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Une solution concertée pour résoudre le problème des enfants migrants

Les autorités sénégalaises affirment s’attaquer au problème des enfants migrants, alors même qu’une organisation de défense des droits humains vient de publier un rapport alarmant sur le sort de migrants africains mineurs dans les îles Canaries.

« Nous avons prévu tout un dispositif [pour résoudre ce problème] », a indiqué Moustapha Ly, conseiller diplomatique en charge des problèmes d’immigration au ministère sénégalais de l’Intérieur.

En effet, l’Espagne et le Sénégal ont signé le 5 décembre 2006 une convention relative à la prévention de l’immigration des mineurs non accompagnés, et les autorités sénégalaises travaillent actuellement avec l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) sur le problème des enfants migrants, a affirmé M. Ly.

Selon le rapport de Human Rights Watch (HRW), publié le 26 juillet, des centaines d’enfants migrants africains non accompagnés – venant principalement du Sénégal et du Maroc – vivent dans des conditions précaires sur l’archipel espagnol des Canaries et sont victimes de maltraitance et de privation de nourriture dans les centres d’accueil.

Contactées par IRIN, les autorités sénégalaises n’ont fait aucun commentaire sur le rapport de HRW.

« Il nous faut prendre le temps d’étudier le rapport de long en large », a déclaré M. Ly. Ce que nous pouvons dire, a-t-il ajouté, c’est que le gouvernement est en mesure de confirmer ou d’infirmer les informations contenues dans le rapport car des représentants du gouvernement se sont récemment rendus en Espagne pour identifier les migrants sénégalais.

Intitulé Unwelcome Responsibilities: Spain’s Failure to Protect the Rights of Unaccompanied Migrant Children in the Canary Islands (Responsabilités fâcheuses : L’incapacité de l’Espagne à protéger les droits des enfants migrants non accompagnés dans les îles Canaries), le rapport a révélé qu’en 2006, 931 jeunes garçons étaient arrivés dans l’archipel espagnol après des traversées dangereuses à bord d’embarcations de fortune.

« Les conditions d’hébergement sont semblables à celles d’une prison », a indiqué Simone Troller, auteur du rapport et chercheuse sur les droits des enfants pour Human Rights Watch. « Ces enfants sont en danger ».

Entre 400 et 500 enfants sont détenus dans des centres d’accueil surpeuplés, créés par les autorités régionales pour faire face à l’afflux de nouveaux migrants.

Les enfants dorment dans des pièces froides, n’ont que trois heures de cours par semaine et n’ont parfois pour toute nourriture que du pain et de l’eau, selon le rapport.
Interrogé sur les conditions de vie dans le centre, un jeune garçon de 17 ans a déclaré:
« Lorsque nous leur disons que nous avons faim, ils nous répondent que nous mourons de faim au Sénégal et que nous devons nous estimer heureux d’avoir la nourriture qu’ils nous donnent ».

Des châtiments corporels

Le rapport du HRW fait également état de cicatrices observées sur le corps de certains enfants, qui ont affirmé avoir été violentés et harcelés sexuellement par des membres du personnel des centres d’accueil.

Au centre La Eseranza, sur l’île de Tenerife, des enfants ont parlé d’une « cellule disciplinaire » où ils avaient été battus et enfermés parfois pendant plusieurs jours d’affilée.

« Les enfants ont décrit une cellule de quelques mètres carrés, sale, sans fenêtre, donc pas aérée, dans laquelle il était même difficile de respirer. Ils devaient faire leurs besoins sur le sol de la cellule et n’étaient pas autorisés à aller aux toilettes », peut-on lire dans le rapport.

Les enfants n’avaient aucun moyen de se plaindre. Il leur était impossible de s’adresser à un avocat et aucune procédure ne leur permettait de déposer une demande d’asile. Le « plus choquant », a expliqué Mme Troller à IRIN, c’est que « les autorités régionales de l’archipel des Canaries et le gouvernement national d’Espagne se renvoient la balle, et que personne ne veut prendre ses responsabilités pour mettre fin à cette situation.

Explosion de l’immigration ouest-africaine

Sur les 931 enfants arrivés dans l’archipel des Canaries, près de 50 pour cent étaient originaires du Sénégal, 33 pour cent du Maroc, 12 pour cent du Mali, le reste de ces enfants migrants étant composé de ressortissants d’autres pays d’Afrique sub-saharienne, dont la Mauritanie, la Côte d’Ivoire et la Sierra Leone.

