Sans surprise, le président burkinabé sortant Blaise Compaoré, au pouvoir depuis 18 ans, a remporté le scrutin du 13 novembre dès le premier tour, devançant largement les nombreux candidats de l’opposition, dans la première élection réellement multipartite de ce pays sahélien enclavé.
L’ancien officier arrivé au pouvoir à la faveur d’un coup d’Etat et élu en 1991 puis 1998, a obtenu 80 % des suffrages exprimés lors du scrutin de dimanche dernier, a indiqué Moussa Michel Tapsoba, le président de la Commission électorale nationale indépendante, vendredi après-midi.
Très loin derrière, le candidat Bénéwende Stanislas Sankara a obtenu 4,94 pour cent des suffrages.
Les 10 autres candidats ont obtenu des scores compris entre 2,6 pour cent et 0,31 pour cent, ce qui dénote, s’il en était besoin, la faiblesse d’une opposition qui n’aura jamais réussi à égaler les moyens financiers colossaux dont disposait le Congrès démocratique du peuple (CDP), le parti au pouvoir, pour la campagne électorale.
Ce dernier s’est adjoint les services d’une société de communication française, et a eu recours à des hélicoptères, montgolfières, véhicules tout terrain et gadgets à l’effigie du candidat Compaoré, le tout pour un budget chiffré par son directeur de campagne, Salif Diallo, à 983 millions de francs CFA (1,8 millions de dollars).
Les affiches électorales de Compaoré étaient placardés partout dans le pays |
« Ces élections consacrent l’enracinement de la démocratie au Burkina Faso », a déclaré à IRIN Abou Adam Soulé, un observateur de l’Union africaine.
« Au cours de la campagne, le discours a été apaisé, les candidats ont tenu meeting librement, il n’y a pas eu de violences ni de heurts, de nombreuses femmes ont voté le jour du scrutin ».
L’opposition burkinabé, qui avait boycotté les élections de 1991 et 1998 remportées largement par le président Compaoré, s’est présentée au scrutin de dimanche en ordre dispersé.
Tandis que 28 partis, dont le principal parti d’opposition, se sont ralliés au président sortant, la coalition Alternance 2005, qui regroupe 15 partis, a désigné pas moins de trois candidats.
En dépit du manque d’enjeux de la présidentielle, 57 pour cent des 3,9 millions d’inscrits burkinabé se sont rendus dans les urnes, selon la CENI.
Le jour des élections, dans la ville de Ziniare, ville natale du président, située à 30 km de la capitale, des queues s’étaient formées devant les bureaux de vote dès l’aube. Les partisans de Compaoré y étaient nombreux, qui votaient par défaut plutôt que par passion.
« J’ai voté pour celui pour lequel tout le monde est venu voter», a déclaré à IRIN Cafando Pazimbou, un vieil homme agrippé à sa canne et à sa carte d’électeur, qui ne connaissait ni son âge ni la raison pour laquelle il avait choisi Compaoré.
Des électeurs faisant la queue devant le bureau de vote de Ziniare |
« J’ai voté pour lui », a dit celle qui portait une couronne de nattes sur la tête. « Je veux qu’il reste président, il s’occupe bien du Burkina, il a amené la paix, la liberté. Si un nouveau vient, il va chercher à bouffer l’argent alors que lui, il a fini, et ce qui l’intéresse c’est arranger le pays ».
Mais pour les observateurs du Forum de la société civile de l’Afrique de l’Ouest (FOSCAO), le nombre de personnes s’étant rendues aux urnes ne reflète pas l’opinion du pays tout entier.
« J’ai du mal à comprendre comment moins de 40 pour cent de la population ont été inscrits sur les listes électorales », a expliqué Richard Konteh, le Secrétaire général du FOSCAO qui a déployé 60 observateurs, dont une quinzaine d’internationaux, dans les 45 provinces que compte le Burkina Faso.
« Si les inscriptions sur les listes électorales s’étaient déroulées correctement, il y a aurait eu six millions de votants, soit la moitié de la population ».
46 pour cent de la population de ce pays de 12 millions d’habitants vit en dessous du seuil absolu de pauvreté, soit moins d’un dollar par jour, selon les Nations unies.
87 pour cent de cette dernière est analphabète, ce qui explique en partie les huit pour cent de bulletins nuls relevés par la CENI.
« Le challenger de Compaoré, dans ces élections, c’est le manque d’éducation », selon Konteh du FOSCAO.
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