L’Afrique du Sud accueille de nombreux demandeurs d’asile, réfugiés et immigrés sans papiers venant du reste du continent. Mais le traitement contre le VIH doit être observé à 100 pour cent pour éviter le développement d’une résistance aux médicaments et l’on pensait que la grande mobilité de ces groupes de populations en faisait de mauvais candidats au traitement.
Jusqu’à récemment, seuls les malades possédant des papiers d’identité sud-africains avaient droit au traitement ARV dans les établissements publics. Bien que le gouvernement sud-africain ait enjoint les établissements publics de distribuer des antirétroviraux aux étrangers sans restriction, nombre d’entre eux se voient encore refuser l’entrée et finissent par se rendre dans des cliniques privées telles que Nazareth House, une mission catholique à Yeoville, une banlieue de Johannesbourg, qui distribue des ARV financés par le Plan d'urgence du président américain pour la lutte contre le sida (PEPFAR).
Des chercheurs de l’unité de recherche sur la santé reproductive et le VIH de l’université de Witwatersrand, et de son Programme d’études sur les migrations forcées, ont étudié les dossiers de 431 Sud-africains, 568 étrangers et 298 patients d’origine inconnue ayant commencé à suivre un traitement ARV à Nazareth House entre avril 2004 et mars 2007.
Ils ont découvert que bien que les étrangers aient tendance à commencer le traitement avec un nombre inférieur de lymphocytes T CD4 (mesure de la force du système immunitaire), ils comptaient moins d’admissions à l’hôpital, manquaient moins de rendez-vous à la clinique, avaient moins tendance à abandonner les soins et avaient un taux de survie nettement supérieur à celui des patients sud-africains.
« Le succès de l’ART [thérapie antirétrovirale] chez les étrangers de cette cohorte est particulièrement surprenant, étant donné les obstacles auxquels ils sont confrontés en vivant dans les quartiers défavorisés du centre de Johannesbourg et en observant une ART », ont écrit les chercheurs dans un article résumant leurs découvertes, publié dans le numéro de décembre de l’International Journal of STD and AIDS (IJSA, revue internationale sur les infections sexuellement transmissibles et le sida).
La raison pour laquelle les étrangers étaient plus enclins à bien suivre leur traitement était moins claire. L’article de l’IJSA a avancé l’hypothèse que les étrangers séropositifs pourraient avoir « une plus grande ténacité et détermination pour obtenir des soins de santé » que les citoyens sud-africains.
L’article a également remarqué que « l’histoire naturelle du VIH pouvait être différente chez les étrangers », et que le spectre des maladies liées au sida différait. Les Sud-africains auraient plus de risques de contracter la tuberculose et les étrangers auraient plus tendance à être touchés par le sarcome de Kaposi.
« Je pense que nous devons faire davantage de recherches qualitatives pour comprendre [ces résultats] », a dit Mme Vearey. « Mais ils soutiennent d’autres découvertes concernant la résilience des populations immigrées [et] leurs réseaux sociaux plus solides. Je pense que c’est quelque chose dont nous devons tirer un enseignement en termes d’ART : quelles caractéristiques ont-elles socialement qui leur ont permis de mieux observer les traitements » ?
Mme Vearey a fait remarquer que dans des pays comme le Zimbabwe, dont provenaient la plupart des patients étrangers de Nazareth House, le gouvernement s’était montré plus ouvert aux discussions sur le VIH et le sida que l’Afrique du Sud et cela pourrait avoir joué un rôle dans les différences de taux d’observance.
Les résultats de l’étude seront utilisés pour soutenir les efforts du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) et de la Southern African HIV Clinicians Society visant à garantir que les étrangers en Afrique du Sud et ailleurs bénéficient du même accès au traitement antirétroviral que la population locale.
« La santé est un sujet tellement politique que lorsque nous pouvons présenter des preuves qui remettent en question les préjugés, cela aide vraiment », a dit Mme Vearey.
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