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Les fonds commencent enfin à affluer

Tandis que les fonds commencent à être versés, les organisations humanitaires internationales se hâtent d’envoyer des aides alimentaires et des équipes médicales au Niger, un pays enclavé d’Afrique de l’Ouest où plus de deux millions de personnes survivent aujourd’hui en se nourrissant principalement de racines et de plantes sauvages.

Depuis des mois, les Nations unies, l’organisation humanitaire Médecins sans frontières (MSF) et le gouvernement nigérien mettent en garde la communauté internationale contre la menace bien réelle de pénuries alimentaires au Niger.

Par solidarité musulmane, certains pays arabes, Maroc, Algérie, Libye, Arabie saoudite et Emirats arabes unis, ont envoyé plusieurs avions chargés de nourriture au cours des dernières semaines.

Le tout premier avion d’aide alimentaire d’urgence envoyé par l’Occident est arrivé à Niamey jeudi dernier.

Réunir, une organisation humanitaire basée en France, l’ancienne puissance coloniale du Niger, a envoyé un avion-cargo Antonov 12, chargé d’huile végétale, de sucre et de Plumpy'nut, une pâte alimentaire pour enfants à haute teneur nutritionnelle.

Mais l’aide internationale, qui s’est fait attendre, commence tout juste à affluer.

Jan Egeland, coordinateur des secours d’urgence des Nations unies, a déclaré vendredi que la communauté internationale avait envoyé plus d’argent au Niger ces dix derniers jours qu’elle ne l’avait fait au cours des dix derniers mois.

M. Egeland a déploré à maintes reprises la réaction lente de la communauté internationale face à la famine naissante au Niger, le deuxième pays le plus pauvre du monde, selon l’Indice de développement humain des Nations unies.

Selon les estimations des autorités nigériennes, jusqu’à 3,6 millions de personnes seront confrontées à une pénurie alimentaire au cours de cette année. Les champs de céréales et les pâturages nigériens ont en effet été dévastés par la sécheresse et l’invasion massive de criquets pèlerins qui avaient marqué l’année 2004.

M. Egeland appelle à la création d’un fonds d’urgence

Lors d’une conférence de presse, à Genève, M. Egeland a appelé à la création d’une réserve d’urgence que les Nations unies pourraient utiliser immédiatement en cas de crise, en attendant de trouver des fonds.

Jusqu’à ce jour, les bailleurs de fonds ont consacré 10 millions de dollars américains à la crise au Niger, soit un tiers de la somme totale demandée par les Nations unies (30,7 millions), selon M. Egeland.

La somme initialement demandée, qui avait été augmentée de 12 millions de dollars américains la semaine dernière, sera probablement revue à la hausse de nouveau dans un futur proche, selon lui.

Les représentants des Nations unies et les travailleurs humanitaires se sont déclarés soulagés de voir que les principaux bailleurs internationaux, et notamment les Etats-Unis, l’Union européenne, la Grande-Bretagne et l’Allemagne, commençaient enfin à prêter main forte au peuple nigérien.

Selon eux, toutefois, l’aide arrive trop tard pour beaucoup d’habitants des villages reculés et désertiques du Niger.

« Personne ne nous a écouté », a déclaré jeudi Natasha Kofoworola Quist d’Oxfam - Grande-Bretagne, alors qu’elle se trouvait à Niamey, la capitale nigérienne.

« Heureusement, les choses sont en train d’évoluer, mais il est certain que des enfants vont mourir ».

Save the Children – Royaume Uni, Oxfam – Grande-Bretagne, l’organisation caritative irlandaise Concern Worldwide ainsi que beaucoup d’autres organisations humanitaires internationales ont annoncé cette semaine qu’elles enverraient des équipes de secours d’urgence au Niger.

La couverture médiatique de la crise a suscité l’intérêt des bailleurs de fonds

Jusqu’à présent, le Programme alimentaire mondial (PAM) n’a reçu que 5 millions de dollars américains sur les 16 millions initialement demandés. C’est ce qu’a déclaré vendredi Gian Carlo Cirri, le représentant du PAM au Niger. Qui plus est, la majeure partie de cette somme n’a été versée qu’au cours des dernières semaines.

« La couverture médiatique de la crise au Niger a suscité l’intérêt des bailleurs », a-t-il expliqué. « Pour ce qui est des fonds, la situation s’améliore, mais nous n’avons pas encore tous les fonds nécessaires ».

Pour les travailleurs humanitaires, ce sont les questions d’ordre humanitaire, et notamment la hausse spectaculaire des taux de malnutrition chez les enfants nigériens, qui ont fini par réveiller la conscience de la communauté internationale.

« Cette année a été assez désastreuse pour que le Niger tombe au-dessous de la limite et se fasse enfin remarquer », a déclaré Nigel Tricks, directeur de la branche nigérienne de Concern Worldwide.

« Le Niger est un pays laissé pour compte », a-t-il ajouté. « Il survit depuis des années dans des conditions très difficiles. La communauté internationale néglige les populations démunies du Niger depuis des dizaines d’années ».

Les récoltes de l’année 2004 ont été particulièrement désastreuses pour le Niger, qui présente aujourd’hui un déficit alimentaire de 223 000 tonnes – le plus considérable jamais enregistré depuis 20 ans.

Les Nations unies estiment que 2,5 millions de Nigériens, sur une population totale de 12 millions, survivent avec moins d’un repas par jour, et se nourrissent de racines et de plantes sauvages.

