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Les réfugiés n'ont pas toujours des traitements gratuits

Cela faisait un an que Colette [un nom d’emprunt] vivait en Afrique du Sud lorsqu’elle a commencé à avoir de fortes fièvres. Ne sachant pas parler anglais, cette Congolaise a trouvé de l’aide auprès d’une clinique locale, qui s’occupe des réfugiés francophones. Après avoir fui la République démocratique du Congo (RDC), en proie à un violent conflit armé, Colette, 52 ans, vend des babioles dans les rues de Yeoville, un quartier de Johannesbourg, la grande capitale commerciale sud-africaine. Après son test de dépistage du VIH, c’est Fulgence Kazadi, un conseiller bénévole, lui-même réfugié congolais, qui l’a accueilli. Accompagnée de Fulgence Kazadi, Colette a dû se rendre à l’hôpital Hillbrow, où elle a subi un test CD4 qui permet d’évaluer la résistance du système immunitaire d’une personne séropositive. Les résultats du test ont révélé qu’il ne lui restait que 17 CD4, bien en-deça des 200 lymphocytes qui fixent la limite sous laquelle une personne doit être mise sous traitement antirétroviral (ARV). Comme Colette n’avait pas de statut de réfugié, l’organisation non-gouvernementale Community AIDS Response (Care), pour laquelle travaille Fulgence Kazadi, a rédigé une lettre confirmant le statut de demandeur d’asile de Colette. Grâce à cette lettre, elle a pu avoir accès au traitement ARV. Tous les réfugiés d’Afrique du Sud n’ont pas la chance qu’a eu Colette. Si, depuis 1998, les réfugiés jouissent des mêmes droits d’accès aux services sanitaires que les citoyens sud-africains, peu d’entre eux sont capables de faire valoir de tels droits, faute de pouvoir être identifiés, a expliqué Laurie Bruns, coordinatrice régionale du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) pour le VIH/SIDA. Il n’existe pas de camps de réfugiés en Afrique du Sud, et les personnes qui ont fui une situation difficile dans leur pays d’origine cherchent, seuls, une solution pour refaire leur vie dans leur milieu d’accueil, a-t-elle expliqué. «Nous ne savons pas où ils se trouvent, c’est donc à eux de venir vers nous s’ils ont besoin d’un traitement», a ajouté Laurie Bruns. En général, les travailleurs sanitaires et les réfugiés ignorent l’existence de ce ‘droit au traitement’. C’est pour cela que le HCR travaille en partenariat avec des organisations locales comme Care, qui s’adressent aux communautés, afin d’informer les réfugiés et les prestataires de services sur leurs droits, notamment à la santé. Selon le docteur Emmanuel Ngenzi Nyakarashi, qui gère un centre de conseil juridique pour les réfugiés créé par l’Eglise anglicane et méthodiste, un grand nombre de réfugiés séropositifs n’a pas accès aux services sanitaires. Un plus grand travail de sensibilisation doit être accompli afin de mettre un terme à ‘une tendance xénophobe’ qui règne parmi les prestataires de service : ces derniers font rarement une distinction entre les réfugiés et les immigrants illégaux, a-t-il déploré. «Ils considèrent les réfugiés comme une menace, comme des rivaux qui volent leurs emplois et leurs femmes. Personne ne les voit comme des victimes», a-t-il déclaré. «Ils peuvent s’occuper d’eux, comme ils peuvent refuser de le faire.» Selon Laurie Bruns, l’Afrique du Sud n’abriterait que 160 000 réfugiés. Mais le ministère de l’Intérieur a précisé que 103 000 demandeurs d’asile attendaient toujours une réponse des autorités. Une année peut être nécessaire pour traiter une telle demande et, en attendant, les personnes vivant avec le VIH/SIDA ne peuvent accéder au traitement : seules les organisations religieuses, qui ne font aucune distinction entre les citoyens sud-africains et les étrangers, distribuent des ARV aux demandeurs d’asile. Mais leur capacité est limitée. En outre, sans l’intervention d’organisations comme Care, les demandeurs d’asile séropositifs n’ont pas accès aux traitements dans les hôpitaux publics. Au Congo, il est honteux d’acheter un préservatif Même si les réfugiés viennent de pays qui affichent des taux d’infection relativement bas, ils deviennent plus vulnérables au virus une fois en Afrique du sud, le deuxième pays au monde le plus infecté au VIH. «Les hommes arrivent souvent seuls et ont plusieurs partenaires», a expliqué Daniel Kalenga, un conseiller de Care. «La plupart des femmes se prostituent et pensent qu’il n’est pas nécessaire qu’elles se protègent lorsqu’elles ont des rapports avec des hommes originaires du même pays qu’elles.» Les réfugiés sont peu sensibilisés au VIH, que ce soit dans leur pays d’origine ou en Afrique du Sud, notamment à cause de la barrière de la langue. «Cela fait longtemps que l’Afrique du Sud parle du VIH et lance des campagnes d’éducation, mais les francophones ne peuvent pas comprendre ces messages», a affirmé Daniel Kalenga. Lorsque Fulgence Kazadi est arrivé en Afrique du Sud il y a six ans, il n’avait jamais vu de préservatif. Sa sœur était morte un mois auparavant, après avoir été rejetée par ses parents en raison de sa séropositivité. «Au Congo, c’est vraiment honteux d’acheter des préservatifs. On ne parle jamais de sexe», a-t-il confié. La plupart des réfugiés qui arrivent en Afrique du Sud sont ainsi réticents à l’idée de se faire dépister au VIH/SIDA et rares sont ceux qui révèlent leur statut sérologique. Colette n’a pas révélé sa séropositivité à sa famille en RDC et seuls trois de ses amis en n Afrique du Sud connaissent son secret. Elle reçoit une aide d’un petit groupe de réfugiés séropositifs, créé l’année dernière par Fulgence Kazadi et Daniel Kalenga ; ils se réunissent régulièrement, ce qui leur permet de partager leurs problèmes et leurs craintes. En dépit des ARV et du soutien psychologique qu’elle reçoit, Colette doit se battre : comme la majorité des réfugiés, elle a peu d’espoir de trouver un vrai travail. Certains jours, son petit commerce lui rapporte 20 rands (soit trois dollars américains), et d’autres jours… rien du tout. Contrairement aux Sud-Africains, les réfugiés ne reçoivent pas la subvention allouée aux personnes séropositives qui leur permet de se nourrir correctement et d’aider leur famille. Selon Laurie Bruns, les autorités seraient en train d’étudier la possibilité d’étendre cette allocation aux réfugiés. Le docteur Emmanuel Ngenzi Nyakarashi a évoqué l’histoire d’une des ses patientes, une Rwandaise contaminée au VIH pendant le génocide. Elle recevait des ARV mais elle n’avait pas les moyens d’élever ses deux enfants en Afrique du Sud. Elle savait qu’il lui serait plus difficile d’avoir accès au traitement dans son pays, mais elle est quand même rentrée chez elle. «Elle voulait rentrer chez elle pour être auprès de sa famille et mourir en paix.»

This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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