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Extrait du journal intime d'un jeune Libérien à Beyrouth

Marcelle Bedran et 22 autres ressortissants libériens et libano-libériens tentent de quitter le Liban depuis plus de deux semaines maintenant. Ils sont une cinquantaine de Libériens coincés dans la capitale assiégée.

Plusieurs d’entre eux ont fui la guerre civile au Liberia il y a 12 ans.

Environ 50 ressortissants ghanéens ont quitté le Liban pour rentrer au pays mardi, avec l’aide de leur gouvernement et de l’Organisation internationale pour les migrations des Nations unies (IOM). Mais de son côté, le Liberia n’a toujours pas été en mesure d’évacuer ses citoyens.

IRIN suit la situation difficile de Marcelle Bedran, 19 ans, de son fiancé, Saide Chaar, 25 ans, et de leur famille, au fil de conversations téléphoniques quotidiennes qui sont par la suite retranscrites sous forme narrative. Leur situation se détériore, jour après jour. Ils doivent faire face à la faim, aux menaces d’éviction et à la peur des attaques aériennes et d’une guerre au sol.

La voix de Marcelle est habituellement calme, mais mardi, son ton s’était durci. Saide a finalement éclaté en sanglots. Voici un extrait de notre conversation avec eux.

Marcelle Bedran:

1 août 2006 – [Le propriétaire] nous a réveillé ce matin en hurlant à la fenêtre de l’appartement - nous logeons au rez-de-chaussée. Il criait et répétait qu’il nous avait déjà dit de partir en nous demandant pourquoi nous étions encore là. Il continue de nous couper l’eau pour tenter de nous faire partir plus vite.

Nous avons mangé un peu de pain, une boîte de conserve de boeuf et quelques pommes de terre que nous avons fait frire.

[Maintenant], nous n’avons plus de nourriture et plus d’eau du tout.

Nous sommes sortis pour nous informer des prix des courses de taxi, d’ici jusqu’à la frontière avec la Syrie. Nous sommes allés à plusieurs endroits et les prix variaient, mais le moins cher que nous ayons trouvé était 500 dollars pour un taxi, qui pourrait emmener six d’entre nous. Comme nous sommes 23, nous aurions besoin de louer quatre ou cinq taxis, cela serait vraiment très cher.

Même les 500 dollars pour une voiture, nous ne les avons pas. Nous nous demandons où nous allons trouver l’argent pour le taxi, si c’est possible de le trouver.

Si certains d’entre nous réussissent à partir, je crois que nous allons nous séparer. On veut penser à nos amis, notre famille, nos proches, nos époux… Ce sera vraiment difficile.

Dans une situation comme celle-ci, quand un pays est en guerre et que tout le monde est en guerre, si on commence à penser à comment aider tout le monde, alors tout le monde s’enfoncera.

Nous sommes tous extrêmement tendus. Toute la maison est sous tension : qui restera et comment vont faire les autres pour s’en sortir, que vont-ils devenir, et d’où viendra l’argent et qui va pouvoir réunir la moitié de cette somme, et qui s’occupera de l’autre moitié encore…

Quand je suis rentrée de la station de taxis, je ne pouvais plus supporter de rester dans l’appartement. Je suis sortie toute la journée.

Les hélicoptères survolent la ville. C’est une chose à laquelle je commence à m’habituer, mais qui me met mal à l’aise. C’est quelque chose qui me fait mal, un mal insidieux, au fur et à mesure que les jours passent.

Je ne sais même plus quoi penser, c’est ça le pire. Tout tourne autour de l’argent. Si on a de l’argent tous les problèmes sont réglés. Si nous avions eu de l’argent dès le départ, il y a bien longtemps que nous aurions quitté cette ville. Mais malheureusement, on ne vient pas d’une famille riche. On est juste une famille pauvre et normale ici.

Saide Chaar:

Si les Israéliens, ou l’armée libanaise, ou le Hezbollah entrent chez moi, pour harceler ma famille, je mourrai pour elle, je mourrai pour les Libériens au Liban. Je me défendrai.

Je suis sûr que cela ne surprendra pas les Libériens de voir un de leur frère se défendre en temps de crise.

Mais je n’en peux plus. Je n’ai plus rien à manger. Je me lave une ou deux fois par semaine. Plus d’eau, plus de nourriture pour ma famille et le gouvernement du Liberia qui reste là sans rien faire. Le gouvernement américain aussi, lui qui est supposé venir en aide aux Libériens, ne fait rien.

Personne ne vient à notre secours. Où sont-ils tous ? Pourquoi est-ce que personne ne peut nous aider ?

Comment se fait-il que personne ne puisse m’aider ?

This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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