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Toutes les parties réaffirment leur adhésion au processus de paix, mais qu’est-ce que cela va changer ?

Le président sud-africain Thabo Mbeki a quitté la Côte d’Ivoire à la fin de sa mission de médiation après avoir obtenu de toutes les parties en conflit la promesse de relancer un processus de paix presque moribond.

Mais personne ne peut dire si ses efforts seront couronnés de succès ou si le gouvernement et les rebelles retomberont dans les mêmes travers en s’accusant mutuellement d’être responsable de l’échec du processus de paix.

Envoyé comme médiateur par l’Union africaine pour empêcher que la Côte d’Ivoire ne plonge à nouveau dans la guerre civile, Mbeki a indiqué que les parties au conflit se sont engagées à faire voter les réformes politiques et à désarmer, à reprendre les activités du gouvernement de réconciliation nationale et à restaurer la sécurité dans les rues de la capitale économique Abidjan.

"Toutes les parties ont été d’accord pour respecter ces engagements," a indiqué lundi Mbeki lors de la conférence de presse qui a ponctué sa mission de cinq jours. "Des programmes spécifiques doivent donc être mis en place."

Mais le Président sud-africain – qui était accompagné d’une délégation composée de représentants des Nations unies, de l’Union européenne, de la Banque mondiale et d’organismes panafricains – n’a pas voulu fixer d’échéances pour le processus de paix en Côte d’Ivoire.

"Je suis convaincu que les choses seront un peu plus claires d’ici la fin de la semaine et nous verrons alors s’il est possible d’établir des calendriers spécifiques," a t-il commenté.

Les échéances des différentes actions recommandées par les accords de paix ont plusieurs fois été ignorées par les deux protagonistes du conflit qui a éclaté en septembre 2002 à la suite d’une tentative de coup d’Etat contre le président Laurent Gbagbo. Depuis cet événement, la Côte d’Ivoire est coupée en deux, le sud étant contrôlé par le gouvernement et le nord par les rebelles des Forces Nouvelles.

Selon les conclusions du sommet panafricain qui s’est tenu en juillet dernier dans la capitale ghanéenne Accra, le gouvernement ivoirien devait voter une série de réformes politiques avant la fin du mois de septembre et le désarmement des forces rebelles devait démarrer le 15 octobre. Aucune de ces échéances n’ayant été respectée, le processus de paix s’est retrouvé dans l’impasse.

Début novembre, le gouvernement a tenté d’en sortir en déclenchant une offensive militaire sur le nord, rompant ainsi un cessez-le-feu en vigueur depuis 18 mois.

Des émeutes ont éclaté dans les rues d’Abidjan, des milliers d’expatriés ont quitté la Côte d’Ivoire, un pays ouest-africain connu autrefois pour sa prospérité économique. La communauté internationale est intervenue pour ramener le calme dans le pays.

Au terme de sa deuxième mission en deux mois, Mbeki a fait remarquer lundi que la base du processus de paix restaient les accords de Marcoussis signés en 2003 sous l’égide de la France – des accords vis-à-vis desquels Gbagbo n’a jamais caché son aversion.

"Le programme de Mbeki, c’est un programme déjà connu. Aucune différence. On peut cogiter une dizaine de fois, il n’y aura pas mieux Marcoussis," a confié mardi à IRIN un diplomate ouest africain.

Des raisons d’être pessimiste

Il y a de nombreuses raisons d’être pessimiste quant aux chances de ces engagements à être respectés et Mbeki le reconnaît.

"Je suis persuadé qu’il y a un manque de confiance de part et d’autre," a t-il dit. "S’il n’y avait pas ce manque de confiance, il n’y aurait pas eu de conflit ; mais je reste convaincu que si tout le monde respecte ses engagements, les choses s’amélioreront."

Le diplomate ouest-africain partage cet avis. "Ce sera l’incertitude jusqu’au bout," a t-il dit. "Mais les pressions n’ont jamais atteint un tel degré."

