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Les musulmans parlent pour vaincre les tabous sur le VIH/SIDA

[Cote d'Ivoire] Hundreds of Muslim women attending an AIDS awareness campagn in Abidjan, Cote d'Ivoire, May 2005. IRIN
De nombreuses femmes musulmanes sont illettrées et donc plus exposées à l’infection au VIH.
Les musulmans s’interrogent sur la position de l’Islam face à l’épidémie de VIH/SIDA et leurs responsables en Côte d’Ivoire ont décidé de leur répondre, sans détour ni tabous, au cours d’une campagne d’information d’envergure qui touchera sept communes de la capitale économique ivoirienne. Initiée par la Coordination des musulmans d’origine nigériane et d’adoption en Côte d’Ivoire (Comonaci), cette campagne a débuté le 10 avril dans la commune du Plateau et se déroule chaque dimanche dans un quartier différent d’Abidjan. “Un grand nombre parmi vous pense que le VIH/SIDA n’existe pas, d’autres pensent que parler de cette maladie qui est en rapport avec la sexualité – excusez-moi – est tabou”, a expliqué Mufutahu Saka au public réuni dans la salle des mariages de Treichville, un quartier populaire d’Abidjan. “Nous avons organisé ce programme pour sauver des vies”, a poursuivi ce responsable de la Comonaci devant la centaine de personnes, hommes et femmes, qui était venue assister à cette séance d’information du dimanche soir. Avant d’aborder le thème central de la discussion, “L’Islam face au sida”, les femmes et les hommes ont dit une prière commune, pour demander à Allah “qu’il éloigne le sida de l’humanité”. Les conférences organisées lors de cette campagne, destinée en premier lieu aux musulmans d’origine nigériane, sont données en langue Yoruba mais aussi en Français, pour être accessibles aux autres musulmans vivant en Côte d’Ivoire. “Le sida concerne tout le monde, il affecte aussi les croyants qui ne savent pas s’en prémunir”, a dit Cissé Djiguiba, l’imam de la mosquée du quartier du Plateau lors du lancement de la campagne le 10 avril. “Même des imams sont séropositifs!”. Mamadou Ganyou, un technicien de 25 ans, a déjà assisté à plusieurs conférences sur le sida. Ce célibataire “à la recherche de la femme idéale” a dit avoir été particulièrement attiré par la campagne d’information de la Comonaci lorsqu’elle a été annoncée sur les ondes de la radio Al Bayane de l’imam Djiguiba. C’est la première fois qu’il entendait parler du sida au sein de la communauté musulmane. “Pour une fois, ceux qui parlent du sida sont des gens de notre religion et de notre culture”, a dit Ganyou à PlusNews lors de la séance d’information à Treichville. “Nous sommes dans un monde en danger, donc le croyant doit avoir un comportement différent. Mais pour cela il faut connaître les voies à suivre”, a-t-il dit. “Vous ne serez pas une courroie de transmission du sida” Amener les leaders musulmans à attirer l’attention des fidèles sur la gravité de l’épidémie dans un pays où la propagation du virus est alarmante, tout en donnant aux croyants des réponses sur la position de l’Islam face à ce fléau font justement partie des objectifs de la campagne, selon Wahabi Oyelade, secrétaire du Comonaci. L’imam Djiguiba s’est volontiers plié à l’exercice, expliquant à l’auditoire que “la religion musulmane préconise les relations sexuelles dans le cadre du mariage et vous demande l’abstinence pendant votre jeunesse”. “Vous serez soumis au test de dépistage avant le mariage et vous ne serez pas une courroie de transmission du sida”, a poursuivi le chef religieux. A Treichville, l’imam Alimi Miftahudeen a insisté sur le fait que le “sida comme d’autres maladies, existe dans le saint Coran, en parabole”, sans donner plus de détails. Il intervenait sur le thème ‘Musulman face au sida, quel comportement ?’