Des familles d’enfants confiés à des institutions censées s’en occuper se sont dites indignées par la découverte la semaine dernière d’une vingtaine de jeunes garçons sévèrement mal nourris et laissés sans soins dans un orphelinat de Bagdad.
Les 24 garçons, âgés de trois à 15 ans, souffrent pour la plupart de déficience mentale. Ils ont été découverts nus dans une pièce obscure et sans fenêtre par des soldats américains et irakiens, lors d’une patrouille de routine le 10 juin dans la capitale irakienne. Plusieurs de ces enfants étaient attachés à leur lit et étaient bien trop faibles pour se tenir debout après avoir été détachés.
Dans une autre pièce, les soldats ont découvert des réserves de nourriture et des vêtements qui auraient dû être donnés aux enfants. Trois femmes, se faisant passer pour des aides-soignantes et deux hommes, dont le directeur de l’orphelinat et un gardien, étaient présents sur les lieux lors de l’arrivée des soldats.
Cette découverte a rendu furieux les parents de ces enfants.
« Si cela se passait dans un pays normal, j’aurais intenté un procès contre ces criminels », a lancé le père de deux jeunes pensionnaires de l’établissement. « Mais nous vivons dans le chaos complet », a-t-il ajouté.
Ce père, qui a souhaité gardé l’anonymat, a confié ses enfants à l’orphelinat après avoir été déplacé il y a deux ans.
« Que pouvais-je faire ? Ils étaient devenus un véritable fardeau pour nous. Nous avions donc décidé de les y envoyer et nous ne pouvons toujours pas les reprendre en raison de nos conditions de vie difficiles », a déploré le père.
Ahmed Nasser Abdullah, 44 ans et père d’un jeune garçon handicapé hébergé dans un autre orphelinat de Bagdad, a exprimé les mêmes sentiments. « Je suis complètement choqué », a-t-il dit.
Ce paysan avait confié sont fils à l’orphelinat, il y a près de trois ans, parce qu’il n’avait pas les moyens de payer le traitement de son enfant ; aujourd’hui, il a décidé de le ramener chez lui.
« Il est préférable de vivre dans des conditions difficiles, plutôt que de laisser mon fils à des personnes qui ne s’en occupent pas. Je comprends maintenant pourquoi ils insistaient pour que je prenne rendez-vous avant de passer voir mon fils. Ils avaient ainsi le temps de rendre les enfants présentables avant les visites », a ajouté M. Abdullah.
Des arrestations pour punir les coupables
« Deux membres du personnel de l’orphelinat ont été arrêtés », a révélé Hamid al-Zaidi, l’inspecteur général au ministère du Travail et des affaires sociales. Des mandats d’arrêt ont également été émis à l’encontre de trois autres employés de l’établissement qui se sont enfuis et sont introuvables pour le moment, selon M. al-Zaidi.
Deux enquêtes ont été diligentées – l’une par le Premier ministre, Nouri al-Maliki, et l’autre par le ministère du Travail, a indiqué un communiqué du gouvernement rendu public la semaine dernière.
« Les employés incompétents seront punis sévèrement et pourraient même être emprisonnés », a déclaré M. al-Zaidi.
L’inspecteur général a par ailleurs reconnu que certains personnels soignants avaient fait preuve de négligence mais, a-t-il affirmé, l’orphelinat fait de son mieux pour s’occuper des enfants, malgré les circonstances difficiles.
Selon lui, les vêtements des enfants leur auraient été retirés pour les calmer parce que l’établissement n’avait pas d’électricité, et donc pas de systèmes de ventilation.
« Les enfants handicapés ont été abandonnés par leur famille et nous essayons de les sauver de la mort ; mais tout le monde en Irak vit des moments difficiles », a-t-il déploré.
Selon M. Al-Zaidi, le directeur de l’orphelinat avait demandé des générateurs et des augmentations de salaire, mais sa demande a été rejetée.
Quant au ministre du Travail et des affaires sociales, il s’est refusé à révéler le nombre d’orphelins vivant dans les orphelinats.
L’appel de l’UNICEF
Le 22 juin, le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) avait exhorté le gouvernement irakien à prendre en compte le sort des orphelins et des enfants vulnérables en Irak.
L’UNICEF avait également appelé à mettre en place un système de suivi transparent pour assurer la gestion de ces institutions, à prendre des dispositions pour renforcer les compétences du personnel et à soutenir les initiatives communautaires en matière d’aide à l’enfance.
« Le conflit actuel et les déplacements de population qui en résultent constituent désormais une menace pour le bien-être des enfants et des orphelins en particulier. Les familles qui se battent déjà pour nourrir leurs propres enfants et leur offrir une éducation ont de plus en plus de difficultés à s’occuper d’autres enfants », a affirmé un communiqué de l’UNICEF.
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