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Au nord, le préservatif n’est bon que ‘pour les mauvais garçons’

[Senegal] The sugar-producing company at Richard Toll, northern Senegal, has launched an AIDS testing and councelling programme for its 7 000 employees, August 2005. IRIN
Working the sugar cane fields
Parce qu’il est associé aux infections sexuellement transmissibles et au VIH/SIDA, le préservatif ne parvient pas à s’imposer auprès des milliers d’employés de la Compagnie sucrière sénégalaise, la plus grande unité industrielle du pays. «Les travailleurs n’acceptent pas de prendre les préservatifs mis à leur disposition à la pharmacie de l’entreprise», a dit à PlusNews Boubacar Gassama, le médecin chef de la Compagnie sucrière sénégalaise (CSS). «La plupart me répond qu’ils sont mariés, pensant que je suggère qu’ils ont des vies de ‘mauvais garçons’», a-t-il expliqué. La CSS règne depuis plus de trente ans sur la vallée du fleuve Sénégal, une région agro-pastorale située à plus de 500 kilomètres de Dakar, la capitale. Implantée à Richard Toll, une petite bourgade, elle exploite les champs de cannes à sucre qui s’étalent, à perte de vue, le long du fleuve. Depuis six ans maintenant, ses 7 000 employés, dont 3 000 saisonniers, reçoivent une sensibilisation au VIH/SIDA via des discussions organisées au sein de l’entreprise et des ateliers de formation. Et le docteur Gassama, qui ne ménage pas sa peine, se rend régulièrement dans les champs pour informer les coupeurs de canne des modes de prévention. Mais il avoue que la tâche est ardue. «J’aurai voulu que les préservatifs partent comme des petits pains, mais c’est plutôt au compte-goutte», a dit le docteur Gassama en brandissant le paquet de capotes qui traîne dans son tiroir depuis plus d’un an. «Nous avons pensé à glisser des préservatifs dans l’enveloppe du bulletin de paie, mais nous craignons de heurter les sensibilités de nos employés», a-t-il expliqué. Dans son bureau, plutôt spacieux, le médecin reçoit les salariés, les saisonniers, leurs femmes et leurs enfants, jusqu’aux retraités de l’entreprise. Il leur parle des dangers du VIH/SIDA, leur conseille le dépistage, leur explique que le préservatif sert aussi à espacer les naissances. En vain. Selon Elhadji Lamine Dieye, le médecin chef du district sanitaire de Richard Toll, le préservatif souffre d’une mauvaise réputation dans la région après une campagne de promotion mal conçue. «Le préservatif a été uniquement présenté comme un moyen de se protéger contre les infections sexuellement transmissibles (IST), et non pas comme un moyen de contrôler les naissances», a-t-il déploré. Utiliser un préservatif ‘n’est pas bien’ Sans honte, Batoura Thiaw, employé de la CSS depuis dix ans, dit utiliser des préservatifs. «Mais nombreux sont ceux qui vous diront que ce n’est pas bien», a-t-il dit. Thiaw a suivi plusieurs campagnes de sensibilisation dans l’entreprise, au point d’en organiser à son tour au sein de l’association culturelle et sportive à laquelle il appartient. «L’association des femmes de la CSS a organisé une grande discussion pour nous dire comment se protéger contre le VIH», a expliqué Thiaw. Mais «beaucoup de travailleurs ne croient même pas que le sida existe», a-t-il ajouté. Il a dit regretté qu’aucune campagne d’affichage ne vient rappeler aux employés de la CSS l’importance de se protéger du virus. Pourtant, signataire de la charte de l’entreprise en vigueur depuis décembre 2003 au Sénégal pour la prise en charge des personnes infectées par le VIH, la CSS a fait beaucoup pour ses employés, malgré leurs réticences. En septembre 2004, la Fondation Barcelona Sida 2002, financée par le gouvernement espagnol pour appuyer la lutte contre le sida au Sénégal, et le ministère de la Santé ont permis à la CSS, déjà pourvue d’un laboratoire d’analyses, d’ouvrir son propre centre de dépistage. Ce projet pilote pourrait être étendu, en cas de succès, à l’ensemble des entreprises du pays, simplifiant, selon le docteur Gassama, la démarche de l’employé vers le dépistage. «J’ai perdu beaucoup de patients parce qu’ils devaient se rendre à Saint Louis (la capitale régionale, à 110 kilomètres plus au sud) pour leur prise en charge», a-t-il déploré. Depuis, 500 personnes ont fait le dépistage et 15 personnes ont été dépistées positives, en majorité des membres des familles de travailleurs ; cinq travailleurs font partie de ce groupe désormais pris en charge par la CSS. Deux d’entre elles sont des saisonniers venus, en célibataires, des autres régions et des pays voisins comme le Mali, la Guinée ou la Guinée Bissau où les taux d’infection au VIH sont supérieurs à celui du Sénégal, estimé en 2004 à 1,5 pour cent de la population. De nombreux acteurs de la lutte contre l’épidémie estiment pourtant que le taux d’infection pourrait être supérieur à 2,5 pour cent dans la vallée du fleuve – ce que semble confirmer les premières estimations de la CSS, qui révèlent que 2,8 pour cent des employés seraient infectés au VIH. Respecter la confidentialité pour instaurer la confiance Selon le docteur Gassama, deux employés – dont un retraité – reçoivent un traitement à l’hôpital de Richard Toll, qui offre depuis un mois des antirétroviraux (ARV), des médicaments qui prolongent l’espérance de vie des personnes qui vivent avec le virus, dans le cadre de l’Initiative sénégalaise de l’accès aux ARV (Isaarv). Au sein de l’entreprise, personne ne sait qui ils sont. «Nous gérons la confidentialité avec beaucoup de rigueur : seul le médecin sait, même l’administration l’ignore», a expliqué le docteur Gassama, ajoutant qu’il veillait personnellement à ce que le dépistage se fasse volontairement après l’embauche afin qu’il ne devienne pas une condition du recrutement. Le respect de la confidentialité du statut sérologique des employés est un problème sérieux au Sénégal. Selon un activiste, licencié de son entreprise pour cause de ‘séropositivité’, les salariés, craignant les fuites, préfèrent en général venir à l’hôpital plutôt que d’être pris en charge par l’entreprise. Mais le docteur Gassama, qui travaille à la CSS depuis dix ans, le sait, et il évite soigneusement d’être impliqué dans la sensibilisation aux modes de prévention – dont le préservatif -, le conseil et le dépistage des employés. «Je les connais tous très bien et je préfère que ce soit un médecin venu de l’extérieur qui s’en occupe», a-t-il expliqué. Alors Amsata Fall, un travailleur social de l’hôpital de Richard Toll payé par la Fondation Barcelona, vient à la CSS tous les mercredis et les jeudis pour entourer les travailleurs avant et après le dépistage. «Même la famille des travailleurs n’est pas informée du résultat», a dit M. Fall. «Nous gardons tous les dossiers à l’hôpital et le médecin n’est mis au courant que si le dépistage avait été demandé pour cause de maladie». Ce que confirme Thiaw. «Je n’ai jamais entendu parler de travailleur séropositif ici», a-t-il affirmé.

This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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