Selon les estimations du Bureau des Nations unies pour la coordination des affaires humanitaires (OCHA), jusqu’à 150 000 enfants de moins de cinq ans souffriraient de malnutrition aiguë au Niger.

Les centres de nutrition thérapeutique mis en place, en petit nombre, par MSF et d’autres organisations humanitaires enregistrent tous les jours des décès de nourrissons.

La prochaine récolte prévue pour fin septembre

Selon les experts humanitaires, il est crucial d’envoyer des aides alimentaires au Niger dans le courant du mois prochain afin de maintenir le peuple nigérien en vie en attendant les prochaines récoltes, prévues pour la fin du mois de septembre.

La saison des pluies a bien commencé à la fin du mois de mai et les cultures plantées depuis lors poussent bien ; mais la plupart des greniers sont vides, les prix des denrées alimentaires ont plus que doublé sur les marchés et il faudra encore patienter 10 semaines avant les nouvelles récoltes.

En attendant, beaucoup de villageois nigériens devront survivre avec le peu de nourriture qu’ils trouveront à se mettre sous la dent. A moins qu’ils ne bénéficient, au plus vite, de l’aide alimentaire internationale.

Les bergers nomades, qui ont vu leurs bêtes mourir une par une de faim et de soif, sont encore plus exposés à la famine que les paysans. Selon les travailleurs, il leur faudra au moins deux ans pour reconstituer leurs cheptels.

Cette semaine, à Niamey, les travailleurs humanitaires, les représentants des autorités et ceux des Nations unies se sont rencontrés pour mettre au point des plans de distribution gratuite de nourriture dans les régions les plus touchées.

Save the Children – Royaume Uni, qui n’avait pas auparavant de bureau au Niger, a dépêché au début du mois de juillet des nutritionnistes et des logisticiens à Maradi et à Zinder, deux villes du sud du Niger. Ceux-ci sont chargés de diriger des programmes de nutrition destinés aux enfants mal nourris, selon une spécialiste des secours d’urgence qui travaille pour l’organisation.

D’après elle, il a été particulièrement difficile de convaincre les bailleurs internationaux de mettre la main au portefeuille pour juguler la crise au Niger, un pays où sécheresse et famine ne suscitent plus l’intérêt des médias depuis des années.

« Maintenant que des enfants sont en train de mourir, le Niger est devenu un sujet croustillant »

« Quand Save the Children dit "Nous avons besoin d’argent pour le Niger", les gens disent "Pourquoi ?" », a-t-elle expliqué. « Les bailleurs ne veulent pas donner quand la cause n’est pas assez croustillante. Maintenant que des enfants sont en train de mourir, le Niger est devenu un sujet à la mode ».

Le comble de l’ironie, pour Mme Quist d’Oxfam – Grande-Bretagne, c’est que la communauté internationale ait oublié le Niger alors même que se déroulait, en Ecosse, le dernier sommet du G8. Au cours de cette rencontre fortement médiatisée, les pays les plus riches du monde s’étaient engagés à faire de la lutte contre la pauvreté en Afrique une priorité.

« Ils disent qu’ils veulent éradiquer la pauvreté et mettre l’Afrique à l’ordre du jour », a déclaré Mme Quist. « En attendant, des gens meurent. »

« Pour certains Nigériens, il est déjà trop tard. Il est également trop tard pour beaucoup de bêtes. Et ces bêtes constituent le moyen de subsistance du peuple. Mais nous pouvons encore sauver une partie de la population », a-t-elle poursuivi.

Oxfam – Grande-Bretagne est d’ailleurs en train de mettre en place un programme d’aide alimentaire, doté d’un budget de 2 millions de dollars américains, qui permettra de nourrir au moins 130 000 personnes. L’organisation prévoit également d’aider les bergers nomades à reconstituer leurs cheptels.

Selon M. Tricks de Concern Worldwide, qui vit au Niger depuis un an, si les dirigeants des pays du G8 sont véritablement déterminés à aider l’Afrique, ils doivent tout mettre en œuvre pour prévenir de telles crises.

« Oublions un instant la situation du Niger en 2005 », a-t-il suggéré. « La situation actuelle traduit un problème plus alarmant. Elle est le résultat du peu d’intérêt accordé à la résolution des problèmes graves qui affectent l’Afrique subsaharienne ».

Concern Worldwide a envoyé une douzaine de travailleurs humanitaires internationaux pour diriger des programmes d’aide alimentaire dans la région de Tahoua, au Niger.

Depuis quelques mois, les autorités nigériennes subventionnaient les ventes de vivres dans les régions les plus touchées. Elles ont toutefois accepté la semaine dernière de procéder à des distributions de nourriture gratuite dans ces mêmes régions.

Seidou Bakari, responsable de la cellule de crise alimentaire rattachée au cabinet du Premier ministre nigérien, a déclaré à IRIN vendredi qu’il travaillait en ce moment en collaboration avec des travailleurs humanitaires internationaux pour définir un plan de distribution d’aide alimentaire gratuite destinée à nourrir 1,6 millions de personnes.

Tandis que les autorités en appellent à la générosité des bailleurs internationaux, les Nigériens eux-mêmes mettent la main au portefeuille pour aider leurs compatriotes.

Au Niger, le revenu annuel moyen par habitant ne dépasse pas 190 dollars américains. Pourtant, selon la cellule de crise, les autorités ont reçu 832 millions de francs CFA (environ 1,5 millions de dollars américains) pour nourrir les plus démunis, en réponse à l’appel lancé en mai dernier par le Premier ministre.

This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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