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Nino Vieira remporte une courte victoire face à Malam Bacai Sanha

Joao Bernardo « Nino » Vieira, l’ancien chef d’Etat militaire bissau-guinéen, a remporté une courte victoire au deuxième tour du scrutin présidentiel face à Malam Bacai Sanha, le candidat du Parti africain pour l’indépendance de la Guinée-Bissau et du Cap-Vert (PAIGC), le parti au pouvoir, selon les résultats provisoire publiés jeudi.

Selon Malam Mane, président de la Commission électorale nationale, M. Vieira, ancien membre du PAIGC, a remporté 52 pour cent des suffrages, soit 216 167 voix, au scrutin de dimanche dernier.

Avec 196 759 voix, soit plus de 19 000 voix de moins, son adversaire Malam Bacai Sanha n’a obtenu que 48 pour cent des suffrages, selon M. Mane.

« Les résultats qui viennent d’être annoncés sont la preuve incontestable de ma victoire », a déclaré à la presse M. Vieira, qui avait gouverné la Guinée-Bissau, petit pays d’Afrique de l’Ouest, entre 1980 et 1999.

Toutefois, selon Serifo Nhamado, directeur de campagne de M. Bacai Sanha, des « indices de fraude » auraient été relevés dans certaines régions.

M. Nhamado a exigé un nouveau scrutin à Bissau, la capitale, à Biombo, une localité proche de la capitale, à l’ouest, et à Bafata, une localité située 130 km à l’est.

Néanmoins, selon les analystes politiques, il est peu probable que la Commission électorale nationale satisfasse à sa demande.

Huit équipes d’observateurs internationaux, comprenant une mission de 80 membres envoyée par l’Union européenne, ont publié une déclaration conjointe lundi dernier. La déclaration stipule que le deuxième tour des élections a été « libre, impartial et transparent », tout comme le premier.

Malam Bacai Sanha était arrivé en tête à l’issue du premier tour de l’élection présidentielle du 19 juin, avec plus de 35 pour cent des suffrages, suivi de M. Vieira, avec 29 pour cent.

Mais au terme du scrutin, Nino Vieira a bénéficié du soutien de l’ancien président Kumba Yala, destitué en septembre 2003, à la suite d’un coup d’Etat sans effusion de sang.

Kumba Yala, leader du principal parti de l’opposition parlementaire, dispose d’une solide base électorale chez les Balantes, le groupe ethnique le plus important de Guinée-Bissau. Malgré tout, M. Yala était arrivé en troisième position à l’issue du premier tour, avec 25 pour cent des voix, et avait été contraint de se retirer de la course.

A Bissau, l’atmosphère était tendue jeudi matin. Les sympathisants de M. Vieira s’étaient rassemblés par milliers devant le quartier général de sa campagne, au centre-ville, pour fêter la victoire de leur candidat en dansant et en chantant. Au même moment, les partisans de M. Bacai Sanha, le candidat vaincu, se trouvaient rassemblés non loin de là, devant le quartier général du PAIGC.

Par la suite, les factions rivales ont commencé à se lancer des pierres et des bouteilles, mais la police est intervenue pour les séparer et, en milieu d’après-midi, les deux camps s’étaient dispersés, à l’exception d’un groupe de plusieurs centaines de sympathisants enthousiastes, qui continuaient à fêter la victoire de Vieira devant le quartier général.

M. Bacai Sanha avait occupé les fonctions de président par intérim pendant neuf mois après le renversement de M. Vieira, en 1999, au cours de la guerre civile. Soutenu par ses sympathisants, il a néanmoins appelé au calme.

« J’appelle tous mes sympathisants à demeurer calmes et sereins car Malam Bacai est contre la violence », a-t-il déclaré, à l’attention de ses partisans, rassemblés par centaines devant le quartier général du PAIGC. « Je défendrai ce qui nous appartient, quelles qu’en soient les conséquences », a-t-il toutefois ajouté.

La présidentielle devait marquer le retour au régime constitutionnel en Guinée-Bissau, après la guerre civile de 1998-1999, qui avait été suivie de plusieurs années d’instabilité politique et de chaos administratif.

Cependant, il est probable que la victoire de M. Vieira provoquera la démission du gouvernement actuel, constitué de membres du PAIGC, qui était arrivé au pouvoir à la suite des élections législatives de l’année dernière. Il y a également fort à parier que cette victoire sèmera le doute quant à la loyauté des forces armées.

