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Qui sera le prochain Premier ministre de la Côte d'Ivoire ?

« Qui sera le prochain Premier ministre » ? C’est la question que se pose mardi une partie de la presse ivoirienne. Une chose est sûre : quelque soit la personnalité qui sera désignée comme nouveau Premier ministre de la Côte d’Ivoire, elle aura la lourde tâche de construire la paix dans un pays paralysé par trois années de guerre.

Mais à quelques jours de l’échéance du 30 octobre fixées par les Nations unies, diplomates et analystes restent divisés sur le candidat le plus apte à rassembler les enfants d’un pays divisé en deux et où 10 000 casques bleus de l’ONU et soldats des forces françaises assurent le maintien de la paix entre le nord, sous contrôle des forces rebelles, et le sud, tenu par les forces loyalistes.

« Ca c’est la grande question », a indiqué Gilles Olakounle Yabi d’International Crisis Group, une organisation multinationale basée à Bruxelles. « Sur le papier, le Premier ministre a tous les pouvoirs. Il joue un rôle très important ».

Après l’échec d’une série d’accords de paix censés rétablir la paix en Côte d’Ivoire, pays autrefois considéré comme le poumon économique de l’Afrique de l’ouest, le Conseil de sécurité des Nations unies a adopté les nouvelles recommandations de l’Union africaine (UA) : la nomination d’un nouveau Premier ministre chargé d’organiser des élections présidentielles au plus tard le 31 octobre 2006.

Jusqu’à présent, seul le chef rebelle Guillaume Soro s’est déclaré candidat à ce poste en arguant que ses troupes contrôlent la moitié du pays.

D’autres personnalités sont également pressenties pour le poste et les noms qui reviennent souvent sont ceux d’un banquier, d’un diplomate, d’un professeur d’université et de l’actuel Premier ministre, Seydou Diarra.

« Il pourrait être reconduit dans ses fonctions », a déclaré M. Yabi. « Ce serait le choix le plus simple et le moins compliqué d’autant plus qu’une partie de l’opposition approuverait sa nomination ».

Homme d’affaires de 72 ans, M. Diarra a été nommé à la tête du gouvernement de réconciliation nationale créé au lendemain des accords de Linas-Marcoussis conclus en janvier sous l’égide de la France, l’ancienne puissance coloniale.

Très apprécié des diplomates étrangers pour ses bonnes manières, M. Diarra est critiqué par beaucoup d’Ivoiriens qui trouvent qu’il n’a pas assez de poigne et qu’il ne s’est jamais prononcé pendant les crises politiques ou militaires.

Pour certains diplomates, si Gbagbo a transféré une bonne partie de son pouvoir exécutif à M. Diarra, conformément au plan de paix de 2003, ce transfert n’était que théorique. Gbagbo continuait de gérer la plupart des affaires de l’Etat avec l’aide d’une équipe de conseillers spéciaux.

« Diarra n’a jamais eu l’occasion de s’exprimer », a confié à IRIN un diplomate occidental. « Gbagbo et ses conseillers spéciaux prenaient les décisions … Toutes les décisions importantes étaient prises à la présidence ».

Pas d’élections en vue

Le quinquennat de Gbagbo prend fin le week-end prochain et des élections présidentielles étaient censées avoir lieu le 30 octobre en Côte d’Ivoire. Mais avec l’échec du processus de désarmement des rebelles et des milices pro-gouvernementales, cette échéance n’a pu être respectée dans ce pays divisé par la guerre.

Pour bien définir les pouvoirs du nouveau Premier ministre, ceux-ci ont été fixés dans la nouvelle résolution du Conseil de sécurité de l’ONU. Le Premier ministre nommé doit disposer de « toutes les ressources financières, matérielles et humaines voulues, en particulier dans les domaines de la sécurité, de la défenses et des affaires électorales », indique la résolution.

Elle précise également que le gouvernement a la responsabilité de conduire le désarmement, le redéploiement des services publics sur l’ensemble du territoire et l’organisation des élections.

La nomination du Premier ministre sera supervisée par Olusegun Obasanjo, le chef d’Etat du Nigeria et président en exercice de l’Union africaine (UA) et par son homologue sud-africain Thabo Mbeki, médiateur de l’UA dans la crise ivoirienne, depuis près d’un an. Les deux chefs d’Etat se rendront en Côte d’Ivoire à la fin de la semaine pour veiller au respect des conditionnalités fixées par l’ONU.

Cette semaine, le chef rebelle Soro avait confié à IRIN que le poste de Premier ministre devait revenir de facto à la rébellion puisqu’elle occupe plus de la moitié du territoire.

