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Félicien Kabuga, un suspect de génocide en fuite

Félicien Kabuga, l'un des suspects de génocide les plus recherchés - dont la
photo a été publiée cette semaine par les journaux kenyans avec une offre de
récompense de la part du gouvernement américain de cinq millions de dollars
pour toute information entraînant son arrestation - se soustrait à la
justice kenyane et à celle d'autres pays depuis des années.

M. Kabuga a été condamné par le Tribunal international pour le Rwanda (TPIR)en 1998. Il est accusé d'avoir été le « principal sympathisant et pourvoyeur de fonds de la milice Interahamwe » responsable du génocide de 1994. Il est aussi accusé d'avoir effectué des « achats massifs de machettes, de houes et d'autres outils agricoles en sachant qu'il serviraient à commettre des crimes. Il était également copropriétaire de Radio Télévision Mille Collines
au Rwanda, la station tristement célèbre - qui ordonnait aux Hutus de tuer des Tutsis - et baptisée « la voix du génocide » par l'association Human Rights Watch.

En août 2001, le gouvernement rwandais a déclaré que le millionaire hutu
vivait en exil dans la capitale kenyane, Nairobi, et a demandé au
gouvernement kenyan de l'arrêter. « S'il existait une réelle coopération de
la part du gouvernement kenyan, Kabuga pourrait être arrêté à tout moment
car les autorités kenyanes savent où il se trouve, » avait alors confié à
Reuters un responsable rwandais sous couvert de l'anonymat.

Cette même personne a également affirmé que l'Organisation de sécurité
extérieure du Rwanda détenait des éléments de preuve, notamment les
enregistrements d'appels téléphoniques que Kabuga avait passés de Nairobi à
des membres de sa famille à Bruxelles. « Il est déplorable que certains pays - les voisins du Rwanda, et même ceux qui prétendent être nos amis - continuent de se montrer peu ou pas coopératifs pour retrouver et extrader les suspects de génocide connus qui ont trouvé refuge dans ces pays en question, » a déclaré le ministre rwandais de la justice cité par Reuters.

Le ministre kenyan des affaires étrangères d'alors, Chris Obure, avait
répondu que le gouvernement kenyan ne savait pas que M. Kabuga résidait au
Kenya. « Le gouvernement serait prêt à apporter sa collaboration pour
extrader Félicien Kabuga si son extradition est requise et dans la mesure où il se trouve dans les limites de notre juridiction, » avait-il indiqué à la presse.

Le procureur général du Kenya, Amos Wako, s'est fait l'écho, mercredi à
Nairobi, de la position du gouvernement : « Le Kenya n'est pas le sanctuaire des personnes reconnues coupables de crimes de guerre par le TPIR. Par conséquent, il [Kabuga] ne mettra probablement pas les pieds sur le sol kenyan, » a-t-il répondu à la presse.

Les enquêteurs du TPIR avaient, néanmoins, découvert l'existence de
plusieurs résidences de Kabuga au Kenya - à Nairobi, à Nakuru et à Eldoret - dont, selon leurs sources, trois d'entre elles appartenaient à Hosea Kiplagat, le neveu du président kenyan Daniel arap Moi, a informé l'
organisme « International Crisis Group » (ICG) en 2001. L'une de ses
résidences était attenante à une autre villa qui appartenait à l'un des fils
du président kenyan, Gideon Moi.

M. Kabuga possédait également une maison à Nairobi jusqu'en juin 2001 -
lorsque l'ICG a publié ce rapport, intitulé « Le Tribunal international pour le Rwanda : lenteur de justice » - qui, peu de temps auparavant, était louée par une agence immobilière, à un travailleur de la Croix-Rouge non averti.Kabuga a également dirigé une entreprise de transport entre Mombasa et le Rwanda, à partir d'une résidence située à Nairobi et, en 1995, a créé l'
entreprise d'import-export, Nshikabem, qui figure sur l'annuaire
téléphonique du Kenya de l'an 2000.

En juillet 1997, Kabuga ainsi que deux autres personnes reconnues coupables
par le TPIR, sont parvenus à échapper à une opération de police montée par
les autorités kenyanes. Les enquêteurs ont trouvé, plus tard, dans la
résidence où s'était caché Kabuga, dans une banlieue de Nairobi à Karen, une note manuscrite expliquant qu'il avait pu évacuer les lieux avant l'arrivée des forces de l'ordre grâce à un officier de police kenyan qui l'avait prévenu de cette opération, a rapporté l'ICG. Un groupe de défense d'
intérêts, Prevent Genocide International, a rapporté que Kabuga se trouvaità bord d'un avion à destination des Seychelles au moment de la descente de police.

« Les hautes autorités kenyanes sont encore soupçonnées de l'avoir
protégé, » a indiqué l'ICG.

En août 1995, l'un des fils du défunt président rwandais, Juvénal
Habyarimana, a épousé la fille de Kabuga à Nairobi où fut donnée une
réception en présence de 350 invités. La note de cette réception était
adressée aux bons soins de Susan Matiba, la fille de Kenneth Matiba, « l'un des plus grands hôteliers et le candidat le plus sérieux à l'élection
présidentielle de 1992 », a précisé ICG.

Au lendemain du génocide rwandais, Kabuga s'est d'abord réfugié en Suisse,
puis après avoir reçu l'ordre de quitter le pays, il a rejoint l'ex-Zaïreavant de « venir s'installer à Nairobi », selon l'ICG. « Grâce à son réseau de contacts, sa fortune personnelle considérable et probablement muni d'une série de différents passeports, il a toujours réussi à échapper à la justice. »

Carla del Ponte, procureur général du TPIR, s'est employée à faire
confisquer ses biens financiers, selon l'ICG, et à réussi à faire bloquer
ses comptes bancaires en France, en Suisse et en Belgique. Le Kenya ainsi
que d'autres Etats africains avaient également été appelés à satisfaire une
requête similaire.

A la question de savoir si Kabuga se trouve encore au Kenya, Pierre-Richard
Prosper, chargé de mission américain pour les crimes de guerre a déclaré
mercredi à la presse à Nairobi que Kabuga était « passé » par le pays. Il a ajouté que de « nouvelles informations » avaient permis de découvrir le lieu où il se trouvait, ajoutant que le gouvernement kenyan s'était engagé à collaborer dans le cadre de cette enquête.

« Notre but est d'obtenir la collaboration du gouvernement [kenyan]. Mais seuls les résultats en témoigneront, » a-t-il conclu.


This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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