« Si Nino Vieira remporte ces élections, je démissionne. Je ne cohabiterai jamais avec un bandit doublé d’un mercenaire qui a trahi son propre peuple », avait déclaré ce mois-ci le Premier ministre Carlos Gomes Junior, en apprenant que M. Yala avait décidé d’apporter son soutien à Nino Vieira au second tour de la présidentielle.

Le PAIGC contrôle actuellement 45 des 100 sièges de l’Assemblée. Mais des dissensions pourraient bien naître à l’arrivée de Vieira : il est possible qu’un grand nombre des membres du PAIGC désertent leur parti pour se rallier au nouveau président.

M. Vieira a débuté comme commandant au sein du mouvement de guérilla du PAIGC lorsque celui-ci n’était encore qu’un mouvement de libération qui combattait le régime colonial portugais. Nino Vieira a entretenu d’étroits liens avec le PAIGC pendant la majeure partie de sa carrière politique.

Après l’indépendance, en 1974, Nino Vieira est nommé général de l’armée. Il accède au pouvoir en 1980, à l’issue d’un coup d’Etat, et prend les rênes du PAIGC, parti qui lui permettra de gouverner le pays jusqu’à ce qu’il soit renversé, 19 ans plus tard.

Depuis lors, Nino Vieira, 67 ans, vit en exil au Portugal.

Néanmoins, lorsqu’il a annoncé, en avril dernier, qu’il prévoyait de faire un retour sur la scène politique, plusieurs grands noms du PAIGC se sont ralliés à sa cause.

En mai dernier, le comité central du PAIGC, une instance puissante, a suspendu 37 des 351 membres du parti parce que ceux-ci avaient choisi de soutenir ouvertement Nino Vieira lors des élections, le candidat officiel du PAIGC étant M. Bacai Sanha.

La victoire électorale de Nino Vieira pourrait également éroder la loyauté constante de l’armée envers le gouvernement élu.

Malgré son passé militaire, Nino Vieira n’inspire par confiance aux Balantes, qui dirigent et constituent, en grande partie, l’armée guinéenne.

En effet, alors qu’il était au pouvoir, Nino Vieira, qui appartient au groupe ethnique minoritaire des Pepels, a acquis la réputation de persécuter les Balantes ; une réputation devenue particulièrement tenace, en 1985, après l’exécution de six officiers balantes, accusés d’avoir fomenté un coup d’Etat contre le président. Plusieurs dizaines de soldats ont également été tués en secret pour avoir participé au complot présumé.

Par ailleurs, le retour de l’ex-président pourrait bien changer la donne, à l’échelle régionale.

Lorsque Nino Vieira était au pouvoir, les rebelles séparatistes de Casamance, une région du sud du Sénégal, pouvaient mener leurs opérations à partir de zones protégées situées de l’autre côté de la frontière, dans le nord de la Guinée-Bissau.

Ces zones leur ont été interdites peu après l’élection de Kumba Yala, en 2000. Par la suite, le gouvernement de transition formé après le renversement du président Yala, en 2003, a fait en sorte de rester en bons termes avec les autorités sénégalaises.

Néanmoins, Nino Vieira entretient d’étroites relations avec Lansana Conté, président de la Guinée-Conakry, pays limitrophe situé au sud de la Guinée-Bissau. Le président Conté avait prêté à Nino Vieira un hélicoptère de l’armée guinéenne, qui l’avait emmené en Guinée-Bissau, en avril dernier. L’ex-président retournait pour la première fois dans son pays, pour s’inscrire sur les listes électorales.

Au cours de sa campagne électorale, M. Vieira a tenté de mettre de côté son violent passé, se posant en défenseur de l’unité nationale, déterminé à promouvoir le développement économique et la reconstruction des infrastructures guinéennes.

« La Guinée-Bissau va évoluer. Notre Etat servira et protègera les droits sacrés de chaque homme, de chaque femme et de chaque enfant », a-t-il déclaré jeudi.

« Je félicite M. Malam Bacai Sanha, un démocrate dont les compétences seront toujours, j’en suis convaincu, au service de la Guinée-Bissau et du peuple guinéen », a-t-il déclaré au sujet de son adversaire vaincu, dans un effort de conciliation.

Selon la loi, la Commission électorale nationale est tenue de publier les résultats finaux du scrutin avant le 3 août, soit 10 jours après le second tour, qui s’est tenu le 24 juillet dernier.



This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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