. Les moyens de se prémunir de l’infection au VIH ont aussi été évoqués lors de ces conférences. “Le préservatif est un moyen pour ceux qui s’adonnent à la débauche, mais si dans un couple on constate qu’un conjoint est malade, le préservatif est aussi conseillé”, a dit l’Imam Miftahudeen. C’était la première fois que cet imam parlait du sida à des fidèles. “Ce n’est pas gênant pour moi, je n’ai pas de complexe puisque c’est pour sauver des vies”, a-t-il expliqué à PlusNews. Selon Djiguiba, il est regrettable que de nombreux fidèles enfreignent les préceptes divins mais que l’on ne parle du sida qu’au moment de leurs obsèques. “Nous souhaitons maintenant sensibiliser les gens tant qu’ils sont vivants”, a dit Djiguiba à l’assistance. “Il faut utiliser les préservatifs, mais ce n’est pas une excuse pour commettre des pêchés. Si vous avez le virus, venez nous voir pour qu’on vous aide avec des versets”. Pour évoquer les modes de transmission du virus et les moyens de s’en protéger, les conférenciers ont choisi leurs mots avec précaution, pour ne pas choquer et pour traduire des notions scientifiques qui n’existent pas toujours en langue Yoruba. Lors de son intervention sur le thème “Le sida, c’est quoi même ?”, le professeur de médecine Salami Kassanyou a dû recourir à des images pour expliquer ce qu’était un virus et des globules, utilisant par exemple la notion plus connue de ‘microbes’. “Le musulman séropositif, que doit-il faire?” Avide d’informations sur cette épidémie qui l’inquiète, Fatoumata Nassirou, étudiante et jeune mariée enceinte de son premier enfant, s’est rendue à Treichville pour suivre les débats. “Je voulais avoir des informations nouvelles sur le sida et surtout savoir comment l’Islam aborde le sujet”, a-t-elle expliqué. Auditrice assidue des émissions de santé à la radio, notamment ‘Espace santé’ diffusée par la radio musulmane Al Bayane, Nassirou a estimé qu’il était nécessaire de s’informer, d’autant plus que de nombreuses femmes musulmanes sont illettrées et donc plus exposées à l’infection au VIH. “Beaucoup de nos parents illettrés ne comprennent pas l’Islam, ils pensent qu’on ne doit pas parler du sida” a-t-elle regretté. “Quand vous regardez la télé, on vous dit que si vous êtes séropositif et que vous n’avez plus d’espoir, il faut donner votre vie à Jésus. Et le musulman que doit-il faire? Les émissions islamiques ne parlent jamais de sida!”, a ajouté Nassirou. Soutenus par le Conseil supérieur des imams, le Conseil national islamique et le ministère de la Lutte contre le sida, les programmes de la Comonaci ne bénéficient d’aucune subvention, selon Saka, le secrétaire de l’organisation. “Notre plus grand défi, c’est de réussir à intéresser le maximum de musulmans aux programmes de lutte contre le sida”, a-t-il expliqué. Selon Saka, la Comonaci n’a pas encore eu l’affluence escomptée lors des séances de sensibilisation dans les quartiers du Plateau, de Koumassi, d’Adjamé et de Treichville, mais il espère avoir plus de succès dans le plus grand quartier musulman d’Abobo lors de la clôture de la campagne le 21 mai. L’organisation envisage désormais un autre programme pour former des imams à la sensibilisation sur le VIH/SIDA, dans un pays où les dernières études réalisées par des organisations humanitaires révèlent une hausse alarmante du nombre des infections sexuellement transmissibles et des infections au VIH. Selon ces études, la situation est particulièrement critique dans le nord à majorité musulmane du pays sous contrôle rebelle, où les structures sanitaires sont quasi inexistantes depuis le coup d’Etat manqué de septembre 2002 et la partition du pays, le sud étant contrôlé par les partisans du président Laurent Gbagbo. Une enquête nationale est en cours pour déterminer le taux de prévalence, estimé à sept pour cent avant 2000.

This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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