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La borréliose, la fièvre mortelle oubliée d’Afrique de l’Ouest

Dans le petit village de Sindia, à 70 kilomètres de Dakar, les terriers pullulent de rongeurs mais aussi de tiques dont la piqûre est responsable chez l’homme de la borréliose, une maladie mortelle qui touche de plus en plus les populations d’Afrique de l’Ouest.

« La borréliose est une maladie bactérienne », explique Georges Diatta, docteur en biologie animale à l’Institut de Recherche pour le Développement (IRD) de Dakar, « elle est transmise par la piqûre de l’ornithodoros sonraï, une tique mole, qui loge dans les terriers de rongeurs ».

La piqûre de la tique, indolore, passe le plus souvent inaperçue et déclenche au bout de sept jours de fortes poussées de fièvre qui peuvent se répéter pendant trois mois tous les quinze jours et entraîner des méningoencéphalites graves, voire dans certaines cas la mort des patients.

Le diagnostic de la borréliose est d’autant plus difficile à faire que les symptômes de cette maladie ressemblent fort à ceux du paludisme et que les examens sont quasiment impossibles en zone rurale faute de structure et de matériel appropriés.

« Il est difficile de mettre en valeur la borréliose », explique Georges Diatta, «la goutte épaisse doit être effectuée en cas de pic de fièvre et la borrélie, étant très rare dans le sang, nécessite les compétences d’un microscopiste averti ».

De 1990 à 2003, les chercheurs de l’IRD qui travaillaient sur le paludisme dans le village de Dielmo, dans la région du Sine Saloum, au Sénégal, ont profité des structures en place pour y étudier la borréliose.

Les résultats de leurs 14 années de recherche indiquent que 4 à 25% des populations étudiées ont présenté des cas de borréliose, soit une incidence annuelle moyenne de 11%. Et les travaux menés dans différentes zones rurales du Sénégal, du Mali et de la Mauritanie confirment ces résultats.

« C’est une incidence considérable pour une maladie bactérienne qui atteint tous les groupes d’âges », explique Georges Diatta. « Seuls le paludisme et la grippe ont une incidence aussi importante et l’on estime que la borréliose constitue, au même titre que les autres maladies endémiques, un véritable problème de santé publique ».

Le développement de cette affection bactérienne en Afrique de l’Ouest est en grande partie due à la persistance des longues périodes de sécheresse qui ont entraîné une propagation de la tique hors des régions sahéliennes, notamment dans les zones rurales des pays où la pluviométrie est inférieure à 750 mm.

Au Sénégal, la tique est présente dans les 2/3 du pays, jusqu’a la zone frontalière avec la Gambie.

Une maladie mortelle oubliée

Tombée dans l’oubli après les années cinquante « car on pensait qu’elle avait disparu » explique Georges Diatta, la borréliose quoique mortelle demeure quasi inconnue des populations et du personnel de santé.

Les habitants de Sindia n’échappent pas à cette logique-là. « Je ne connais pas cette maladie », déclare Hassan Ndione, un villageois un peu inquiet, « mais j’ai des rongeurs et des petites souris dans ma maison, alors j’imagine qu’il doit y avoir aussi des tiques qui nous piquent ».

Seules la sensibilisation des populations et la formation du personnel de santé pourront permettre d’endiguer la borréliose. Selon Georges Diatta, il est impossible d’éradiquer totalement les rongeurs car cela constituerait d’ailleurs un déséquilibre de l’écosystème. De la même manière, il est impossible d’éradiquer cette tique qui vit dans les terriers.

« L’essentiel c’est que le personnel de santé soit vigilant et pour ça, il faut que les écoles de santé et l’Université enseignent la borréliose aux étudiants pour leur faire comprendre qu’il existe une forte fièvre inexpliquée qui, quand elle se poursuit plus de trois jours, n’est pas un paludisme, mais une borréliose ».

« On attribue souvent les palus persistants à une résistance aux antipaludéens », poursuit-il, « alors que ce sont des cas de borréliose récurrents qui peuvent être soignés grâce à des antibiotiques de base qui ne coûtent pas plus que 2000 francs Cfa ».

Quant aux recherches, elles restent encore à approfondir. Car si la borréliose d’Afrique de l’Ouest est mortelle, on ne connaît pas son incidence réelle. En attendant, Georges Diatta et l’IRD poursuivent leur travail, dans l’espoir que tous les décideurs publics et les organismes internationaux prennent conscience et se mobilisent autour de ce problème de santé publique.

jv/ads/vj

This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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