1. Accueil
  2. East Africa
  3. Rwanda

La formation des juges des tribunaux gacaca commence

La formation de quelque 255 000 juges qui présideront les tribunaux gacaca au Rwanda - une forme de justice traditionnelle ou populaire pour les personnes accusées de participation au génocide de 1994, a commencé lundi. Toutes les catégories de génocide, sauf les plus graves d'entre eux, seront jugées par ces tribunaux.

Au total, 781 instructeurs gacaca ont été formés entre le 4 février et le 14 mars, tous des magistrats ou des étudiants en dernière année de droit, a rapporté Hirondelle. Les formateurs sont connus comme « les intègres », car ils ont été choisis par leur propre communauté en raison de leur intégrité.

Depuis 1996, le droit rwandais a divisé les suspects de génocide en quatre catégories, qui seront jugées à quatre niveaux administratifs par les tribunaux gacaca, toujours selon Hirondelle. La catégorie 4 concerne les personnes accusées du pillage ou de la destruction des biens des victimes durant le génocide ; la catégorie 3 est définie comme celle de « personnes ayant commis ou s'étant rendues complices d'attaques graves sans intention de causer la mort des victimes » ; la catégorie 2 s'applique aux personnes accusées d'homicide ; et la catégorie 1 concerne celles accusées de viol et d'autres actes de torture sexuelle.

Ni les accusés ni les victimes n'ont droit à un avocat, comme l'accusé n'a pas non plus le droit de faire appel contre la catégorisation de son crime, une désignation impliquant de grandes conséquences quant à la peine possible. Ceux assignés à la catégorie 1 seront condamnés à mort s'ils sont jugés coupables.

S'adressant à des journalistes le 6 avril à Kigali, la capitale rwandaise, le président Paul Kagame a indiqué que la peine de mort constitue un problème que le Rwanda examinera dans le futur. Il a déclaré que quand il sera abordé « il y aura des difficultés ».

Il a rappelé que la question a été soulevée il y a quelque temps, mais qu'elle a été abandonnée, certains Rwandais s'étant en effet demandé s'il convenait de débattre du problème au moment où le pays se penche sur les cas des tueurs en série. D'autres, a-t-il reconnu, ont rétorqué que c'est le moment le plus opportun pour débattre de la question car cela pourrait contribuer à la réconciliation. "Il s'agit des deux faces d'une même pièce, et nous devons voir ce que nous pouvons en faire", a souligné M. Kagame.

Il a poursuivi que certaines personnes étaient même sceptiques vis-à-vis du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) à cause de son incapacité à imposer la peine de mort. "Elles se sont demandées comment un tribunal jugeant les pires crimes contre l'humanité pouvait accorder aux cerveaux de ces crimes non seulement le luxe de ne pas avoir à faire face à la peine de mort mais aussi qu'ils jouissent de conditions de détention relativement confortables ».

Evoquant les tribunaux gacaca, il a déclaré que le Rwanda était "impliqué dans une sorte d'exercice d'équilibre ». Il a ajouté que si le Rwanda attendait que chacun des 120 000 détenus passe par les procédures juridiques classiques « cela prendrait 400 ans pour traiter tous les cas ».

"L'autre choix qui se présente à nous consiste à être innovateur et à travailler à partir des gacaca. Ce n'est sans doute pas le processus le plus parfait, mais nous pouvons continuer à combler les lacunes au fil du temps pour garantir les meilleurs résultats possibles étant donné les circonstance. C'est un choix que nous avons fait ».
Le processus de formation de gacaca durera six semaines, pendant lesquelles chaque groupe recevra une formation de deux jours sur les principes de base du droit (particulièrement en rapport avec la loi gacaca de janvier 2001, l'administration de groupe, la résolution des conflits, la déontologie judiciaire, les ressources humaines, et la gestion financière et de l'équipement, a rapporté Hirondelle.

Après cela, les listes des victimes et des suspects seront dressées, et douze procès pilotes seront organisés. Les procès seront ensuite élargis de sorte que chaque partie du pays aura commencé deux mois après les procès pilotes, a précisé Hirondelle. Le budget officiel pour les système gacaca s'élève à 13 millions de dollars environ.

