas pris la peine de rencontrer personnellement des pygmées au cours de leur campagne. C’était tout simplement du bétail électoral," a ajouté M. Nzobo.
Viols fréquents
Certains bantous, dénonce encore le rapport, profitent de leur cohabitation avec les pygmées pour abuser de leurs droits. Toutes les semaines, une femme pygmée est violée par des bantous à Ngoua 2, un village situé à 200 km de Dolisie, chef-lieu du département du Niari au sud du Congo.
Ces viols fréquents se déroulent dans les champs, au village et même dans les cases de ces pygmées. Les violeurs n’hésitent pas à opérer en présence des époux de leurs victimes, a précisé le rapport.
"Il y a aussi dans la localité des cas de viols collectifs aussi bien dans la forêt qu’au poste de police géré par des ex-miliciens affectés là pour y jouer le rôle d’agents de l’ordre," a souligné M. Nzobo.
Le rapport a encore dénoncé "l’esclavagisme" dont était victime cette minorité de la part des Bantous.
Presque des esclaves
Les bantous utilisent les services des pygmées dans les domaines de la chasse, de la pêche et de l’agriculture. En contrepartie, les pygmées reçoivent une somme d'argent dérisoire. Un pygmée peut, en tout et pour tout, recevoir au sortir d’une partie de chasse qui a rapporté dix gibiers, un vieux pantalon comme gain, a affirmé le rapport.
L’Ocdh a également déploré un niveau de santé communautaire alarmant chez les pygmées ainsi qu’une éducation scolaire victime des coutumes locales et de l’abandon de l’Etat.
Parmi les recommandations faites aux pouvoirs publics, l'Ocdh préconise l’élaboration et la mise en œuvre d’un programme national pour le développement culturel et économique de la minorité pygmée; la mise en œuvre d’un programme spécial de développement sanitaire en faveur des communautés pygmées par la création d'infrastructures de santé à proximité de leurs villages.
L’Ocdh a aussi demandé à la communauté internationale d’encourager le vote d'une loi par le Congo visant le renforcement des droits de la minorité. La communauté internationale a également été sollicitée pour accroître la capacité opérationnelle des organisations de défense et de protection des droits de l’homme en général et de celles spécifiques à la minorité.
This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions