« Des progrès considérables ont été accomplis [dans la lutte contre le sida], mais 2010 est aussi un moment où nous avons de profondes inquiétudes », a dit lors de la cérémonie d’ouverture, Hakima Himmich, présidente de cette conférence qui réunit quelque 1 500 participants – dont près de la moitié d’Afrique - venus d’une cinquantaine de pays francophones dans le monde et qui se tient, pour la première fois depuis sa création en 2001, sur le continent africain.
Fin 2008, plus de quatre millions de personnes vivant avec le VIH dans le monde avaient accès au traitement antirétroviral (ARV) dans le monde et les progrès scientifiques ont permis de réduire quasiment à néant le risque de transmission du virus de la mère à l’enfant. Pourtant, l’épidémie est loin d’être éradiquée : seulement 42 pour cent des personnes qui auraient besoin de traitement en reçoivent effectivement et pour deux personnes mises sous traitement, cinq autres sont infectées, selon le Programme commun des Nations Unies sur le sida (ONUSIDA).
« 2010 est une année décisive : nous nous trouvons aux deux tiers du chemin vers les Objectifs du millénaire pour le développement et c’est l’année de reconstitution des fonds du Fonds mondial », a dit Michel Kazatchkine, directeur exécutif du Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme, lors d’une conférence de presse.
La mise en œuvre des nouvelles directives de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), qui préconisent entre autres un démarrage plus précoce du traitement ARV, impliquent que pour atteindre une couverture de 85 pour cent des besoins en ARV des personnes infectées, il faudrait augmenter les financements actuels d’au moins 57 pour cent, a dit Teguest Guerma de l’OMS, lors d’une session de la conférence, et cette augmentation devrait se maintenir sur plusieurs années. Pour la période 2008-2010, le Fonds mondial a récolté environ 10 milliards de dollars.
« On sait maintenant que quand on donne des traitements, on empêche le virus de se multiplier et de se transmettre : s’il n’y a plus de virus dans les fluides corporels, l’épidémie s’arrête, c’est mathématique » |
Les progrès de la science rendent aujourd’hui possible ce qu’il n’était pas permis d’espérer il y a encore quelques années, a rappelé Christine Katlama, présidente de l’AFRAVIH (Alliance francophone des acteurs de santé contre le VIH), organisatrice de la conférence de Casablanca. « On sait maintenant que quand on donne des traitements, on empêche le virus de se multiplier et de se transmettre : s’il n’y a plus de virus dans les fluides corporels, l’épidémie s’arrête, c’est mathématique ».
Mais avec la crise financière et économique mondiale, certains pays donateurs ont commencé à remettre en cause leurs engagements dans la lutte contre l’épidémie. « 2010 devait être l’année de l’accès universel, mais c’est celle où les donateurs vont décider de laisser repartir l’épidémie », a dit Henri Mukumbi, directeur de l’organisation non gouvernementale AMO-Congo en République démocratique du Congo.
Pour Françoise Barré Sinoussi, prix Nobel de médecine 2008, « il n’est pas acceptable que nous, les chercheurs, nous soyons tellement investis pour que des traitements existent et qu’ils ne soient pas disponibles pour tous ».
Or tout cela est « uniquement une question de choix politique », a dit à IRIN/PlusNews Philippe Douste-Blazy, président de l’initiative de facilité d’achat de médicaments UNITAID, appelant à la mise en place d’une « communauté de brevets » (patent pool, en anglais) – qui permettrait, moyennant le paiement de droits aux détenteurs des brevets, de fabriquer des médicaments récents à un coût abordable - et à la mise œuvre de financements innovants, tels que l’extension de la ‘taxe sur les billets d’avion’ aujourd’hui appliquée dans 16 pays et qui a rapporté 1,5 milliard de dollars depuis 2006, et l’instauration d’une taxe sur les transactions de change interbancaires de 0,005 pour cent qui rapporterait à elle seule 40 milliards de dollars par an, selon UNITAID.
Face à ces défis, la francophonie a un rôle à jouer, à condition qu’elle soit mieux représentée au niveau des instances de décision, ont plaidé plusieurs intervenants, M. Kazatchkine saluant « la vitalité de la réflexion stratégique et de la recherche dans l’espace francophone ». Selon l’ONUSIDA, quelque 340 000 des quelque 2,7 millions de nouvelles infections dans le monde en 2008 sont survenues dans l’espace francophone.
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