Human Rights Watch (HRW) a indiqué, dans son rapport de 2002 sur le Rwanda, que des efforts ont été déployés tout au long de l'année pour traiter les milliers de détenus contre lesquels il n'y a aucun chef d'accusation spécifique, et qui ont passé jusqu'à sept ans en prison. Les procureurs ont continué la pratique, commencée en l'an 2000, d'amener ces personnes devant leur communauté d'origine pour solliciter des témoignages à charge, faute de quoi les personnes ont été provisoirement libérées. Des centaines d'entre elles ont été remises en liberté de cette manière, a souligné HRW.

Les autorités ont aussi encouragé les détenus à confesser dans le cadre d'une procédure d'un « marchandage de défense », qui visait à écourter les procès, "mais qui ne semblait pas grandement accélérer les procédures » car les procureurs devaient établir la validité de chaque confession. Vers la fin de 2001, plus de 15 000 de ces confessions attendaient d'être examinées, a rapporté HRW.

En mars 2001, 5 310 personnes ont été jugées pour inculpation de génocide dans le système des tribunaux formels, et 17 pour cent d'entre elles ont été acquittées. Un nombre légèrement inférieur de personnes ont été condamnées à mort en l'an 2000 comparé aux années précédentes: de 1996 à 1999, plus de 30 pour cent de celles jugées coupables ont eu une peine de mort, mais en l'an 2000, seul 8,5 pour cent a reçu la même sentence, et aucune n'a été exécutée, a remarqué HRW.

En dépit de l'incidence du viol pendant le génocide, peu d'accusés ont été jugés pour cette accusation, « en partie parce que le personnel judiciaire, à prédominance masculine, s'est peu soucié de ces poursuites, et en partie parce que les victimes ont hésité à venir ».

La question des mineurs en détention est demeurée cruciale: des milliers de détenus âgés de 14 à 18 ans à l'époque de leurs crimes présumés sont restés en détention tout au long de 2001, a rapporté HRW. Même si le jugement de leur cas était supposé prioritaire, la plupart ne l'ont pas été. D'autres, qui ont été jugés, acquittés puis relaxés, ont été à nouveau arrêtés plus tard après des protestations publiques contre leurs verdicts, a-t-elle informé.

Trois juges arrêtés en l'an 2000 pour génocide sont demeurés en prison en 2001. Deux avaient siégé dans des comités qui avaient acquitté des individus dans des cas fortement médiatisés, avant leur propre arrestation. HRW a encore rapporté que les autorités rwandaises avaient reconnu que la corruption au sein du corps judiciaire était « répandue et sérieuse », et avait appelé le personnel judiciaire à la réforme. Aussi bien des procureurs que des juges ont été accusés d'avoir accepté des pots de vin en 2001, soit pour libérer des accusés soit pour garantir leur inculpation, qu'ils soient coupables ou non.

En mars 2001, le Procureur de la République rwandais a publié une liste révisée des suspects du génocide, ou de ceux accusés des crimes les plus graves, a indiqué HRW. Près de 800 personnes ont été ajoutées à la liste antérieure, publiée en 1999, ce qui porte leur nombre total à 2 900 environ.



This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

Partager cet article

Get the day’s top headlines in your inbox every morning

Starting at just $5 a month, you can become a member of The New Humanitarian and receive our premium newsletter, DAWNS Digest.

DAWNS Digest has been the trusted essential morning read for global aid and foreign policy professionals for more than 10 years.

Government, media, global governance organisations, NGOs, academics, and more subscribe to DAWNS to receive the day’s top global headlines of news and analysis in their inboxes every weekday morning.

It’s the perfect way to start your day.

Become a member of The New Humanitarian today and you’ll automatically be subscribed to DAWNS Digest – free of charge.

Become a member of The New Humanitarian

Support our journalism and become more involved in our community. Help us deliver informative, accessible, independent journalism that you can trust and provides accountability to the millions of people affected by crises worldwide.

Join