Seabra Correia et le colonel Domingos de Barros, responsable des ressources humaines, ont été tués mercredi à l’état-major aux premières heures de la mutinerie, a déclaré à la presse le ministre de la Défense.
Le Portugal, ancienne puissance coloniale, a indiqué qu’une tentative de coup d’état était en cours dans ce pays d’Afrique de l’Ouest. Dans une déclaration publiée jeudi, les mutins ont fait savoir que leur mouvement n’était motivé que par des revendications salariales et non par la volonté de renverser le gouvernement élu de Guinée Bissau.
«Ce n’est pas un coup d’état…il s’agit d’une simple revendication salariale et non d’une tentative de déstabilisation ou d’insurrection,» ont indiqué les mutins.
Le document ne mentionne pas la mort de Correia Seabra ni du colonel de Barros, mais le ministre de la Défense a indiqué à la presse que les coupables n’avaient pas encore été identifiés.
La mutinerie a commencé mercredi, apparemment menée par un bataillon de 600 soldats, revenus en juillet à Bissau après une mission de neuf mois au Liberia dans le cadre de la mission de maintien de la paix des Nations Unies. Plusieurs soldats ont confié à IRIN qu’ils revendiquaient le paiement de leurs arriérés de salaires dont le montant s’élevait pour chacun d’eux à 1 428 dollars US.
Correia Seabra a été arrêté, mais plusieurs responsables militaires ont réussi à s’enfuir. Outre les douzaines de militaires lourdement armés qui patrouillaient dans les rues de la capitale où tout semblait normal jeudi.
Des témoins ont constaté aucune présence anormale de militaires dans les rues, les boutiques, les marchés et les établissements publics avaient ouvert et l’atmosphère semblait détendue.
Le premier ministre Carlos Gomes Junior a accusé sans les nommer des leaders l’opposition d’être à l’origine de la rébellion et des diplomates d’Afrique de l’Ouest ont vite fait d’incriminer l’ancien président Kumba Yalla et ses partisans.
Yalla a été renversé par Correia Seabra le 14 septembre 2003, lors d’un coup d’état sans effusion de sang. Le parti de la rénovation sociale (PRS) de Yalla a ensuite perdu les élections législatives du mois de mars au profit du parti africain pour l’indépendance de la Guinée Bissau et du Cap-Vert (PAIGC).
Le PRS ne s’est pas encore prononcé sur les événements survenus cette semaine en Guinée Bissau, mais le chef du parti, Artur Sanha, a déclaré dans un entretien radiodiffusé qu’il ferait connaître vendredi la position de son parti.
Des diplomates indiquent qu’au-delà des divergences politiques entre partis, il existe de profondes tensions ethniques. Le PRS est soutenu par le groupe des Balante qui représente 30 pour cent des 1,3 millions d’habitants du pays et occupe la plupart des fonctions gouvernementales. Correia Seabra appartenait au groupe minoritaire des Pepel.
Les mutins se sont entretenus pendant plusieurs heures avec une délégation du gouvernement conduite par le ministre des Affaires étrangères Soares Sambu. Le représentant spécial en Guinée Bissau du secrétaire général des Nations Unies, Joao Bernardo Honwana, assistait également à cette réunion.
Les mutins étaient représentés par le général Pagme Nawai, l’inspecteur général des forces armées, et par le colonel Aniseto Naslak, le chef de l’unité d’élite aéroportée de l’armée.
Jeudi, les mutins ont publié un texte signé du major Baute Iamta Naman, un personnage peu connu de la hiérarchie militaire, dans lequel ils ont fait part d’une série de doléances. Il y fait mention des piteuses conditions de vie dans les casernes, de la corruption chronique qui sévit au sein du haut commandement militaire et du manque de préoccupation des commandants pour le bien être des hommes du rang.
La Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et la Communauté des pays lusophones (CPLP), qui ont joué un rôle déterminant dans le rétablissement de la démocratie en Guinée Bissau après le coup d’état de juin 2003, ont dépêché jeudi une mission de haut niveau à Bissau.
De sources diplomatiques à Dakar, on indique que la délégation de la CEDEAO serait conduite par le secrétaire exécutif de l’organisation, Mohamed Ibn Chambas, et par le ministre sénégalais des Affaires étrangères, Cheikh Tidiane Gadio. La délégation est attendue jeudi soir à Bissau.
A Lisbonne, le porte-parole du ministère des Affaires étrangères portugais a indiqué que la délégation du CPLP serait conduite par Jose Ramos Horta, le ministre des Affaires étrangères du Timor oriental qui a joué un rôle capital dans la crise de l’année dernière, et par Ovideo Pequeno, son homologue de Sao Tome et Principe.
Le gouvernement de Guinée Bissau s’est réuni en urgence jeudi matin et les ministres sont sortis de la réunion sans faire le moindre commentaire.
Le président par intérim, Henrique Rosa, a présidé plus tard au palais présidentiel une série d’entretiens entre le gouvernement et les mutins en présence du représentant des Nations Unies en Guinée Bissau.
Homme d’affaires très respecté, Rosa a supervisé les premières élections multipartites tenues en Guinée Bissau en 1994. Il a été choisi par consensus après le coup d’état de 2003 pour assurer la fonction de chef d’Etat jusqu’aux prochaines élections présidentielles, prévues en mars 2005.
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