[Cote d'Ivoire] Rebel leader Guillaume Soro in his office in Bouake. [Date picture taken: 10/24/2005]
Guillaume Soro, le chef mouvement rebelle des Forces nouvelles

Même si certains diplomates pensent qu’il est peut probable que M. Gbagbo accepte la nomination de son principal adversaire au poste de Premier ministre, d’autres affirment cependant que le chef rebelle de 34 figure en bonne place sur la liste des candidats du G7, la coalition des partis de l’opposition.

« L’opposition a besoin d’un homme capable de s'opposer à Gbagbo », a déclaré Moussa Touré, rédacteur en chef du quotidien Nord-Sud, un journal de l’opposition. « Malgré son jeune âge, Soro a beaucoup d’autorité. Il a prouvé qu’il pouvait s’opposer à M. Gbagbo ».

S’il n’est pas nommé Premier ministre, Soro suggère que Louis-André Dacoury-Tabley, son adjoint au sein du mouvement des Forces rebelles et fin stratège politique, soit pressenti pour ce poste. Dans ce cas, Gbagbo devra collaborer avec son ancien meilleur ami devenu son pire ennemi.

Comme M. Gbagbo, M. Dacoury-Tabley est né en 1945 et a fait des études d’histoire. Il a été une figure importante du parti au pouvoir - le FPI (Front populaire ivoirien) – avant de rejoindre la rébellion en 2002.

Les premier ministrables

La personnalité la plus souvent citée pour le poste de Premier ministre est Charles Konan Banny, gouverneur de la Banque centrale des Etats d’Afrique de l’ouest depuis 1990.

Banny est originaire de Yamoussoukro, la capitale administrative du pays. C’est un personnage très influent au sein de l’ethnique des Baoulés qui sont traditionnellement des sympathisants du Parti Démocratique de la Côte d'Ivoire (PDCI).

Mais certains hauts responsables du PDCI, notamment son président, Henri Konan Bédié, considèrent M. Banny comme « un traite », a confié à IRIN un membre PDCI qui a souhaité garder l’anonymat.

La décision de M. Banny de se présenter en candidat indépendant aux élections présidentielles annulées avait été perçue comme une manœuvre pour diviser le parti et affaiblir son président.

« Il pourrait être un bon choix s’il acceptait de ne pas présenter sa candidature aux prochaines élections », a indiqué M. Yabi. C’est l’une des conditions liées à la nomination du prochain chef de gouvernement.

Pour certains analystes, les nombreuses relations dont dispose M. Banny dans la région pourraient redorer l’image du président Gbagbo auprès de ses homologues ouest-africains. En revanche, d’autres, pensent que son manque d’expérience pourrait en faire un simple exécutant de M. Gbagbo.

[Cote d'Ivoire] President Laurent Gbagbo in his study at the presidential residence in Abidjan. November 2004.
Le président Gbagbo


L’ancien ministre de l’Agriculture, Lambert Kouassi Konann, et le général à la retraite, Gaston Ouassenan Koné, pressenti en 2003 pour le ministère de la Défense avant de voir la proposition rejetée par Gbagbo, sont autant de candidats potentiels au poste de Premier ministre.

François Amichia, le maire de Treichville et Amara Essy, ancien médiateur et diplomate chevronné de l’UA, font aussi partie des candidats pouvant être retenus pour ce poste.

Ces quatre hommes ont fait leur carrière politique au sein du PDCI. Le général Ouassenan Koné est le personnage le plus controversé de tous, en raison de sa présumée participation, en tant que commandant, à des affrontements interethniques dans les années 1960. Ancien ministre de l’Agriculture, Kouassi Konan est apprécié par tous les protagonistes de la crise ivoirienne, mais il n’a pas une grande expérience politique.

Zemogo Fofana, membre du RDR (Rassemblement des Républicains), un parti d’opposition, et ministre de l’Enseignement supérieur dans le gouvernement de réconciliation nationale actuel, a également été pressenti, de même que l’universitaire Jacqueline Lohoues Oble, seule femme citée comme candidate premier ministrable.

Alors que le pays tout entier attend une décision, le G7, la coalition des partis de l’opposition, a fait savoir que ses ministres ne participeront plus au conseil des ministres du mercredi jusqu’à la nomination d’un nouveau Premier ministre.

« Le président Laurent Gbagbo a prêté serment le 26 octobre 2000 [donc] le 26 octobre 2005, son mandat prend fin », a déclaré mardi le porte-parole du G7, Alphonse Djédjé Mady, sous les applaudissements de nombreux sympathisants.

« A compter de demain, son mandat constitutionnel prend fin. Nous demandons à tous les ministres du G7 de ne plus prendre part au conseil des ministres et d'expédier les affaires courantes jusqu’à la formation d’un nouveau gouvernement ».


This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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