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La presse indépendante à nouveau menacée

Les défenseurs de la liberté de la presse craignent un nouveau durcissement de la politique répressive du gouvernement zimbabwéen à l’encontre des rares médias nationaux privés qui dénoncent les violations des droits de l’homme, le marasme économique et la volonté du président Robert Mugabe de proroger son mandat.

Ces craintes de voir les menaces pesant sur la liberté de la presse s’intensifier ont été suscitées par l’affaire Trevor Ncube. Ce dernier, qui dirige deux journaux hebdomadaires, a été récemment déchu de sa nationalité zimbabwéenne et est désormais considéré comme étant un ressortissant zambien, car son père est né en Zambie avant d’émigrer au Zimbabwe.

Selon des spécialistes des médias, les autorités zimbabwéennes se sont servies de la question de nationalité comme prétexte pour exiger la fermeture des deux journaux que possède Trevor Ncube. En outre, elles ont proposé à ce dernier de confier la direction de ses journaux à des personnalités pro-gouvernementales.

« Au Zimbabwe, pour pouvoir être propriétaire d’un journal, il faut être Zimbabwéen. Dans le cas contraire, vous ne pouvez détenir plus de 40 pour cent des parts de la société », a expliqué M. Ncube.

En retirant sa nationalité à M. Ncube, qui dirige également l’hebdomadaire sud-africain The Mail & Guardian, le gouvernement peut ainsi exiger la fermeture des uniques hebdomadaires indépendants que compte le Zimbabwe, The Standard et The Zimbabwe Independent, un journal financier, ont signalé les spécialistes des médias.

En outre, les autorités peuvent donner le contrôle des deux journaux à des sympathisants du parti au pouvoir, le ZANU-PF.

Le Zimbabwe abrite les descendants des dizaines de milliers de Zambiens, Malawiens, Mozambicains qui ont émigré au milieu des années 1950 pour travailler dans les exploitations agricoles ou dans les mines des territoires de la Fédération britannique qui regroupait la Rhodésie du Nord, la Rhodésie du Sud, et le Nyasaland, connus aujourd'hui sous les noms respectifs de Zambie, Zimbabwe et Malawi.

Selon le gouvernement, M. Ncube aurait dû renoncer à sa nationalité zambienne et « régulariser » son statut au Zimbabwe en 2001, après l’entrée en vigueur de la loi sur la citoyenneté qui exclut la double nationalité.

M. Ncube, détenteur d’un passeport zimbabwéen, conteste la suppression de sa nationalité. Il a déclaré devant la Haute cour que le Zimbabwe était son seul pays d’origine et que toutes les actions qu’ils avaient jusqu’alors entreprises étaient conformes la nouvelle loi sur la citoyenneté.

« Il y a trois ans, j’ai prêté serment devant un fonctionnaire responsable de la citoyenneté. C’est l’incompréhension totale, je ne comprends pas ce qui se passe, tout porte à croire qu’une conspiration se trame », a affirmé Trevor Ncube au Mail & Guardian.

« Ce n’est pas parce que mon père est né en Zambie que j’ai droit à la citoyenneté zambienne », a indiqué M. Ncube à la Cour. « A ma naissance, mon père était ressortissant zimbabwéen, comme le prouvent les registres nationaux du Zimbabwe. »

En 2006, un juge de la Haute cour a rendu une ordonnance contre le gouvernement et a déclaré nulle et non avenue la déchéance de la citoyenneté de M. Ncube.

Des années de répression

En 2003, The Daily News et son édition dominicale, The Daily News on Sunday, ont été interdits par la Commission de l’information et des médias (MIC en anglais) du Zimbabwe. Puis l’année suivante, ce fut au tour des deux journaux indépendants The Tribune et The Weekly Times, critiques vis-à-vis du gouvernement, à être interdits de publication.

Le gouvernement a eu recours à d’autres stratagèmes afin de réprimer les médias dissidents. Ainsi, la direction du Daily Mirror, un journal privé, a été confiée à l’Organisation centrale de renseignements (CIO en anglais), un service de renseignements. The Financial Gazette, un autre hebdomadaire, est également tombé entre les mains de la CIO.

Joy TV, l’unique chaîne de télévision privée du pays, s’est vu retirer sa licence, une bombe a détruit les locaux de la station de radio Voice of The People et Capital Radio n’a plus le droit d’émettre.

La MIC a récemment augmenté les frais d’enregistrement des journaux, afin de contraindre les derniers journaux locaux à mettre la clé sous la porte, ont déclaré les spécialistes des médias.

La Commission menace également de retirer l’accréditation au journaliste free-lance Nunurai Jena, soupçonné de travailler pour Voice of America, une chaîne de télévision et radio, basée aux Etats-Unis, et accusée d’être critique vis-à-vis du gouvernement.

Les actions entreprises par les autorités à l’encontre de Trevor Ncube ont été condamnées par l’Union des journalistes du Zimbabwe (ZUF en anglais), l’Association mondiale des journaux, le Forum mondial des rédacteurs en chef, l’Institut de la liberté d’expression et l’Institut de la presse internationale.

« [Ces actions] vont remettre le Zimbabwe et sa politique répressive en matière de liberté de la presse sous le feu des projecteurs. Le gouvernement ne cesse de se plaindre de sa mauvaise image, mais de telles actions vont sans aucun doute attirer l’attention de la communauté internationale », a affirmé Matthew Takaona, le président de la ZUF.

Tafataona Mahoso, le président de la MIC, qui a joué un rôle dans la fermeture des médias indépendants, dément que la déchéance de la citoyenneté de M. Ncube aboutisse à la fermeture des journaux ou à la saisie des intérêts de la société de M. Ncube.

« La MIC a entendu parler des difficultés de M. Ncube dans la presse et n’a jamais été impliquée dans cette affaire. Nous ne comprenons pas pourquoi M. Ncube a décidé de porter plainte pour diffamation contre la MIC et la nation », a affirmé M. Mahoso.

Pourtant, un chroniqueur du quotidien gouvernemental The Herald, supposé être un haut responsable du gouvernement, a conclu un papier par : « Trevor [Ncube], mes meilleurs vœux pour 2007, l’année de la fermeture. »

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This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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