D’après certains analystes, l’offensive avortée de Gbagbo sur le nord a mis en lumière les limites de son armée et accentué l’isolement du Président au niveau international, l’Union africaine et les pays de la francophonie ayant sévèrement critiqué cette attaque.

La destruction des moyens aériens de l’armée ivoirienne par les forces françaises, en représailles à la mort de neuf soldats français de maintien de la paix tués lors d’un raid de l’aviation ivoirienne, a été un autre coup porté au président Gbagbo.

Le mois dernier, le Conseil de sécurité des Nations unies imposait un embargo sur la vente d’armes à la Côte d’Ivoire et menaçait de faire voter le 15 décembre une interdiction de voyager et un gel des avoirs à l’encontre de toute personne qui entraverait le bon déroulement du processus de paix.

Mais ces sanctions graduelles permettront-elles de faire sauter les verrous ?

"Rien de concret!" titrait le quotidien indépendant d’Abidjan Soir-Info.

"S’il est trop tôt pour parler d’échec de la médiation du président Mbeki en Côte d’Ivoire, les ‘accords’ obtenus sont loin de sauver le pays," indique le journal dans son éditorial.

Jusqu’à présent, la seule mesure concrète de la médiation de Mbeki concerne la très controversée révision de l’article 35 – une disposition de la constitution qui remonte à juillet 2000 et qui interdit à une personne dont les deux parents ne sont pas de nationalité ivoirienne de se présenter aux élections présidentielles.

Alassane Ouattara, le très populaire candidat de l’opposition soutenu par les populations du nord majoritairement musulmanes, n’a pu se présenter aux élections de 2000 en raison de cette disposition. Il ne pourra pas non plus faire acte de candidature pour les prochaines élections prévues en octobre 2005, si cet article de la constitution n’est pas amendé.

Référendum ou pas?

Gbagbo a fait savoir au cours du week end qu’il soumettrait le projet d’amendement au parlement – ce dernier l’étudierait début janvier.

Mais il n’a pas caché qu’il souhaite la tenue d’un référendum pour trancher cette affaire et cette consultation ne pourra avoir lieu que si les rebelles sont désarmés et que le pays est réunifié. Cette question n’a pas été abordée lors de la conférence de presse de Mbeki.

Le Président sud-africain n’a pas non plus donné de détails sur un autre problème crucial : le désarmement des rebelles. Il n’a pas voulu préciser comment et quand le désarmement se fera.

Au cours de sa mission, le président Mbeki a rencontré à Abidjan le Premier ministre, des parlementaires et des responsables des partis d’opposition. Il s’est également rendu dimanche dernier à Bouaké, le fief des rebelles. Mbeki est le premier chef d’Etat à visiter cette ville depuis le début de la crise.

Le président Mbeki y a été accueilli aussi chaleureusement qu’à Abidjan par des milliers de personnes massées dans les rues -- mais scandant des messages demandant le départ de Gbagbo.

Le président sud-africain, qui fut l’artisan des accords de paix au Burundi et en République démocratique du Congo, a indiqué qu’il envisageait de revenir régulièrement en Côte d’Ivoire pour s’assurer que toutes les parties respectent leurs promesses.

L’Union africaine a fait savoir que son Conseil de paix et de sécurité a reporté au 10 janvier 2005 sa réunion sur la crise en Côte d’Ivoire prévue initialement le 10 décembre, afin de permettre à Mbeki de poursuivre ses efforts de paix.

Albert Tevoedjre ne sera pas témoin de leurs succès : lundi, le représentant spécial du secrétaire général des Nations unies en Côte d’Ivoire a annoncé sa démission.

Critiqué aussi bien par le gouvernement que par les rebelles, ce Béninois de 75 ans a indiqué que son âge avait influé sur sa décision, ainsi que la situation actuelle de la Côte d’Ivoire et la rupture du cessez-le-feu du 4 novembre.

"Tout ce que nous avons fait jusqu’à présent est maintenant détruit," a confié à IRIN Tevoedjre, nommé en février 2003. "Les deux parties doivent faire preuve de volonté et surtout de plus de bonne foi."





This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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