Les familles de centaines de personnes portées disparues pendant le conflit armé du Népal souhaitent obtenir des éclaircissements sur le sort de leurs parents victimes de disparition forcée.
Au cours des six dernières années, Ram Kumar Bhandari n’a ménagé aucun effort pour rechercher son père, Tej Bahadur, disparu depuis son arrestation en 2001 par les forces de sécurité gouvernementales qui le soupçonnaient d’être un sympathisant des rebelles maoïstes.
En 1996, les Maoïstes avaient déclenché un mouvement insurrectionnel contre le pouvoir en place pour mettre fin à la monarchie. Le conflit armé a pris fin en novembre 2006 après la signature d’un accord de paix entre les Maoïstes et le gouvernement de transition constitué par une coalition de sept partis politiques.
« Je n’abandonnerai pas si facilement mes recherches ; je continuerai de me battre contre l’injustice dont mon père a été victime », a confié à IRIN M. Bhandari.
Agé de 56 ans, son père était un enseignant de profession, un militant de gauche qui n’avait cependant aucun lien avec les Maoïstes, a affirmé M. Bhandari.
Entre 2000 et 2002, des pouvoirs spéciaux avaient été donnés aux forces gouvernementales népalaises qui pouvaient alors procéder à des arrestations de personnes sans pour autant avoir la preuve formelle de leur implication dans le mouvement des rebelles maoïstes.
« L’accord de paix n’aura aucun sens sans la résolution du problème des disparus, qui représente aujourd’hui un sujet d’importance capitale » |
« L’accord de paix n’aura aucun sens sans la résolution du problème des disparus, qui représente aujourd’hui un sujet d’importance capitale », a indiqué M. Bhandari, qui a créé l’association des personnes disparues dans son village du district de Lamjung, à environ 180 kilomètres au nord-ouest de Katmandou, la capitale.
D’après l’association, rien qu’à Lamjung, 28 personnes ont disparu pendant le conflit ; les forces gouvernementales auraient enlevé 26 d’entre elles, les rebelles maoïstes étant impliqués dans la disparition des deux autres.
Il n’existe pas d’information précise sur le nombre de personnes portées disparues pendant le conflit. Toutefois, d’après le ministère de l’Intérieur, elles seraient environ 600, alors que l’Association des familles de disparus, soutenue par les rebelles maoïstes, fait état de 1 200 cas de disparition.
Pour le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), qui détient un registre de 1 042 cas de disparition, le nombre réel des personnes disparues pourrait être supérieur à 3 000.
La majorité des victimes ont été enlevées par les forces de sécurité gouvernementales, alors que les rebelles maoïstes seraient responsables de la disparition de 1 065 personnes, ont indiqué les activistes de l’organisation Informal Sector Service Centre (INSEC), un groupe de défense des droits humains.
Photo: Naresh Newar/IRIN |
Les familles des personne disparues viennent constamment frapper aux portes du gouvernement pour exiger que justice soit rendue |
« La mobilisation politique autour de la question des personnes disparues a faibli », a expliqué à IRIN Jean-Paul Corboz, coordinateur de la mission de protection au CICR.
« Nous essayons de faire en sorte qu’elle redevienne un sujet de préoccupation national. Si nous ne réglons pas le problème des disparus népalais, il n’y aura pas de paix durable », a ajouté M. Corboz.
En attendant que justice soit rendue
Au ministère de la Paix et de la reconstruction, des hauts fonctionnaires ont affirmé à IRIN que tout était mis en œuvre pour résoudre ce problème, d’autant que plusieurs membres de leurs partis politiques ont également été victimes de disparitions forcées sous le règne autoritaire du roi Gyanendra.
« La plupart des cas de disparition n’ont pas été enregistrés, qu’il s’agisse de ceux dans lesquels les forces de sécurité ou les rebelles maoïstes sont impliqués. Il est donc très difficile de reconnaître officiellement le statut de ces disparus », a affirmé un responsable du gouvernement, sous le couvert de l’anonymat.
Quant aux chefs de la rébellion maoïste, ils entendent faire pression sur le gouvernement et sur le parlement pour les amener à résoudre le problème. Toutefois, ils ont réfuté les accusations selon lesquelles des cadres de leur mouvement seraient impliqués dans des disparitions forcées.
« Si nous ne réglons pas le problème des disparus népalais, il n’y aura pas de paix durable » |
« Peut-être que tous ces disparus sont morts, mais nous voulons voir les dépouilles. Nous voulons que justice soit rendue », a insisté Mukti Khanal, dont le frère, Hari Prasad, était lui aussi enseignant. Il y a cinq ans, il avait été arrêté par les forces armées népalaises en raison de son soutien au rebelles maoïstes, et depuis il n’a plus jamais été revu. L’armée a expliqué à Mukti Khana que son frère avait été abattu alors qu’il tentait de s’enfuir.
« Ce problème est si crucial qu’il ne peut pas être évacué aussi simplement », a indiqué M. Corboz, ajoutant que les familles des disparus avaient besoin d’une assistance pour leur permettre de surmonter leurs difficultés financières et leurs traumatismes psychologiques, mais que rien ne semblait être fait pour leur venir en aide.
Plusieurs groupes de défense des droits humains font pression sur le gouvernement pour l’amener à constituer une commission d’enquête de haut niveau. Elle sera chargée de se pencher sur le problème des disparus, de mettre en place un dispositif juridique sévère pour mettre un terme à l’impunité, et d’indemniser les familles.
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