Le soulèvement de soldats dans deux villes de l’intérieur de la Guinée et dans la capitale, Conakry, la semaine dernière, semble indiquer que l’emprise du gouvernement sur le pays demeure fragile, estiment des observateurs.
« Le sentiment général est l’impatience ; tout le monde pense qu’il y eu trop de paroles et pas d’actes », a expliqué à IRIN Elisabeth Cote, représentante en Guinée de l’organisation non gouvernementale américaine IFES, spécialisée dans le soutien aux processus électoraux et basée à Washington.
Dans les nuits de jeudi et vendredi dernier, plusieurs témoins ont rapporté que des soldats auraient tiré des coups de feu en l’air dans leurs casernes. Ils sont entrés dans une ville et ont mitraillé la zone résidentielle, faisant au moins deux morts.
Des émeutes civiles généralisées avaient eu lieu au début de l’année dans presque toutes les grandes villes du pays, les populations réclamant la démission du président Lansana Conté. Les manifestations ont cessé fin février, après que M. Conté a accepté de déléguer une partie de ses pouvoirs et de nommer un nouveau premier ministre, Lansana Kouyaté.
La loyauté de l’armée envers le président Conté et sa volonté d’appliquer la loi martiale ont alors été considérées comme les facteurs clés de la capacité du chef de l’Etat à se maintenir au pouvoir après des semaines de manifestations à l’échelle nationale.
Revenant cette semaine d’un voyage à l’intérieur de la Guinée, Mme Cote a déclaré que l’armée n’était pas la seule source d’instabilité potentielle dans le pays.
Partout, les gens attendent de voir ce que le nouveau gouvernement est capable de faire, a-t-elle rapporté, soulignant en particulier le besoin d’un approvisionnement fiable en eau courante et électricité, deux services extrêmement rares y compris dans la capitale délabrée, et pratiquement inexistants ailleurs.
Vendredi, le Premier ministre Kouyaté a rencontré les chefs de l’armée pour discuter de leurs revendications, mais ces derniers ont martelé qu’ils voulaient une rencontre « les yeux dans les yeux » avec le président Conté, selon un porte-parole de l’armée.
Lundi, les militaires ont présenté une liste de revendications comprenant le paiement de 300 millions de francs guinéens (85 000 dollars), la réintégration des soldats renvoyés à la suite d’une rébellion en 1996 et des changements au niveau du personnel, notamment le passage de la plupart des soldats au grade supérieur.
Dans la même déclaration, l’armée « réaffirmait son soutien au Premier ministre et au gouvernement ».
« La situation s’est calmée, mais je ne pense pas que les militaires vont attendre longtemps, il faut donc que des mesures immédiates soient prises », a commenté Mme Cote.
Il est possible d’éviter le chaos, a-t-elle analysé, à condition que le gouvernement réponde aux revendications de l’armée, tout en travaillant à l’amélioration des services sociaux.
Cependant, a-t-elle poursuivi, les administrations locales se sont effondrées à l’intérieur du pays. Leurs bureaux dans 30 des 32 capitales de province ont été mis à sac au cours des émeutes du début de l’année, et nombre d’entre eux ont été détruits.
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