Si l’immigration clandestine en provenance d’Afrique de l’Ouest est depuis longtemps problématique, l’année dernière le phénomène s’est considérablement amplifié.
En effet, en 2006, 31 863 migrants clandestins ont débarqué sur l’archipel des Canaries – l’un des principaux points d’entrée en Europe –, contre 4 790 l’année précédente, selon les autorités des îles des Canaries.

Les problèmes économiques et politiques, les conflits, la recherche de meilleures opportunités d’emploi ou les obstacles à la migration légale, sont autant de raisons qui poussent des ressortissants d’Afrique de l’Ouest à risquer leur vie dans l’espoir d’une vie meilleure en Europe.

« Ces traversées sont très dangereuses », a affirmé Manuel Lopez Baumann, chargé de recherches et de communication au bureau de l’OIM pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre. En 2006, quelque 7 000 personnes sont mortes en tentant d’atteindre les îles Canaries.

Des mesures pour lutter contre l’immigration

Tandis que de plus en plus de candidats à l’immigration clandestine partent du Sénégal, d’importantes dispositions sont prises pour juguler ce phénomène.

Ainsi, au mois d’avril, l’OIM et le gouvernement sénégalais avaient annoncé la mise en place d’un nouveau projet financé par la Commission européenne. Ce projet prévoyait notamment la formation et la fourniture d’équipements aux fonctionnaires sénégalais des services d’immigration et de contrôle aux frontières ; une aide au retour volontaire des migrants clandestins dans leur pays d’origine et un programme de réinsertion approprié ; la sensibilisation aux dangers de l’immigration clandestine par le biais d’une campagne d’information menée au Sénégal ; l’étude du cadre juridique portant sur le traitement des enfants migrants non accompagnés, afin de faire des recommandations aux gouvernements du Sénégal, de France, d’Espagne et d’Italie – les trois principaux pays de destination des immigrants clandestins sénégalais.

Au mois de juin, Alfredo Perez Rubalcaba, ministre espagnol de l’Intérieur, avait rencontré son homologue sénégalais, Ousmane Ngom, et annoncé la création d’écoles de formation pour les Sénégalais désirant immigrer légalement en Espagne. Les ministres avaient également annoncé une prorogation du dispositif FRONTEX – l’agence de surveillance des frontières extérieures de l’Union européenne – le long des côtes ouest-africaines jusqu’en juillet 2008. Des navires et avions espagnols et italiens patrouillent actuellement le long des frontières maritimes du Sénégal.

Et ces mesures semblent porter leurs fruits. Jusqu'à présent, le nombre de clandestins arrivés sur l’archipel des Canaries cette année a baissé pour atteindre environ de 4 000, selon l’OIM.

Un problème de statut juridique

Malgré la baisse du nombre de migrants clandestins, ceux qui arrivent à destination posent un problème au pays d’accueil, surtout lorsqu’il s’agit d’enfants.

« Ils sont toujours entre le droit de l’enfant, qui est très protecteur, et le droit de l’étranger, qui est plus répressif et moins protecteur », a expliqué Timon Van Lidth, juriste et spécialiste des problèmes de migration à l’OIM.

Dès qu’ils atteignent l’âge de 18 ans, les migrants sont confrontés à de nouveaux problèmes liés à leur statut juridique dans le pays, a-t-il ajouté.

D’après Human Rights Watch, tout enfant migrant non accompagné qui entre en territoire étranger doit bénéficier d’une protection et d’une assistance particulières de l’Etat.

« Même si ces enfants n’ont pas le droit de rester dans le pays, tant qu’ils sont sur le territoire espagnol, le gouvernement d’Espagne doit leur garantir tous les droits énoncés dans la Convention sur les droits des enfants », a rappelé le rapport.

HRW recommande notamment aux gouvernements espagnols et des îles Canaries de fermer les centres d’accueil des migrants mineurs et de transférer ces derniers vers d’autres centres mieux à même de « garantir le bien-être et le développement des enfants ». HRW recommande également l’ouverture d’enquêtes sur les récits des abus et maltraitances dont les enfants auraient été victimes.

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This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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