Follow our new WhatsApp channel

See updates
  1. Accueil
  2. West Africa
  3. Côte d’Ivoire

La prolifération des armes de guerre responsable de l'augmentation de la criminalité

Les six hommes armés de fusils d’assaut AK 47 qui ont cambriolé la maison d’une veuve dans ce quartier nanti de la banlieue d’Abidjan, la capitale de la Côte d’Ivoire, sont partis en emportant tout son argent et ses bijoux et en laissant derrière eux un gardien en état de choc.

« Ils ont ligoté le gardien, pris ses clés et ouvert le portail » a expliqué René Kanga, qui tremble encore en repensant aux malfaiteurs qui ont pris tout l’argent que sa tante disposait pour les funérailles de son mari.

Ils étaient tous jeunes, vêtus de t-shirts et de treillis militaires, a déclaré Kanga, avant de rajouter qu’ils avaient ciblé plusieurs maisons dans le quartier cette nuit-là.

« Ils étaient pieds nus, pour qu’on ne puisse pas les entendre. Ils se sont introduits dans la maison et nous ont tous ligotés, nous menaçant de nous tuer si nous criions », s’est rappelé Kanga. « La sécurité n’existe plus à Abidjan ».

Les AK47, qui sont bon marché mais robustes ont été les armes de prédilection de générations d’armées, de rebelles et d’enfants soldats en Afrique de l’ouest. Et en Côte d’Ivoire, trois ans après le début d’un conflit qui a provoqué la partition du pays dont la moitié nord est contrôlée par les forces rebelles, ces fusils d’assaut sont de plus en plus utilisés dans les vols à main armés à Abidjan, une ville située dans le sud du pays sous contrôle gouvernemental.

Tous les matins, la dernière page du quotidien Soir Info sert à des milliers de lecteurs curieux des articles relatant dans les détails les braquages et de vols commis à Abidjan.

Bien que la fin des années 1990 ait été marquée par une recrudescence de la délinquance, certains analystes pensent que les délinquants aujourd’hui sont plus violents et ont tendance à utiliser des armes lourdes, les AK 47 en particulier.

Plus grave, les victimes qui refusent de donner leur argent ou leur voiture sont souvent exécutés sur place.

Et selon le dernier rapport de l’ONU sur les droits de l’homme, on retrouve parmi les criminels quelques agents des forces de sécurité qui n’hésitent pas à exécuter de sang froid les gens, en toute impunité.

Bien que les statistiques officielles de la criminalité ne sont pas disponibles, une étude de Mercer Human Ressources Consulting publiée cette année révèle qu’Abidjan est la deuxième ville la plus dangereuse pour le personnel expatrié, après Bagdad, la capitale iraquienne.

Suite à la reprise des hostilités en novembre dernier, des manifestants contre les ressortissants français ont envahi les rues et s’en sont pris aux maisons et aux entreprises des expatriés. En conséquence, le nombre d’inscription auprès des agences de sécurité privées a considérablement augmenté.

« Nous pouvons difficilement satisfaire la demande », a déclaré Francis Gomis, un agent de sécurité au sein de Group4Securicor, une compagnie internationale dont le logo blanc et rouge se retrouve sur les portes et clôtures hérissées de chardons de nombreuses maisons de la ville.

« Avant la crise, nous avions des voleurs ordinaires, des gens qui commettaient des cambriolages avec un pistolet, un fusil de chasse à canon scié ou une machette », a expliqué M. Gomis. « Actuellement, nous avons affaire à une autre catégorie de criminels : des commandos qui utilisent des tenues de camouflage et des AK 47 ».

« C’est vraiment un nouveau phénomène. La plupart des attaques sont ciblées – les cambrioleurs vont dans les maisons de commerçants nantis, d’hommes d’affaires ou d’anciens ministres », a-t-il ajouté.

Tandis que les riches sont de plus en plus ciblés, le nombre d’Ivoiriens vivant sous le seuil de pauvreté a augmenté, passant de moins de 34 pour cent de la population en 1998 à plus de 40 pour cent aujourd’hui, selon le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD).

[Cote d'Ivoire] The Abidjan skyline. The city is built on a lagoon. [Date picture taken: 10/26/2005]
Abidjan, la capitale économique de Côte d'Ivoire, est construite autour d'une lagune

« La crise est responsable de la dégradation du niveau de vie de millions de nos concitoyens et elle accentue la pauvreté qui gagne un peu plus de terrain chaque jour », avait déclaré le mois dernier Boniface Britto Nama, le ministre du Développement.

