Après plusieurs marches des partis d’opposition dans les rues de la capitale Lomé et les sanctions imposées au Togo par la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO) et l’Union africaine (UA), Gnassingbe a annoncé dans un discours télévisé qu’il démissionnait de ses fonctions, mais qu’il avait l’intention de se présenter aux prochaines élections présidentielles.
Il a ajouté que le vice-président de l’assemblée nationale Abass Bonfoh assumerait désormais les fonctions de chef de l’Etat par intérim pour organiser des élections présidentielles dans les prochaines semaines.
“Afin de garantir la transparence de cette élection, son équité, et de donner les mêmes chances à tous les candidats, j'ai décidé de renoncer au poste de président de l'Assemblée nationale assurant provisoirement les fonctions de président de la République”, a déclaré Gnassingbe.
Au terme de son congrès extraordinaire, qui s’est tenu vendredi à Lomé, le Rassemblement du peuple togolais (RPT) a désigné Gnassingbe candidat du parti pour le prochain scrutin. Le RPT a été crée par feu le président Gnassingbe Eyadéma et détient 79 des 81 sièges à l’Assemblée nationale.
Aucune date n’a été fixée pour la tenue des élections et en l’état actuel de la situation, personne ne sait si le leader de l’opposition Gilchrist Olympio, qui vit en exil depuis des années, sera autorisé à se présenter à la candidature suprême.
En annonçant sa décision de renoncer à ses fonctions de Président par intérim, Gnassingbe a indiqué qu’il avait tenu compte des précieux conseils de chefs d’Etat africains et d’autres personnalités du monde politique, ainsi que des recommandations des organisations internationales dont le Togo est membre.
La veille de sa démission, Gnassingbe avait rendu une visite aux présidents Omar Bongo du Gabon et Mouammar Khaddafi de Libye.
A l’instar d’Eyadema, ces deux chefs d’Etat autoritaires dirigent leur pays depuis près de quarante ans. Et selon certains diplomates, comme le Président défunt, ils préparent leur fils préféré à prendre leur succession en cas de vacance du pouvoir.
La décision de Gnassingbe de renoncer aux fonctions de président par intérim et d’organiser des élections présidentielles conformément aux dispositions de la constitution a été bien accueillie par la CEDEAO qui a aussitôt levé samedi les sanctions diplomatiques prises à l’encontre du Togo.
Dans un communiqué, l’organisation a indiqué que la nomination du président de l’assemblée nationale comme chef d’Etat par intérim était "un pas positif vers le retour à la légalité constitutionnelle."
La CEDEAO a cependant réitéré son appel pour que des élections présidentielles "libres, justes et transparentes" soient organisées dans un délai de 60 jours.
Mais l’annonce de la démission de Gnassingbe et de son départ prochain de la présidence de la république n’a pas pour autant impressionné les partis d’opposition.
Tous continuent d’exiger que Fambare Ouattara Natchaba, l’ancien président de l’assemblée nationale destitué par le parlement et remplacé par Gnassingbe, soit nommé chef d’Etat par intérim, conformément au texte de la constitution qui prévalait avant le décès d’Eyadema.
Au cours d’une marche pacifique, des milliers de manifestants de l’opposition sont redescendus dans les rues de la capitale samedi pour exiger le respect de cette disposition de la constitution.
Dimanche, des groupes de femmes opposées au régime ont organisé une nouvelle marche. Toutes vêtues de rouge, pour symboliser le sang et le danger, des milliers de femmes ont défilé dans les rues au cri de “Nous ne voulons pas Bonfoh, nous voulons Natchaba.”
L’avion qui transportait Natchaba n’a pas reçu l’autorisation de se poser à Lomé alors que le président de l’assemblée nationale rentrait précipitamment au Togo à l’annonce du décès d’Eyadema. Le 6 février, il était destitué par les députés qui nommaient dans la foulée Gnassingbe au poste de nouveau président de l’assemblée nationale.
Depuis, Natchaba est en exil à Cotonou, la capitale du Bénin voisin.
Les organisations de femmes proches du pouvoir ont organisé dimanche une contre-manifestation. Ces femmes arboraient des foulards blancs en signe de deuil pour le Président défunt, considéré par les autorités actuelles comme le "père de la nation".
Les deux marches se sont croisées sans qu’aucun incident ne soit déploré mais, plus tard, des groupes de jeunes en colère se sont opposés aux forces de l’ordre dans le quartier Bé de Lomé, le fief de l’opposition.
Les manifestants ont utilisé des troncs d’arbre et brûlé des pneus pour bloquer l’accès aux routes. Ils ont jeté des pierres sur les forces de l’ordre qui ont riposté par des tirs de grenades lacrymogènes.
Selon un correspondant d’IRIN présent sur les lieux, des coups de feu ont éclaté et un manifestant aurait été blessé à la jambe par des militaires qui tiraient à balle réelle sur la foule.
Les incidents se poursuivaient encore à Bé à la tombée de la nuit, mais la situation était redevenue calme dans le reste de la capitale Lomé, une ville portuaire de quelque 800 000 habitants.
Bien que Gnassingbe ait annoncé que Bonfoh assurerait les fonctions de chef d’Etat par intérim, aucune disposition immédiate n’a été prise pour l’installer dans ses fonctions.
Dimanche soir, soit deux jours après que Gnassingbe ait demandé à Bonfoh de prendre les rênes du pouvoir, le nouveau chef d’Etat par intérim n’avait pas encore prêté serment officiellement et ne s’était toujours pas adressé à la nation en tant que nouveau président du Togo.
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