“Quand on pose des questions sur la sexualité et le sida, les adultes nous coupent la parole, ils disent seulement qu’il faut faire comme ci et comme ça, alors on ne demande plus rien et on fait comme on peut”, a regretté un jeune participant au Forum de la jeunesse organisé du 1er au 3 décembre dans la capitale nigériane.
Ce forum, qui a réuni des centaines de jeunes Africains venus de différents pays du continent, se tenait en prélude à la 14ème Conférence internationale sur le sida et les maladies sexuellement transmissibles en Afrique, la Cisma, organisée à Abuja du 4 au 9 décembre.
Selon le rapport sur l’état de l’épidémie en 2005, rendu public par le Programme commun des Nations unies sur le sida, Onusida, en novembre, les jeunes représentent la moitié des plus de trois millions de nouvelles infections enregistrées cette année en Afrique.
Or la peur de la réaction de leurs aînés, les tabous, la honte, l’absence de centres d’accueil et d’écoute pour les jeunes ont été cités à plusieurs reprises par les participants au forum comme des barrières les empêchant de s’informer sur la sexualité et sur le sida.
“Apres avoir perdu ma virginité, mes règles sont devenues plus abondantes”, a raconté une jeune fille sous couvert d’anonymat. “Je ne savais pas si c’était normal ou pas mais comme je n’étais pas mariée, c’était impossible de demander à ma mère. J’aurais aimé pouvoir poser la question à une jeune qui ne me jugerait pas. Mais il n’y avait personne”.
Face à cette demande grandissante, des organisations ont opté pour la formation de jeunes éducateurs, chargés de sensibiliser leurs pairs sur le VIH/SIDA pour répondre à leurs questions, les amener à prendre conscience du risque d’infection et à s’en protéger.
Au Mali, le “grain”, le rassemblement par petits groupes à l’heure du thé, peut constituer un moment propice pour engager le dialogue et toucher des jeunes de tous les milieux.
“Nous identifions des groupes de jeunes et nous engageons la conversation, d’abord sur des sujets de santé assez larges, puis sur la contraception et enfin sur le VIH”, a expliqué Bréma Traoré, chef d’équipe d’un projet financé par le Fonds des Nations unies pour la population (Fnuap) à Bamako, connu dans la capitale malienne sous le nom de ‘projet jeunes’.
L’idée est de “semer la curiosité chez les jeunes sur le sida et de le démystifier”, a ajouté Fodé Camara, président du club des pairs-éducateurs de ce projet. “Beaucoup décident ensuite d’aller se faire dépister mais certains ont peur et nous demandent de les accompagner, alors nous le faisons”.
Aider les jeunes au lieu de les juger
Mis en confiance, les jeunes osent parler, ce qui permet aux éducateurs d’approfondir leurs connaissances souvent approximatives, voire erronées, sur le VIH/SIDA.
“Un jeune a dit un jour que si on n’avait pas de préservatif, on pouvait se ‘couvrir’ avec un bout de sac en nylon, on a tous ri mais on a pu bien discuter”, a raconté Taiwo Adebayo, fondatrice de l’ONG nigériane Youth Development Network à Sokoto, dans le nord-ouest du Nigeria, qui forme également de jeunes pairs-éducateurs.
Dans des sociétés africaines majoritairement patriarcales, où les femmes et les filles n’ont souvent pas le choix de leur sexualité et sont plus exposées à l’infection au VIH que les hommes, les pairs-éducateurs font de leur mieux pour aider les jeunes filles à se protéger.
“On propose par exemple à une fille de parler en public lors d’une séance de sensibilisation”, a expliqué la jeune Taiwo. “Elle commence souvent la tête baissée ou dos au public et, séance après séance, elle prend confiance en elle : cela agit indirectement sur sa conviction qu’elle peut négocier sa vie sexuelle”.
Parce que les jeunes connaissent la psychologie des jeunes, affirme Taiwo, ils savent comment s’y prendre, pour rassurer ceux qui ne sont pas encore sexuellement actifs “qu’ils connaîtront eux aussi l’amour physique mais qu’ils ont encore du temps pour ça” ; pour distribuer discrètement aux autres des préservatifs, “sans jamais les juger et en laissant toujours la porte ouverte pour qu’ils reviennent en cas de problème”.
Mais pour que tout ce travail ait réellement un impact sur la propagation du virus parmi les jeunes, il faut absolument mettre en place des centres de dépistage du VIH, de conseil et de prise en charge “amicaux pour les jeunes”, où ils ne craindraient pas le regard désapprobateur de leurs aînés, ont estimé de nombreux participants au forum.
C’est également le point de vue de Uwen Esiet, de l’ONG nigériane Action Health Inc, spécialiste des questions de santé de la reproduction.
“Les jeunes n’ont pas besoin d’être jugés mais d’être aidés pour qu’ils réalisent leurs rêves et qu’ils comprennent que le risque d’infection au VIH n’est pas aussi éloigné qu’ils le pensent. Pour cela il faut les écouter et les guider, pas les rendre honteux ou coupables”.
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