Selon certains analystes, la partition de la Côte d’Ivoire et la porosité de ses frontières, dans une région marquée par des guerres civiles et l’agitation politique, expliquent le nombre important d’armes qui circulent dans ce pays.

« Légalement, il très facile de se procurer une arme quand on connaît quelqu’un qui peut vous délivrer une autorisation de port d’arme », a expliqué à IRIN, et sous le couvert de l’anonymat, un spécialiste des questions de sécurité. « Je ne peux qu’imaginer que ce doit être également très facile au marché noir ».

Les échéances fixées pour le désarmement des forces rebelles et des milices n’ont pas été respectées et les combattants des deux camps n’ont pas restitué leurs armes. Depuis aucun autre chronogramme n’a été établi.

Les milices pro-gouvernementales posent un problème particulier. En effet, la plupart de ces groupes armés ont été constitués au début du conflit, à l’époque où le gouvernement recrutait des centaines de jeunes hommes au chômage et leur donnait une formation militaire rudimentaire dans des casernes désaffectées.

Certaines milices ont été dissoutes sous la pression des Nations unies et des médiateurs internationaux, mais personne ne sait ce que sont devenus ces jeunes hommes après qu’ils aient quitté leur camp d’entraînement.

« Pour la plupart des gens du métier sont convaincus que ces agences [de sécurité] seront utilisées pour employer les miliciens démobilisés », a déclaré l’analyste spécialisé sur les questions de sécurité.

Le secteur de la sécurité est si dynamique que même la femme du président Laurent Gbagbo a récemment pris des parts dans Omeifra et Vigassistance, deux agences de sécurité d’Abidjan qui connaissent une forte expansion.

Gbagbo a annoncé en juillet la création d’une nouvelle force spéciale d’intervention rapide pour combattre « l’insupportable » niveau d’insécurité de la ville.

A la suite de cette annonce, plusieurs habitants d’Abidjan ont craint que les nouvelles unités, connues sous le nom de CECOS (Centre de commandement pour les opérations de sécurité) ne deviennent un instrument de répression de l’Etat.

En octobre, le Colonel Guiai Bi Poin, le chef du CECOS avait affirmé qu’après deux mois d’opérations, le niveau de la criminalité avait baissé.

La force d’intervention rapide a tué 14 bandits et en a arrêté 119, dont deux membres d’une milice pro-gouvernementale basée dans l’ouest du pays, selon Guiai Bi Poin.

« Nous menons une lutte constante contre les forces du mal », a-t-il déclaré aux journalistes, bien qu’il ait reconnu que son équipe posait également des problèmes.

En tout, 117 membres du CECOS ont été limogés pour avoir manqué au règlement, blessé des personnes avec leurs crosses de fusil ou commis des extorsions de fonds.

Pour d’autres habitants en revanche ont salué la création du CECOS car selon eux la police n’arrive pas à protéger les citoyens.

« Je crois que nous devons leur faire confiance. Mais nous aimerions en voir plus, parce que cela nous rassurerait », a déclaré François Gomis, le garde de sécurité.

M. Gomis a besoin d’être rassuré, car même les agences de sécurité comme celle pour laquelle il travaille sont la proie des cambrioleurs.

La semaine dernière, en plein jour, trois personnes armés d’AK 47 sont entrées dans Viagassistance et ont volé les 30 millions de CFA (54 000 dollars américains) que l’agent comptable venait de retirer à la banque.


This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

Partager cet article

Get the day’s top headlines in your inbox every morning

Starting at just $5 a month, you can become a member of The New Humanitarian and receive our premium newsletter, DAWNS Digest.

DAWNS Digest has been the trusted essential morning read for global aid and foreign policy professionals for more than 10 years.

Government, media, global governance organisations, NGOs, academics, and more subscribe to DAWNS to receive the day’s top global headlines of news and analysis in their inboxes every weekday morning.

It’s the perfect way to start your day.

Become a member of The New Humanitarian today and you’ll automatically be subscribed to DAWNS Digest – free of charge.

Become a member of The New Humanitarian

Support our journalism and become more involved in our community. Help us deliver informative, accessible, independent journalism that you can trust and provides accountability to the millions of people affected by crises worldwide.

Join